Une juge très respectée rend l’âme
Mathieu Galarneau
2019-07-15 15:00:00
Mme Trahan a commencé sa carrière chez Lavery De Billy après avoir obtenu sa licence en droit de l’Université de Montréal. Elle occupe différents postes dans la fonction publique dès 1979, puis devient juge de la Cour supérieure le 5 juillet 1994. Un poste qu’elle occupera jusqu’à sa retraite, le 30 juillet 2010.
En 1979, elle devient juriste au Service du droit commercial international du bureau des Affaires juridiques des Nations Unies à Vienne, en Autriche. En 1981, elle est nommée commissaire à la Commission canadienne des transports et devient, en 1985, présidente du Comité des transports par eau. De 1986 à 1994, Anne-Marie Trahan est sous-ministre déléguée, Droit civil et Services législatifs au ministère de la Justice du Canada. Elle a été juge de la Cour supérieure du Québec du 5 juillet 1994 au 30 juillet 2010.
Me Bernard Amyot, associé chez LCM Avocat, connaissait Mme Trahan depuis qu’il était petit, ayant grandi dans la même paroisse qu’elle. Il parle aujourd’hui d’une « femme positive, enthousiaste, au rire communicatif ».
Me Amyot note également l’implication de la juge dans l’organisation des Journées strasbourgeoises, des réunions qui réunissent des juges francophiles du Canada. « Elle a tenu ça à bout de bras pendant de nombreuses années. Sa contribution va nous manquer. »
Il se rappelle avoir plaidé une fois devant elle en Cour supérieure. « Elle était très à l'écoute. Elle ne perdait jamais non plus son sens de l'humour. Elle pouvait être taquine à l'occasion! »
Le professeur de droit de l’Université de Montréal, Vincent Gautrais, se rappelle d’une femme dotée d’une grande humanité.
« C'est une personne avec une joie de vivre hors du commun. Elle avait un rire incroyable! Elle était très attachée à la notion de justice avec un grand “ J ”, plus à la justice qu'au système de justice », dit celui qui a côtoyé Mme Trahan dans ses fonctions d’administratrice du Centre de recherche en droit public (CRDP).
« C'est quelqu'un qui nous a toujours défendus, qui appréciait les recherches qui étaient faites au Centre. Pour nous, c'était une caution morale et émotive très puissante qui nous encourageait beaucoup dans notre petit microcosme de recherche. »
Me Patrick Kenniff, qui siégeait au conseil de direction du CRDP avec Mme Trahan, a confié que la nouvelle avait « frappé comme un coup de masse » ses membres. « Dans les normes d'aujourd'hui, elle n'était pas très vieille. On ne la savait pas malade. Qu'elle nous quitte trois semaines après nous avoir communiqué cette information, ça frappe encore plus durement. »
Me Kenniff se rappellera toujours du sens de l’humour et de la bonne humeur de la juge Trahan. « Elle voyait le côté loufoque des choses et faisait rire les gens alors qu'on discutait de dossiers très sérieux. C'était quelques secondes de détente qui facilitait les discussions plus sérieuses. Elle était très chaleureuse, toujours contente de voir ses collègues. »
Sur Twitter, la juge militaire à la retraite Lise Boulanger a également souligné que Mme Trahan était « une femme exceptionnelle, une vraie féministe ».
« C’est avec émotion que j’apprends la nouvelle de la mort de la juge à la retraite Anne-Marie Trahan. Je ressens un sentiment d’admiration pour le travail que cette juriste émérite a accompli. Elle sera toujours reconnue pour sa rigueur et sa préoccupation pour les droits des personnes vulnérables. », exprime l’archevêque de Montréal, Mgr Christian Lépine.
« Je garderai toujours en mémoire son intelligence vive, son sourire, son rire éclatant, son empathie, sa passion, son amour des arts et de la culture », a pour sa part écrit sur Twitter Me J.Serge Sasseville, Vice-président principal, Affaires corporatives et institutionnelles de Québecor Média.
Passionnée d’opéra, elle était très impliquée au sein du développement des jeunes artistes, étant mécène de la faculté de musique de l’Université de Montréal et présidente de la Société d'art vocal de Montréal. Elle occupait également différents postes dans des organismes dont la Fondation du Collège universitaire dominicain, où elle était administratrice. « Anne-Marie restera longtemps pour nous un exemple de grande générosité », a écrit l’organisme sur sa page Facebook.
Le Barreau du Québec avait décerné le Mérite Christine-Tourigny à l’honorable Trahan pour son travail en justice sociale et à l’avancement des femmes juristes le 8 mai dernier.