Fusions et acquisitions

Les cabinets champions en M&A

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Camille Dufétel

2023-02-08 15:00:00

L’année 2022 aura été plus difficile que d’autres sur le plan des fusions-acquisitions, mais plusieurs cabinets canadiens ont su tirer leur épingle du jeu. Lesquels ?
imge #53071Pas de doute, l’année 2022 ne marquera pas l’histoire des fusions-acquisitions, à en croire le classement mondial de Refinitiv.

À l’échelle mondiale, leur activité a eu beau totaliser 3,6 billions de dollars américains, cela constitue tout de même une baisse de 37 % par rapport à 2021, la plus forte baisse d’une année sur l’autre depuis 2001.

Ce sont quand même près de 55 000 transactions qui ont été annoncées en 2022. Mais encore une fois, un chiffre à la baisse, de 17 % comparativement à l’année précédente.

Qui dit activités de fusions-acquisitions, dit avocats. Le cabinet champion du monde en termes de deals est ainsi l’américain Goodwin Procter, qui a conseillé 1028 transactions annoncées d’une valeur d’environ 128, 6 milliards de dollars.

Champion en termes de montants, Sullivan & Cromwell a fourni des conseils sur des transactions annoncées totalisant 516,6 milliards de dollars dans le monde en 2022, ce qui représente une part de marché de 14 %.

Du côté des transactions canadiennes, Osler Hoskin & Harcourt se classe au premier rang des cabinets d’avocats, que ce soit en termes de valeur ou de volume des transactions réalisées.

Osler, qui compte des bureaux à Toronto, Montréal, Calgary, Ottawa, Vancouver et New York, a ainsi fourni des conseils dans le cadre de 171 transactions d’une valeur totale de 36 milliards de dollars américains.

Concernant le nombre de transactions, annoncées ou complétées, voici les cabinets qui suivent Osler, dans l’ordre : Fasken, Gowling WLG, Stikeman Elliott et Blake Cassels & Graydon.

Miller Thomson est dans le top 10 pour le nombre de transactions complétées.

Torys l’est pour les transactions annoncées, et est surtout en tête de liste en termes de valeur des transactions annoncées. Le cabinet a conseillé 63 opérations avec une participation canadienne, pour une valeur totale de plus de 39 milliards de dollars américains.

Me Eric Levy. Source: Osler
Me Eric Levy. Source: Osler
Stratégie

Chez Osler, c’est la stratégie qui fait la différence, selon Me Eric Levy, en charge du groupe commercial corporatif à Montréal et qui siège sur le conseil d’administration à l’échelle nationale.

« Une des décisions que le bureau a prises de façon stratégique est d’investir dans des sociétés émergentes à forte croissance, surtout en technologie », pointe ce Barreau 1996.

Osler suit alors l’évolution de ces sociétés, qui font éventuellement par la suite des fusions-acquisitions. Il estime que le rendement sur ce type d’investissement est excellent.

Divers avocats apportent leurs forces selon le type de transactions, aussi, il est difficile pour lui de chiffrer ceux dédiés aux fusions-acquisitions.

Me Éric Bédard. Source: Fasken
Me Éric Bédard. Source: Fasken
Expertise

« Fasken a développé de l’expertise dans de nombreuses industries qui fonctionnent très bien, que ce soit les ressources naturelles, la technologie, la distribution alimentaire… », souligne pour sa part Me Éric Bédard, associé-directeur de ce cabinet pour la région de Québec.

L’associé insiste également sur « la profondeur des équipes ».

Il assure que Fasken, qui a remporté le prix « Cabinet d'avocats de l'année en droit des sociétés » dans le cadre de la remise des prix Chambers Canada 2022, est devenu en l’espace de deux ans le plus grand cabinet d’avocats au Canada et au Québec.

Cela contribue beaucoup, selon ce Barreau 1989, à « sécuriser les clients » que ce cabinet est capable de « livrer des transactions de qualité dans des délais très courts ».

L’associé remarque beaucoup d’investissements étrangers au Québec, américains et européens, que ce soit dans le secteur énergétique ou agroalimentaire, et estime que le défi de Fasken est d’être un facilitateur dans ces grandes implantations étrangères à venir.

