L’avocate peace & love
Céline Gobert
2012-02-23 15:00:00
Il n’y a qu’à pénétrer à l’intérieur de son cabinet rue Laurier Est à Montréal pour être certain d’une chose : sa pratique est à échelle humaine. Le cadre est simple, mais chaleureux. Le client peut s’y sentir comme à la maison.
"Je me suis dirigée en droit, pour la justice et pour aider les gens, j’ai une philosophie très humaniste", déclare d’emblée l’avocate aujourd’hui spécialisée dans une pratique de médiation.
Toute son énergie est consacrée à des dossiers concernant des conflits dans les copropriétés, conflits entre actionnaires, arbitrage en matière civile. Aussi, elle intervient à titre de médiateur aux petits créances, et sur des questions d'harcèlement psychologique en entreprises.
"L’humain a toujours été au centre de ma pratique; même en litige la négociation n’est jamais loin, j’ai toujours cela en tête", confie celle qui n’a pas hésité une seule seconde à reprendre ses études après une douzaine d’années de pratique.
Diplômée de l’Université Sherbrooke et barreau 1980, elle retourne sur les bancs universitaires quelques années plus tard, avec la sensation qu’elle ne réfléchissait pas assez aux enjeux du droit. Elle passe alors une maîtrise en notion du contrat d’adhésion à l’UdM où elle enseigne 4 heures par semaine depuis 1987. Elle y apprend la sociologie, l’histoire du droit, le pourquoi et le comment de la norme.
Elle publie son mémoire et des articles dans la ''Revue de droit de l’Université Sherbrooke'' ou la ''Revue du Barreau''. Elle prend des cours de médiation, de prévention et règlements des différents. Elle devient la première femme présidente d’une Association étudiante à Sherbrooke et s’y découvre une passion: autrui.
Après, elle teinte sa carrière juridique de couleurs humanistes: supervisions de stages en milieu communautaire, concours à diriger sur le droit des femmes, séminaires de recherches en droit civil, tribunal-école. Ce n’est pas un hasard si, 11 ans après le lancement de sa carrière en solo, sa clientèle est une clientèle de quartier, composée essentiellement de "Monsieur et Madame Tout le Monde", dit-elle.
"Mon enseignement c’est la base, cela paye le loyer donc je ne fais pas forcément l’effort d’aller chercher une clientèle de litige. Mon désir est vraiment de développer une pratique de médiation (civile) et d’arbitrage", commente-t-elle.
Faites l’amour, pas la guerre
Au départ, elle bénéficie des contacts d’un réseau bâti pendant 18 ans aux côtés de trois associés. Dans cette petite étude à St-Henri, association en société réelle où tous se partagent revenus et dépenses, elle fait beaucoup d’aide juridique.
Avec les années, elle se spécialise davantage dans le droit civil, la responsabilité et les assurances. J’ai un petit côté Don Quichotte, quelquefois c’est très David contre Goliath", plaisante-t-elle. Souvent, elle se retrouve en demande contre de gros bureaux, dans le cas de poursuites contre des assureurs par exemple. Pourtant, cela ne lui fait pas peur.
"Je dis toujours à mes clients: c’est sûr, nous n’avons pas les moyens de faire un procès de 20 jours mais tout ce qui compte c’est que l’on nous sente prêts à la bataille." C’est là qu’elle entre en négociation et qu’elle règle des dossiers qu’elle n’aurait pas pu vraiment plaider autrement. Paradoxalement, c’est en créant ce rapport de force, qu’elle parvient à une résolution des conflits.
Selon elle, les gens ont tendance à privilégier de telles négociations à l’habituelle bataille entre avocats. Si elle opte la plupart du temps pour une tarification à l’heure (175$ + taxes), elle n’hésite pas pour autant à faire des compromis sur ses honoraires, lorsqu’elle croit au dossier. Notamment dans des affaires de responsabilité médicale, elle accepte des dossiers à pourcentage, au moins jusqu’à l’expertise.
Elle propose aussi des tarifs forfaitaires: 1000 $ par jour de procès par exemple, qui incluent interrogatoires et procédures. Son conseil à tous ceux qui souhaitent se lancer en solo est d’ailleurs très clair : "il faut y croire et être animé de passion." Il n’y a qu’ici, de toute façon, que sa pratique pouvait correspondre à ses véritables aspirations.
"On est qui on est. J’ai déjà eu des offres pour aller travailler dans de gros bureaux mais je préfère plus petit pour pouvoir contrôler mon temps, même si cela veut dire gagner moins."
Oui, 60 000 $ par année pour environ 50 heures de travail par semaine.
"Je ne suis pas à la recherche du glamour", déclare cette humaniste dans l’âme.
D’ailleurs, rien d’autre n’aurait pu lui offrir cette fierté qui est sienne aujourd’hui.