L’avocate qui défend les professionnels

Sonia Semere
2025-04-04 15:00:03
Une avocate joue un rôle crucial pour défendre l’intégrité des professionnels. On a discuté avec elle.
Marika
Douville, avocate au sein du cabinet RSS, représente des Fonds d’assurance et
leurs assurés devant les tribunaux du Québec. Elle fait partie d'une équipe
croissante d'avocats spécialisés en responsabilité professionnelle chez RSS.

Grâce à son expertise, elle joue un rôle crucial pour défendre, notamment, l'intégrité des professionnels et veiller à leur protection face aux réclamations.
Comment l’avocate défend-elle les intérêts des professionnels du droit lorsqu’ils sont accusés d’erreurs professionnelles? Quels défis spécifiques se posent? Rencontre.
Concrètement, quel est votre rôle en tant qu’avocate agissant notamment pour des Fonds d’assurance responsabilité professionnelle?
On reçoit des mandats de défense de professionnels, qui sont visés par des réclamations pour des fautes professionnelles qu'ils ont commises dans le cadre de leur mandat.
Parfois, on va être impliqués dans les enquêtes avant que les dossiers soient judiciarisés pour essayer, justement, de minimiser les enjeux de responsabilité.
On a aussi un volet prévention, c’est essentiellement de la formation et de l'accompagnement aux assurés.
Justement, quel type d'erreurs retrouvez-vous dans vos dossiers?
Ce qui est très intéressant dans cette pratique, c’est toute la variété de dossiers. On navigue dans tous les champs de pratique.
En ce moment, on a beaucoup de dossiers de fraude immobilière dans lesquels des professionnels sont poursuivis pour des défauts de vérification d'identité.
En général, c'est souvent au niveau de leurs devoirs de conseil que les professionnels sont poursuivis.
Quand les gens ont des pertes, ils essaient de se tourner vers une indemnisation possible. Les professionnels des différentes industries sont souvent visés par ces poursuites parce que les gens savent qu'il y a des fonds d'assurance derrière qui ont des moyens financiers.
La beauté de notre pratique, c'est aussi de contribuer à l'intégrité de la profession dans le sens où il y a des accusations qui sont mal fondées, souvent parce que tous les autres défendeurs sont insolvables ou ont fait faillite.
Dans ce type de dossiers, l'idée est de montrer que les professionnels ont pratiqué de manière diligente.
Vous évoquiez un volet prévention auprès des professionnels. Comment ça se concrétise?
Pour ma part, je donne des formations quasiment une fois par mois à différents groupes. L’objectif c’est vraiment de les éduquer sur les enjeux et les risques potentiels liés à la pratique.
Parfois, on a des dossiers où on a plus de mal à défendre nos clients parce qu'il y a eu des erreurs. On va alors discuter des stratégies diverses de règlement ou comment faire en sorte qu'elles ne se reproduisent pas.
Certains professionnels vont aussi recevoir un subpoena pour témoigner ou agir dans une enquête. Qu'est-ce qu'ils peuvent dire? Qu'est-ce qu'ils ne peuvent pas dire? On va être là pour les assister et répondre à leurs questions.
C'est un domaine qui est assez méconnu… Qu’est-ce qui vous anime tant dans votre pratique?
C'est très stimulant parce que ce sont des personnes qui sont déjà très éduquées. Par conséquent, on doit nécessairement avoir des compétences approfondies pour être capable de comprendre leurs pratiques et les défendre.
Ce qui m'anime aussi, c'est toute la question analytique. Ce sont des dossiers complexes et variés. On est face à des professionnels qui ont des hautes attentes et qui connaissent leurs dossiers. On doit toujours trouver des solutions stratégiques.
Représenter des professionnels, c’est un exercice challengeant. Quels conseils donneriez-vous pour naviguer habillement dans ce domaine?
Ça prend d'abord de l'écoute et le souci du détail. Parfois, c'est une seule phrase dans un dossier de 600 pages qui va faire la différence et qui va nous permettre de gagner une cause.
Je conseillerais vraiment aux avocats juniors de prendre le temps et analyser les données. Il faut aussi élaborer des stratégies propres à chaque dossier. On ne peut pas appliquer la même formule à chaque fois.
Et puis, il faut souligner que c’est un domaine qui est stressant, la pression est forte.
Il faut mettre en confiance et inspirer confiance… C'est dur pour certains professionnels d'être assis lors d’un procès et de laisser quelqu’un d’autre les défendre. Certains aimeraient plaider leur cause mais il faut garder une vision objective. C'est ça aussi qui est compliqué, il faut mettre nos limites parce que c'est nous qui sommes là pour les guider.