Mes Philippe Bourassa et Sébastien Vilder. Source: Blake, Cassels & Graydon
Mes Philippe Bourassa et Sébastien Vilder. Source: Blake, Cassels & Graydon
Analyse et technologie

Me Philippe Bourassa, associé chez Blake, Cassels & Graydon, évoque pour sa part le temps passé par son cabinet à analyser les tendances du marché et à développer ses propres études.

Cela constitue selon lui une valeur ajoutée, que le cabinet apporte à ses clients.

Me Sébastien Vilder, Barreau 1998 également associé chez Blakes, ajoute aux raisons de ce succès la très grande croissance de son cabinet au cours des dernières années et le fait d’avoir une clientèle « forte et diversifiée ».

« On consacre énormément de temps à essayer d’être plus efficace à l’aide des technologies, notamment au niveau de l’intelligence artificielle, pour accompagner nos clients à avoir des services de qualité dans les transactions d’envergure », souligne aussi Me Bourassa, Barreau 1997.

Parmi les défis à venir du cabinet, celui du recrutement de nouveaux talents.

Me Guillaume Lavoie. Source: Torys
Me Guillaume Lavoie. Source: Torys
Présence internationale

Pour Me Guillaume Lavoie, associé chez Torys, une force évidente de son cabinet est sa présence au bureau de New York pour les transactions transfrontalières, et ainsi le fait d’être « multidisciplinaire » avec des avocats américains qui ont « une pratique locale ».

« Même dans nos autres bureaux, on a des avocats avec le double Barreau », remarque-t-il.

Ce Barreau 2007 estime que 2022 a été une meilleure année que les précédentes, très occupée.

Torys a entre autres travaillé sur plusieurs transactions impliquant des parties situées au Japon, avec des actifs au Québec. Et a été inscrit pour la première fois dans le classement du Japon de Mergermarket selon la valeur des opérations.

Me Philippe St-Louis. Source: Miller Thomson
Me Philippe St-Louis. Source: Miller Thomson
Progression

Chez Miller Thomson, l’associé dans le groupe de droit des affaires et spécialiste en fusions-acquisitions Me Philippe St-Louis, estime que les bons résultats de 2022 sont le fruit d’une progression. « Ça fait très longtemps qu’on bâtit l’équipe pour faire des transactions d’envergure », croit-il.

La profondeur et « l’aspect pratique orienté sur les enjeux d’affaires » du cabinet fait sa force, selon ce Barreau 2012. Environ 117 avocats sont dédiés aux fusions-acquisitions chez Miller Thomson à l’échelle nationale.

« Nous sommes vraiment des deux côtés de la transaction, de l’investisseur, de l’acheteur, et de la cible, du vendeur, et nous appliquons nos mêmes grands principes dans les deux cas ».

Me Naïm Antaki. Source: Gowling WLG
Me Naïm Antaki. Source: Gowling WLG
Dévouement

Du côté de Gowling WLG, Me Naïm Antaki, associé et co-chef du groupe Technologie de Montréal, fait remarquer que dans les classements sur les fusions-acquisitions publiés par Refinitiv au cours de chacune des cinq dernières années consécutives, le cabinet a toujours été bien placé.

« Gowling WLG s'est régulièrement classé parmi les trois premiers cabinets d'avocats fournissant des conseils pour des transactions sur le marché intermédiaire canadien en volume de transactions et parmi les vingt premiers cabinets d'avocats œuvrant en matière de fusions-acquisitions dans le marché intermédiaire à l’échelle mondiale ».

Le Barreau 2003 assure que ce succès est dû à « des conseils avisés » et à « un service client de qualité supérieure », soulignant un « dévouement reconnu ».

Défis à venir

Me Antaki remarque que les volumes de fusions et acquisitions ont diminué en 2022 par rapport à 2021 pour plusieurs raisons.

Il cite « notamment les problèmes de chaîne d'approvisionnement, l'inflation et les taux d'intérêt plus élevés, ainsi que la volatilité causée par les tensions géopolitiques mondiales ».

« Nous prévoyons que certains secteurs tels que l'immobilier et la technologie resteront fragiles, mais d'autres secteurs tels que les mines et l'énergie devraient demeurer actifs », précise-t-il.

Il estime que « la volatilité et l'incertitude actuelles » freinent les opérations de fusions et acquisitions. Une fois que la situation macroéconomique se sera stabilisée, il est raisonnable d’envisager, selon Me Antaki, que le niveau d’activité remontera assez vite.

Me Bédard, de Fasken, note pour sa part que ses clients indiquent une situation plus stable en 2023.

