Le plaideur devenu financier
Natacha Mignon
2009-11-25 14:38:00
Diplômé de Sherbrooke en 1989, l’avocat entre aussitôt dans un bureau local, le cabinet Fournier et associés, absorbé par la suite par Heenan Blaikie. Il y exerce en litige bancaire.
Il complète sa formation purement juridique par une maîtrise à Edimbourg en Ecosse en 1997, dans le cadre de laquelle il s’intéresse de près au droit des nouvelles technologies . « A mon retour, je voyais pleins d’opportunités pour les avocats dans ce domaine de pratique, dit-il. Mais à l’époque, les cabinets n’étaient pas encore concernés par internet. »
Retour donc à ses premières amours. Son expérience passée lui permet d’intégrer le fonds de solidarité de la FTQ, direction les affaires juridiques.
C’est véritablement à cette place qu’il attrape le virus de la finance. Il prend des responsabilités de plus en plus importantes au sein du fonds et suit en parallèle six cours dans des domaines financiers.
« Ma formation d’avocat n’aurait pas suffit pour changer de voie. J’ai eu besoin de retourner aux études pour me former en finance. Ensuite, le fait de côtoyer les gens du capital de risque m’a permis d’apprendre le langage financier », dit-il.
Il se prépare ainsi à l’étape suivante. La FTQ lui confie, après ce long passage aux affaires juridiques, la gestion d’un de ses fonds de capital de risque, le Fodex, qu’il dirigera quatre ans, avant de partir à son compte, dans la finance.
Il y a deux ans, l’avocat monte avec un autre associé, lui analyste financier, la société Goal Capital, laquelle est spécialisée dans les conseils en vente et acquisitions d’entreprises, autant que dans la réalisation de montages financiers et la recherche de partenaires.
« Je suis avocat et en face, j’ai parfois des avocats qui se portent candidats au rachat d’entreprises, dans des domaines variés. Ils sont généralement rigoureux et très préparés. Si je dois leur trouver un défaut, ce serait en général des lacunes dans tout ce qui touche aux chiffres. »
Retour sur expérience
François St-Arnaud est le seul avocat de sa société de 4 personnes. Il n’a pas totalement exclu le droit de sa pratique professionnelle. « Les questions juridiques occupent encore 20 % de mon temps. »
Pour le reste, c’est de la finance. Et pourtant, même dans ce domaine, son expérience en litige bancaire lui sert.
« La plaidoirie, c’est de la vente, dit-il. Mes clients trouvent en moi quelqu’un capable de capter l’intérêt de leur entreprise, quelles que soient ses forces et ses faiblesses. Ils sont confiants de me laisser la représenter. Cette habileté, je l’ai développée en représentant des clients devant les tribunaux.»
Face à ses confrères
Son expérience d’avocat le rend aussi vigilant vis-à-vis des avocats qui se retrouvent sur les mêmes deals que lui. « Lorsqu’on est soi-même avocat, on devient exigeant », dit-il.
Cela au profit de ses clients, croit-il. L’avocat s’occupe actuellement de transactions dont la valeur oscille entre 5 et 20 millions de dollars. Des sommes rondelettes, pourtant, pas toujours suffisantes pour franchir le seuil des grands bureaux. Goal Capital a conclu un partenariat avec le cabinet Prévost Fortin d’Aoust, qui lui réfère des dossiers et réciproquement.
Le recours aux cabinets locaux de taille moyenne permet de limiter les coûts et d’obtenir dans certains cas des soumissions à prix fixe, ce qui est quasi-impossible de la part des grands bureaux.
« Dans un deal, tout le monde prend un risque, dit-il. Seul le cabinet d’avocat, lorsqu’il est payé à l’heure ne prend aucun risque, avec une soumission à prix fixe, lui aussi joue le jeu de la transaction. »