Le tribunal met la hache dans les honoraires de BLG
Gabriel Poirier
2022-05-24 15:00:00
Parce que la facturation des honoraires a été faite sans égard à la valeur réelle du travail effectué, et sans que le client ne sache à quoi s'attendre, la Cour a réduit la facture totale de moitié.
La réclamation portait sur le solde impayé d’une facture qui totalisait 532 497 dollars. Le client de BLG, la société de financement privé Olivier Leclerc Capital (LeclercCo), ayant déjà déboursé 153 000 $, estimait « ne rien devoir » de plus au cabinet.
D’où le litige.
La cour a tranché, jugeant que le cabinet, qui réclamait 365 475 dollars en honoraires impayés de sa cliente LeclercCo, estime plutôt que la facture totale ne doit pas excéder 250 000 dollars.
Il ne reste donc plus que 97 000 dollars à payer.
Un chèque en blanc
« (LeclercCo) reproche (à BLG) de s’être comportée comme si elle lui avait remis un chèque en blanc. Les montants des honoraires facturés, plaide-t-elle, sont injustifiés, injustifiables et clairement déraisonnables », résume la décision du Tribunal.
LeclercCo avait retenu les services de BLG en 2016 pour l'aider à régler un différend actionnarial. Le travail s’est effectué de la fin 2016 jusqu’à l’été 2017.
Dans sa décision du 3 mai dernier, la juge Karen M. Rogers, de la Cour supérieure, a déterminé que si les honoraires exigés étaient raisonnables pour le mois de décembre 2016, ils devaient être revus à la baisse pour la période allant du 1er janvier au 31 juillet 2017, période pour laquelle ils ne devraient pas dépasser 250 000 $, a-t-elle conclu.
Or, BLG exigeait notamment 353 785 $ pour les seuls mois de janvier et de février, en plus du travail effectué jusqu’en juillet 2017, pour un grand total de 365 475 dollars en solde impayé. Le cabinet réclamait de plus le taux annuel de 12 % applicable de 2017 à 2022, ajoutant près d’un quart de million de dollars à la facture finale.
Représenté à l’interne par l’associée Me Eugénie Lefebvre et l’avocate Me Valerie J. Di Lena, BLG n’a pas voulu commenter. « Nous sommes encore à évaluer la suite que nous souhaitons donner à ce jugement », a expliqué par courriel la directrice régionale du développement des affaires, Valérie Laplante.
Obligation de renseignement non respecté
La Cour supérieure estime que Borden Ladner Gervais a manqué à son obligation de renseignement, et souligne qu’il n’a pas appliqué de « démarche concrète » pour facturer des honoraires justes et raisonnables à son client.
« Une simple révision des factures en litige démontre que le montant des honoraires facturés à LeclercCo est le fruit d’une simple opération mathématique consistant à multiplier le temps consacré pour l’exécution du Mandat (...) », précise le jugement.
En l'occurrence, rien ne permettait à Leclerc d’anticiper des factures aussi élevées, notamment pour les deux premiers mois de 2017.
« En fait, LeclercCo reçoit la facture pour les services professionnels rendus en janvier alors que le travail de BLG durant le mois de février est déjà bien amorcé. La facture pour les services rendus au mois de février, reçue en mars, constituera également une grande surprise pour LeclercCo. »
La Cour supérieure note « l’absence de coordination » entre les différents avocats assignés au dossier, dont les associés Sylvie Bouvette, François D. Gagnon, Tommy Tremblay, Hugo Babos-Marchand et Eve Gaudet, et l’avocat Hugo Saint Laurent. Le taux horaire de Me Bouvette était de 625 $ tandis que celui de Me Tremblay était de 490 $.
Cette absence de coordination a mené de mêmes documents à être révisés par plusieurs professionnels, qui ont été appelés à rendre de « mêmes services (...) sans en évaluer la valeur ajoutée ».
La Cour détermine donc que le client ne doit débourser que 97 000 dollars pour solde de tout compte, auquel s’applique un taux annuel de 12 % depuis 7 mars 2017.
Contacté par Droit-Inc, l’avocat de LeclercCo, Me Louis Georges Brunet, de Gagnon, Brunet & Kilani, a décliné notre demande d’entretien.
Anonyme
il y a 2 ansQuelle honte pour notre profession.
Le manque flagrant d'introspection et de jugement qui a mené une dizaine d'avocats à : 1) facturer de tels honoraires 2) intenter des procédures pour en réclamer le paiement et 3) se rendre à procès, est ahurissant.
2022 QCCS 1639
Anonyme
il y a 2 ansD'accord avec vous..
quand j'ai commencé, l'avocat en charge de la facturation regardait le dossier, le résultat obtenu etc. et envoyait un compte pour services rendus. Généralement c'était juste et il y avait un exercice de pondération, positif ou négatif.
Il y a eu des abus et ensuite les avocats ont dû changer la façon et détailler etc.(ce qui est très bien).
maintenant l'abus c'est de payer des jeunes et moins jeunes des salaires astronomiques en sachant bien que pour être rentable les heures doivent être inscrites no matter what.
Cela donne des avocats qui facturent 2000 heures et plus, et tout le monde sait bien que c'est impossible. Certains le font vraiment mais il sont rares, les autre ce sont les clins d'œil entendus et les remarques : lui/elle sait facturer!
Cela donne le jugement dont l'article parle.
Anonyme
il y a 2 anspour la référence du jugement
The Prattler
il y a 2 ans2 BLG attorneys and 4 days of trial for an action on account?
Anonyme
il y a 2 ansDommage que des jeunes avocats aient été pris dans cette histoire rendue publique des années après... Faute de l'associé en charge?
Anonyme
il y a 2 ansLe syndic du Barreau devrait automatiquement se saisir de ce dossier et enquêter sur les pratiques qui sont dénoncées dans ce jugement.