Les limites de la propriété intellectuelle

En commercialisant à grande échelle ses ordinateurs avec souris et interface graphique, Steve Jobs n’a-t-il pas changé la relation de l’humanité avec l’informatique?

La propriété intellectuelle protège le nouveau, l’original, l’ingénieux, mais dans une approche du savoir individuel et pratique. À ce titre, le haut de la pyramide est favorisé.

« C’est une position de principe de la loi. Pourtant, plusieurs penseurs conçoivent le savoir comme un tout et remettent en question le mythe de l’inventeur isolé. Un apport scientifique provient souvent du savoir que constitue le patrimoine commun de l’humanité. Cette conception est peu reflétée dans le système actuel de propriété intellectuelle », explique la professeure de la Section de droit civil Mistrale Goudreau.

« Certains auteurs disent que la propriété intellectuelle est un outil capitaliste, car à leur avis, les brevets donnent beaucoup d’avantages injustifiés. Par exemple, dans le domaine pharmaceutique, certains soutiennent que les recettes des brevets qui doivent en principe servir à innover et à faire de la recherche partent souvent en frais de marketing et en dividendes aux actionnaires », remarque l’experte.

Le club étudiant de propriété intellectuelle (CPIUO) est affilié à l’Association étudiante de droit civil (AEEDCO) et l’intérêt du club semble axé sur ce que plusieurs considèrent comme la voie de l’avenir dans le domaine juridique. La professeure Goudreau était la conférencière lors de leur première rencontre de l’année.

Puisque certaines inventions métamorphosent notre vie, Mme Goudreau se questionne sur les limites acceptables des transformations environnementales et sociales.

« Les normes actuelles consacrent la vision mythique de l’innovation salvatrice et il faut peut-être examiner plus attentivement les effets réels des nouveautés technologiques », réfléchit la professeure Goudreau.

Elle invite à remettre en perspective ce qu’elle considère être une vision colorée de l’innovation.

« Quand on évoque la société du savoir, on songe aux progrès tangibles, aux innovations dans le concret, mais il ne faut pas négliger le savoir plus informel, plus abstrait, les courants plus fondamentaux qui transforment notre société. Au lieu de parler uniquement de l’étude du droit actuel, j’ai préféré éveiller les étudiant(e)s aux conséquences et aux applications plus larges de la propriété intellectuelle », affirme Mme Goudreau.

« Il faut s’intéresser aux questions soulevées par le système actuel et surtout à celles qui transcendent le cadre limité des lois actuelles », conclut la professeure Goudreau.

Note: ce texte a été publié sur le site de la Faculté de droit de l’Université d'Ottawa; il est reproduit ici avec l'autorisation de la Faculté.