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Une justice rapide… sans aller en cour!

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Sophie Ginoux

2025-04-10 15:00:56

Un organisme regroupant plusieurs avocats révolutionne le règlement des conflits en copropriété avec des délais éclair. Droit-inc a jasé avec sa présidente…

Ah, la merveilleuse acrimonie qui règne dans les copropriétés. Mᵉ Stefania Chianetta, une ancienne attachée politique devenue avocate, médiatrice et arbitre, en a vu de toutes les couleurs depuis qu’elle s’est spécialisée dans cette pratique, en 2004.

Mᵉ Stefania Chianetta

« J’ai toujours été frappée par l’atmosphère à couper au couteau qui pouvait régner entre les copropriétaires et les syndicats de copropriété, dit-elle. Mais ça se comprend, quand on sait que le processus judiciaire de leurs différents peut durer jusqu’à cinq ans. Imaginez-vous croiser et prendre l’ascenseur chaque jour avec votre meilleur ennemi ! »

Me Chianetta s’est longtemps demandé comment améliorer ces relations conflictuelles. En 2008, on ne parlait pas encore beaucoup de médiation, même si une clause compromissoire dans les actes notariaux des copropriétés l’exigeait normalement avant de se rendre en cour.

« Mais en 2016, tout a changé avec l’inscription, dans le code de procédure civile du Québec, du mode privé de prévention et de règlement des différends (PRD) », raconte l’avocate, qui a ensuite été à la tête d’une table de concertation qui a mené à la création d’une nouvelle ressource qui allait changer la donne en matière de conflits en copropriété.

La solution CMAC

Le Centre de médiation et d'arbitrage en copropriété (CMAC) a été fondé en novembre 2022 par un petit groupe d’avocats expérimentés, accrédités à titre de médiateurs et d'arbitres, en provenance de plusieurs cabinets. Me Chianetta en est la présidente, tout en dirigeant son propre cabinet éponyme.

Comme elle l’indique, « Nous avons uni nos forces, nos idées et nos deniers pour trouver une façon efficace, abordable et rapide de régler les conflits et les litiges propres à la copropriété divise et indivise. Nous voulions contribuer à la solution, avec des initiatives pratiques pour ne pas encombrer la cour, d’une part, et pour aider les copropriétaires (et leurs avocats), d’autre part. »

Cet objectif est très louable, quand on sait que le Québec compte quelque 385 000 unités de copropriétés réparties dans plus de 40 000 immeubles – et donc, tout autant de litiges possibles, mais le CMAC a-t-il autant d’autorité qu’un tribunal ? Eh bien, oui, étonnamment.

« Les seuls recours officiels que nous n’avons officiellement pas le droit de faire sont les injonctions et les petites créances. Mais nous nous sommes aperçus que les ordonnances d’exécution forcée rendues par les arbitres étaient maintenues par la Cour supérieure, ce qui montre notre crédibilité », argue Me Chianetta.

Les recours qu’on peut confier aux médiateurs et aux arbitres, selon que l’on souhaite une entente à l’amiable ou une décision finale, sont effectivement nombreux : ordonnance d’accès à une propriété, infraction à une déclaration de copropriété, litige économique, appel à la modification ou à l’annulation d’une décision d’assemblée, différents entre les copropriétaires ou au sein du CA, etc.

Quant aux délais de traitement, ils n’ont rien à voir avec ceux que l’on connaît en justice traditionnelle. Une ordonnance d’accès à la propriété prend moins de 10 jours, par exemple. Le CMAC dispose également d’un processus d’arbitrage accéléré, avec des décisions des arbitres sur vu du dossier, si bien qu’on ne se rend pas jusqu’à l’audition.

Une vraie petite révolution, n’est-ce pas ? Le Barreau du Québec lui-même s’en est aperçu en décernant au CMAC le prestigieux prix du Mérite Innovations – Accès à la justice pour l’année 2023, soit moins d’un an après le lancement du projet.

Un centre d’informations et de formations


Membres fondateurs du CMAC

En plus de régler efficacement des conflits de copropriétés divises et indivises, le CMAC aspire depuis sa création à devenir un moteur d’informations et de formations.

Dans le premier cas, les avocats membres du centre ont commencé à réaliser des capsules sur les réseaux sociaux à l’intention du grand public. « La copropriété, c’est un microcosme, avance Me Chianetta. Il faut être capable de vivre en bons termes avec d’autres personnes, et de respecter des décisions avec lesquelles on n’est pas automatiquement d’accord. Nous croyons donc que le rôle de l’éducation est fondamental pour expliquer les obligations des uns et des autres, que ce soit à travers des capsules, ou bien des visites informatives réalisées dans les copropriétés. »

Pour plus de profondeur encore, le CMAC est en train de monter pour l’automne 2025, en collaboration avec le Barreau du Québec, une gamme de 14 formations ciblées destinées aux avocats, notaires, arpenteurs-géomètres, gestionnaires et administrateurs de copropriétés.

D’une durée d’1 à 12 heures, ces formations données par les experts du centre porteront sur la médiation et l’arbitrage propres à la copropriété, ainsi que sur certains sujets nichés, « comme quoi faire quand une partie refuse de verser des fonds, ou bien l’homologation des ordonnances d’arbitrage en cour », explique l’avocate.

Mais ce n’est pas tout ! Le 14 février dernier, le ministère de la Justice du Québec a reconnu le CMAC en tant qu’organisme accréditeur en médiation civile, ce qui fait de lui le troisième du genre seulement après le Barreau et l’IMAQ.

« Nous avons travaillé deux ans sur ce volet et sommes très fiers de cette accréditation », souligne Me Chianetta. Pour information, les avocats ou notaires intéressés à être accrédités médiateurs par le CMAC doivent posséder plus de 10 ans de pratique active, dont 50% de dossiers en droit de la copropriété, et avoir suivi une formation de 60 heures en médiation civile et commerciale.

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