Action collective des Courageuses : l’appel de Rozon
Julien Vailles
2018-07-20 10:15:00
Fin mai dernier, le juge Donald Bisson de la Cour supérieure concluait à l’existence des quatre conditions nécessaires à l’exercice de l’action collective et donnait le feu vert afin que celle-ci soit entendue. Le producteur Gilbert Rozon a fait appel, considérant que la demande aurait dû échouer.
Pour rappel, le recours entrepris par le groupe nommé les « Courageuses » et mené par la comédienne Patricia Tulasne couvre « toutes les personnes agressées et/ou harcelées sexuellement par l’ex-grand patron de Juste pour rire ».
Mme Tulasne, notamment, a été autorisée par le juge Bisson à réclamer 200 000 $ en dommages-intérêts compensatoires pour indemniser sa perte de capacité de gains.
Le recours des Courageuses est porté par les cabinets Kugler Kandestin, et plus précisément Mes Robert Kugler, Pierre Boivin et Olivera Pajani, et Trudel Johnston Lespérance, qui envoit au front Mes Bruce Johnston et Gabrielle Gagné.
Mes Bernard Larocque, Jonathan Lacoste-Jobin et Raymond Doray, de Lavery représentent M. Rozon.
Or, si on en croit les procureurs de M. Rozon, le juge de première instance a commis plusieurs erreurs qui doivent être corrigées en appel.
Erreurs manifestes déterminantes
D’abord, on est d’avis que le groupe constituant le recours ne crée pas une « communauté d’intérêts » suffisante. Il n’y a aucune société, aucun employeur poursuivi qui serait responsable à titre de commettant. Seule subsiste la position d’influence de M. Rozon, qui n’est pas niée, mais qui n’est aucunement démonstratrice de faute, clament les avocats.
La Cour devra de toute façon analyser extensivement la situation personnelle de chaque membre et ce faisant, on conçoit mal comment l’action collective, qui est censée faire économiser des ressources judiciaires et du temps, pourra remplir ces objectifs.
En somme, on plaide que les demandes s’apparentent davantage à des réclamations individuelles qu’à des éléments susceptibles de créer un groupe, dont les membres n’ont en commun que M. Rozon et sa position de pouvoir.
Ensuite, on plaide que la description du groupe est exagérément large puisqu’elle s’étend sans limite territoriale ou de temps. Ainsi, n’importe qui qui a rencontré M. Rozon à n’importe quel moment pourrait, selon sa perception subjective, faire partie du groupe, déplorent les avocats de l’appelant.
Enfin, les avocats sont d’avis que le juge a indûment favorisé le principe visant à enrayer les agressions sexuelles, principe qui, bien que louable, ne devrait pas avoir application dans le dossier.
Donc, à cause de ces « erreurs manifestes déterminantes » on réclame de renverser la décision de l’Honorable juge Bisson et de ne pas autoriser l’action collective.