Permis d’exercer pour une avocate-escorte!
Delphine Jung
2019-04-18 13:15:00
Bien que satisfaite de la décision, Nadia Guo, la jeune femme, qui par ailleurs est aussi une escorte, affirme que son cas illustre les nombreuses faiblesses du système d’éducation juridique du Canada.
«Je suis fière de pouvoir pratiquer le droit maintenant», écrit Nadia Guo dans un courriel à Legal Feeds qui rapporte la nouvelle.
«Je vais pratiquer le droit pénal jusqu’à ma mort. En tant que libertaire, cela a du sens», a-t-elle écrit.
Elle ajoute que la décision du tribunal «est bonne, mais fournit un contexte incomplet en ce qui concerne le manque de respect » avec lequel elle a traité son mentor de l’époque.
«J'ai également beaucoup appris sur les différences entre la manière dont les avocats disent agir et parler et la manière dont ils agissent et parlent vraiment», explique Nadia Guo.
L’argent
La jeune femme de 28 ans déplore le fait qu'il a fallu trois ans pour que le dossier se termine.
«Dieu merci, je suis bonne pour séduire les hommes et je sais que je serai plus en sécurité financièrement en tant qu'escorte que je ne le serai jamais en tant que stagiaire ou associée en droit pénal», explique Mme Guo.
«C’est particulièrement vrai étant donné que j’avais énormément de prêts étudiants à rembourser et que ni la Osgoode Hall Law School ni la Faculté de droit de l’Université de Toronto n’étaient très accommodantes à cet égard », ajoute-t-elle en précisant avoir obtenu une aide financière d'environ 3 000 dollars US pour couvrir les coûts de scolarité d'un peu moins de 90 000 dollars US.
Nadia Guo a également envoyé un extrait d'un récent blogue qu'elle a publié sur la diversité.
Elle y dit que si le Barreau de l’Ontario veut «prendre au sérieux» les défis de l'inclusion, de la diversité et de l'égalité, il devrait être «plus tolérant et plus compréhensif avec les candidats dont les idées et la manière de parler ne sont pas immédiatement conformes aux normes des traditions élitistes de la société distinguée ».
Quatre plaintes contre elle
En 2015, Mme Guo a perdu contre le Barreau de l’Ontario lorsque la première des quatre plaintes a été déposée contre elle.
Ces plaintes concernaient sa conduite dans un bureau du greffier au civil et la publication de nombreux commentaires désobligeants concernant des avocats. Par exemple, elle s’était moquée d’un avocat qui ne savait pas ce qu'était un fichier PDF.
Plus inquiétant encore, elle a été accusée d'avoir tenu des propos désobligeants sur des professionnels du droit et des travailleurs du système judiciaire sur Twitter.
Elle a également créé un site Web public répertoriant les noms de 50 «mauvais policiers», deux «mauvais procureurs de la Couronne» et deux «mauvais juges».
Les activités en ligne de la jeune femme ont également conduit à une enquête du Barreau de l’Ontario sur l'avocat torontois Marco Forte, avec qui elle était en stage à l'époque.
Dans une décision rendue le 15 janvier, le Barreau a réprimandé Me Forte pour ne pas avoir surveillé les discours de sa stagiaire sur les médias sociaux.
«Les parties ont convenu qu'il peut être bon que les étudiants en droit et les titulaires de licence utilisent activement les médias sociaux, expriment leurs opinions, participent à un débat, plaident en faveur d'un changement ou avancent des positions en public qui pourraient être impopulaires ou même inconfortables pour d'autres participants », lit-on dans la décision du 27 mars.
« Cependant, la nature et le ton d'un nombre important de commentaires de Mme Guo pendant la période en question ont suscité des inquiétudes quant à son jugement », peut-on encore lire.
L'avocat de Mme Guo, Kris Borg-Olivier, avait fourni la preuve que sa cliente avait reconnu sa faute et avait pris des mesures pour mieux gérer son stress et sa colère.
Elle a notamment vu un psychothérapeute.
«Pour les raisons qui suivent, nous constatons que Mme Guo est actuellement de bonne moralité. L'application est autorisée », conclut le Barreau.