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Un divorce de 100 M$ sera déféré à la Belgique

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Julien Vailles

2017-10-03 15:00:00

Madame avait tout intérêt à ce que l’affaire soit instruite au Québec, alors que monsieur avait tout à gagner d’être entendu en Belgique...
Jessica Harding
Jessica Harding
La Cour d’appel du Québec vient de déférer compétence aux tribunaux belges, dans une affaire de divorce où les sommes en jeu excèdent 100 millions de dollars…

En effet, le plus haut tribunal de la province vient de trancher une affaire de litispendance internationale, déclinant la compétence des tribunaux québécois. Et il s’en est fallu de peu : si le recours avait été déposé trois jours plus tôt, les choses auraient été bien différentes.

Les cabinets Osler, Robinson Sheppard Shapiro et Dentons Canada ont été impliqués dans l’affaire.

Belgique ou Québec? Telle est la question… à plusieurs millions $

Vincent et Leila★ se sont rencontrés en 1990. Monsieur est Français, alors que madame réside au Maroc. Ils deviennent un couple et s’installent à Paris, où ils ont deux enfants.

En 2004, les conjoints déménagent en Belgique, et se marient la même année, sous le régime belge de la séparation de biens. En 2012, ils obtiennent la nationalité belge; Vincent a du même coup renoncé à sa nationalité française. Enfin, Vincent et Leila emménagent au Québec en 2013, et y demeurent un an, jusqu’à leur séparation en août 2014.

Vincent « bat de vitesse » Leila en déposant sa demande en divorce devant les tribunaux belges le 12 août 2014. Trois jours plus tard, Leila dépose la sienne devant la Cour supérieure du Québec. Sous la plume de la juge Carole Hallée, la Cour se déclare compétente pour instruire l’affaire. Vincent en appelait de cette décision; la Cour d’appel vient de lui donner raison.

Le forum compétent avait énormément d’importance, car des sommes colossales étaient en jeu. En effet, tout divorce prononcé au Québec emporte partage du patrimoine familial, et donne ouverture à une éventuelle prestation compensatoire.

Benjamin Prud’homme
Benjamin Prud’homme
De plus, le contrat de mariage des parties comprenait une clause de donation réciproque. Selon la loi belge, les donations consenties pendant le mariage peuvent être révoquées au divorce – ce qui n’est pas le cas au Québec, à moins de démontrer une cause d’ingratitude.

Or, Vincent a bel et bien révoqué les donations consenties à Leila : une valeur de 33 millions de dollars canadiens. Pour sa part, Leila réclamait une pension alimentaire mensuelle pour elle-même de 200 000 $, une somme globale de 20 millions de dollars à lui être attribuée, ainsi qu’une prestation compensatoire de 50 millions de dollars.

Double compétence

Dans ces circonstances, on comprend aisément que Leila avait tout intérêt à ce que l’affaire soit instruite au Québec, alors qu’au contraire, Vincent avait tout à gagner d’être entendu en Belgique.

D’ailleurs, le tribunal québécois et le tribunal belge se sont déclarés tous deux compétents pour entendre l’affaire. La partie s’estimant lésée dans chaque cas a fait appel, François au Québec, Leila en Belgique.

Xavier Van Overmeire
Xavier Van Overmeire
À notre Cour d’appel, les juges Jaques Dufresne, Nicholas Kasirer et Suzanne Ouellet ont analysé les règles de la litispendance : il doit y avoir identité de recours, entre les mêmes parties, qui se basent sur les mêmes faits. Or, toutes ces conditions étaient remplies en l’espèce.

La Belgique n’était pas un for de complaisance pour Vincent, a par ailleurs conclu la Cour d’appel. Les époux en ont encore la citoyenneté, s’y sont mariés et y possèdent des biens importants, dont une résidence secondaire où ils étaient justement en vacances au moment de la décision de divorcer. Donc, on ne peut pas statuer que le choix de Vincent constitue un abus de procédure.

D’ailleurs, l’avocat de Vincent, Me Sylvain Lussier, est d’avis qu’un jugement de divorce au Québec aurait été bien plus « artificiel » pour les parties. En effet, elles se sont mariées en Belgique et y sont demeurées près de dix ans par après, alors qu’elles n’ont vécu qu’un an au Québec. « Dans ce contexte, il était bien plus logique que la loi belge s’applique », croit Me Lussier.

Sylvain Lussier
Sylvain Lussier
Me Lussier travaillait sur ce dossier avec Me Jessica Harding, elle aussi chez Osler, ainsi qu’avec Mes Benjamin Prud’homme et Pascale Nolin, de Robinson Sheppard Shapiro. Quant à Leila, elle était représentée par Mes Luc Giroux, Martin Poulin et Xavier Van Overmeire, de Dentons Canada.

Joint par Droit-inc, Me Poulin dit ne pas être autorisé à émettre des commentaires.

Enfin, le Procureur général du Québec, mis en cause, avait mandaté Me Luc-Vincent Gendron-Bouchard.

Pour consulter l'arrêt, cliquer ici

★Noms fictifs
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5 commentaires
  1. SOQUIJ
    SOQUIJ
    il y a 7 ans
    Droit de la famille - 172244 (en format Word).
    Le texte de l'arrêt est disponible ici : http://soquij.qc.ca/decisions/fr/51428714-1.doc

  2. Me Halidi
    Me Halidi
    il y a 7 ans
    Déplorable
    C'est dommage que ça ne se poursuit pas ici. Ça aurait été bon pour notre milieu. Plein de retombées économiques ce recours, pas juste pour les avocats! (Huissiers, psychologie, experts, ...)

  3. Sedia Stercoraria
    Sedia Stercoraria
    il y a 7 ans
    Sedia Stercoraria
    J'étais dans ce dossier pour quelques compagnies. C'est le gars qui a acheté le chateau de Pauline Marois.

    • Avocate
      Avocate
      il y a 7 ans
      Secret professionnel
      Le secret professionnel, vous connaissez? D'autant plus qu'il s'agit d'un dossier familial.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 7 ans
      Déontologie
      Vive le secret professionnel n'est-ce-pas...

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