Jouer franc-jeu
Emeline Magnier
2015-05-21 15:00:00
Si elle avoue adorer la rédaction et la révision pointilleuse des nombreux documents contractuels, la dimension humaine très présente lors de la conclusion d’une transaction, est aussi l'un des facteurs qui justifie son intérêt pour la matière.
Elle nous en dit un peu plus sur son parcours, sa pratique et ses intérêts…
Droit-inc : Vous avez toujours pratiqué en droit des affaires. Pourquoi avoir choisi de vous orienter vers ce domaine de droit dès le début de votre carrière ?
Me Isabelle Toupin : Quand je suis entrée en droit à la faculté, c'était pour défendre les autres. À l'époque, je ne savais pas encore vers quelle branche je me dirigerais et j'ai eu la chance de faire un stage dans un petit bureau de Granby en droit des affaires avec un mentor exceptionnel. J'ai participé à la constitution d'entreprises, aux remaniements de capital action. J'ai adoré ça ! J'avais l'impression de construire quelque chose.
Après avoir passé le Barreau, je me suis inscrite au programme de maîtrise en droit de l'entreprise à l'Université Laval pour avoir plus de chances de me positionner dans ce domaine. Au baccalauréat, les cours restent « assez simples » et théoriques, un deuxième cycle est très utile en droit des affaires. Les chargés de cours étaient des avocats ce qui a apporté une dimension plus pratique à l'enseignement. Une fois diplômée, j'ai intégré le cabinet Cain Lamarre Casgrain Wells et j'ai débuté ma pratique en droit des affaires qui, au fil des dossiers, s'est affinée en droit transactionnel.
Après deux ans en pratique privée, vous avez fait le saut en entreprise chez GE Capital Solutions. Qu'est ce qui a motivé ce choix ?
Je voulais confirmer mon choix d'exercer en pratique privée. C'était la bonne décision et je n'ai aucun regret. Je sais désormais ce qui se passe en entreprise; j'ai pu travailler avec des gestionnaires qui ne sont pas avocats, et ça m'aide à comprendre la réalité des clients. Je conseille d'ailleurs aux futurs juristes qui envisagent de pratiquer en droit des affaires de travailler au sein d'un service juridique en début de carrière pour être capable de bien accompagner le client par la suite.
Comme j'aime la diversité de la pratique et que le transactionnel me manquait, j'ai décidé de repartir en pratique privée et en 2009, je me suis jointe à LKD. J'y ai trouvé une équipe très unie au sein de laquelle on peut compter sur des collègues très disponibles et spécialisés dans d'autres domaines. La structure est souple et on ne nous impose pas de façon de faire tout en gardant des standards de qualité élevés. Aujourd'hui, je ne changerais rien à mon parcours, j'ai le sentiment d'être là où je dois être et je vois le futur avec beaucoup d'espoir.
À quoi ressemble le quotidien d'un avocat qui exerce en droit transactionnel ?
J'accompagne mes clients dans leur croissance et leurs projets, de la PME à la grande entreprise, dans les domaines alimentaires, technologiques, ou du divertissement. Cela couvre toutes sortes de transactions; acquisition d'actions, achat d'entreprises, restructuration de compagnies.
Notre rôle varie en fonction de la partie qu'on assiste. Si on représente l'acheteur, il y a la lettre d'intention, l'offre d'achat, la convention d'achat, la vérification diligente. Du côté du vendeur, c'est surtout de la négociation et de la vérification de contrats notamment sur les modalités de paiement et les garanties. Il y a aussi un grand volet conseil en amont de la transaction dans le cadre duquel je travaille en équipe avec un comptable et un fiscaliste.
Selon vous, quelles sont les qualités d'un bon négociateur ?
Il faut savoir être à l'écoute du client, comprendre ce qu'il veut. Je n'ai ni une approche agressive ni défensive. J'ai l'intérêt du client à cœur mais aussi celui de l'autre partie. Ce n'est pas en flouant l'autre qu'on aura une belle transaction. On veut se rendre du point A au point B et trouver un juste milieu pour que tout le monde soit gagnant. Je préfère la transparence et je joue franc-jeu et jusque-là, ça m'a plutôt bien servi.
Quels sont les défis qu'on peut rencontrer quand on travaille sur une transaction ?
Les transactions, ce sont des chiffres, du droit, mais aussi des sentiments. Il y a une dimension humaine et des émotions à gérer. Quand il s'agit de vendre l'entreprise familiale ou de se lancer en affaires en achetant une société, c'est souvent l'opération d'une vie. La forme compte beaucoup, il faut respecter le rythme de chacun et s'adapter. Quand on a compris les craintes des clients, on trouve des solutions.