Les drones volent-ils au-dessus des lois?
Daphnée Hacker-b.
2015-04-20 15:00:00
Les chiffres de Transports Canada, qui délivre les permis d’opérations commerciales pour les UAV, témoignent de la croissance rapide de cette nouvelle industrie : en 2012, le gouvernement fédéral a délivré 353 certificats, en 2013 le chiffre a grimpé à 949… pour ensuite explosé en 2014, avec 1672 permis délivrés !
Règlements multiples
Surveillance des chemins de fer, des pipelines ou des champs agricoles, photos aériennes de maisons et d’immeubles à vendre, opérations de sauvetage… Les drones sont déjà utilisés par de nombreuses entreprises canadiennes. N’empêche, plusieurs ignorent encore les règles de base à respecter : pour tous types de drones, il est interdit de le faire voler à proximité d’un aéroport, de routes, d’une foule et d’une zone habitée.
Pour les UAV utilisés à des fins commerciales, un certificat est requis, auquel sont ajoutés des paramètres de vol, qui impliquent à coup sûr de ne pas dépasser 90 mètres au-dessus du sol et de maintenir le drone en tout temps dans son champ de vision. « Ces critères limitent plusieurs occasions d’affaires », remarque Me Sheehan.
Il estime que les lois vont bientôt changer afin de permettre de nouvelles utilisations, comme la livraison de colis. Le géant du commerce en ligne Amazon exerce d’ailleurs beaucoup de pression sur les dirigeants américains et canadiens à cet effet. Sans céder complètement, Transports Canada a accepté en décembre dernier que la multinationale mène des tests de livraison par drone en Colombie-Britannique.
Lorsque les règles du jeu aérien changeront, Amazon ne sera pas la seule à vouloir utiliser les drones pour le transport, estime le juriste. « L’espace aérien est un lieu complexe, les législateurs devront trouver un bon compromis afin d’assurer à la fois la sécurité des corridors aériens et la viabilité de l’industrie du transport aérien sans pilote », ajoute Me Sheehan.
Les drones peuvent être téléguidés de façon extrêmement précise et silencieuse, en plus de récolter beaucoup de données malgré leur petite taille, une situation qui soulève des inquiétudes quant à la protection de la vie privée, ajoute Me Jean-François De Rico, associé au cabinet Langlois Kronström Desjardins. Ce dernier, tout comme Me Sheehan, remarque que de plus en plus de clients l’approchent au sujet des drones, pour s’assurer de les utiliser de façon légale.
Des litiges à venir
Les exemples de violations possibles font régulièrement les manchettes. En janvier, un drone a survolé l’Élysée, en France, suscitant de nombreuses questions. Presque au même moment, en Belgique, un couple a remarqué qu’un drone les filmait à travers la fenêtre de leur chambre, pour ensuite disparaître mystérieusement… « Ces évènements permettent de constater que la notion d’infraction à la propriété, dans un contexte aérien, est encore floue pour beaucoup de gens », souligne Me De Rico.
À sa connaissance, aucun litige impliquant un drone ne s’est rendu devant les tribunaux, mais « ce ne serait qu’une question de temps ». Les avocats de divers secteurs seront éventuellement concernés, poursuit Me De Rico, tant en responsabilité civile, qu’en droit des assurances, du travail et des technologies.
Les juristes ont tout intérêt à suivre de près l’évolution du dossier des drones, dont les règles d’utilisation sont loin d’être fixées. Selon l’avocat, les lois actuelles évolueront au gré des évènements qui susciteront de nouvelles inquiétudes. « Le droit est souvent à la remorque des technologies qui se développent extrêmement vite, remarque-t-il. Il faudra donc rester à l’affût de ce qui se passe au-dessus de nos têtes ! »