« Les hausses de taux vont être moins marquées s’il y en a d’autres, et ils sont capables de faire des plans d’affaires en anticipant les coûts du crédit, ce qui était plus difficile l’année dernière et celle d’avant car le coût du crédit changeait chaque mois ».

Fasken a d’ailleurs misé sur l’anticipation en développant le guide « Préparer votre entreprise aux fluctuations économiques », qui explique certains éléments clés à prendre en considération notamment lors des planifications stratégiques de ses clients.

Aujourd’hui, même si le coût du crédit est plus élevé, il est au moins stable, fait remarquer l’associé. Sur le plan géopolitique, bien que la guerre en Ukraine demeure imprévisible, les prix de l’énergie et les taux d’intérêts se sont restabilisés, souligne-t-il aussi.

Il constate déjà une activité de fusions-acquisitions très importante pour janvier 2023.

« Notre ''pipeline'' a l’air encore occupé, mais nos clients nous disent s’attendre à un ralentissement à cause de la hausse des taux d’intérêt, à moins d’acquisitions », indique Me Lavoie de chez Torys. Il ne constate pourtant pas à ce stade de ralentissement.

Pour sa part, Me Levy d’Osler estime que si 2022 a été une année plus calme que 2021, et plus difficile que les années précédentes, les marchés seront plus stables en 2023. Il anticipe une meilleure année à venir.


Des transactions marquantes en 2022

Qui ont-ils conseillé ?

Gowling WLG

Bonduelle Americas Long Life dans la vente de 65 % de ses actifs en Amérique du Nord au Fonds de solidarité FTQ et la Caisse de dépôt et placement du Québec (bureau de Montréal).

À noter que Blake, Cassels & Graydon et K&L Gates ont agi à titre de conseillers juridiques de la CDPQ et du Fonds de solidarité FTQ dans le cadre de l'acquisition par les sociétés de 65 % des activités nord-américaines de Bonduelle.

Novacap dans le cadre de son acquisition en partenariat avec FortNine de Defender Industries Inc.

Au niveau national, le cabinet a conseillé Sandstorm pour l’acquisition de neuf « royalties » et d'un « ''stream'' » de BaseCore Metals LP. Sandstorm a effectué un paiement de 425 millions de dollars US en espèces, partiellement financé par une facilité de crédit majorée, et a émis environ 13,5 millions d'actions ordinaires de la société à BaseCore.

Fasken

Ces transactions concernent l’équipe de Québec. Tout d’abord, Intertape Polymer Group Inc. dans le cadre de sa vente à Clearlake Capital Group, pour un montant de 2,6 milliards de dollars américains (soit 3,3 milliards de dollars canadiens).

Le comité indépendant du conseil des fiduciaires de Noranda Operating Trust dans le cadre de la privatisation proposée du Fonds de revenu Noranda par Glencore Canada Corporation, une filiale de Glencore International AG.

MTY dans le cadre de son acquisition de BBQ Holdings et Wetzel’s Pretzels.

Versant Soleil Development Limited Partnership, une société affiliée de Brivia, dans la conclusion de divers accords d’exploitation, notamment avec Station Mont-Tremblant.

Torys

Olympus et EVIDENT, qui ont annoncé avoir conclu une entente définitive avec Bain Capital Private Equity en vertu de laquelle Olympus va transférer toutes les actions d’EVIDENT à Bain Capital pour un montant de 3,1 milliards de dollars américains.

ITOCHU, qui a annoncé l’acquisition de 49, 6 % d’une société de gestion de placements détenant une participation de 15 % dans ArcelorMittal Exploitation minière Canada et ArcelorMittal Infrastructure Canada.

Miller Thomson

Fengate Private Equity dans le cadre de son investissement dans Inflector.

K&Y Diamond dans le cadre de la transaction réalisée avec MACH Capital.

Osler, Hoskin & Harcourt

À titre d’exemple d’investissement dans des sociétés émergentes à forte croissance en technologie, Me Levy d’Osler évoque la société Haivision.

Une société « qui a commencé avec Osler », est devenue cotée à la Bourse de Toronto, et qui a fait en 2022 deux acquisitions, une en France et une autre aux États-Unis.

Parmi ses transactions marquantes, Me Levy cite par ailleurs le mandat reçu de Québecor dans son acquisition de Freedom Mobile de Rogers.

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