Affaires juridiques : le risque croissant de la durabilité
Jean-Francois Parent
2022-04-13 14:15:00
C’est ainsi que partout dans le monde, les départements des affaires juridiques des entreprises sont confrontés à une augmentation des risques liés à la durabilité, alors que les avocats corporatifs sont d’avis que leurs patrons n’en comprennent pas pleinement les implications.
C’est ce que révèle l’étude ''2022 General Counsel Sustainability Study'', réalisée par EY Law et la faculté de droit de l’Université Harvard. L’étude, tout juste sortie des presses, relaie les constats posés par 1 000 directeurs et chefs des services juridiques d’entreprises situées dans 20 pays.
Alors que le besoin d’agir sur les fronts environnemental, social et de la gouvernance se fait de plus en plus pressant de la part tant des actionnaires que des clients et du public, seulement 15 % des directeurs juridiques interrogés par EY Law estiment que leurs patrons ont pleinement conscience du risque que posent les questions environnementales sur leur entreprise.
Sur les questions sociales et de gouvernance, la proportion est de 39 %.
Autre enjeu démontré par le sondage : les services juridiques des entreprises se concentrent sur les questions de conformité et de litige liées au développement durable, alors qu’ils sont d’avis que les risques les plus importants concernent la réputation et la marque.
Cette approche pose d’autant plus problème que le développement durable et l’intégration de critères ESG dans les pratiques et les procédures d’une entreprise ne sont pas qu’une mode et un outil marketing. Les risques réputationnels sont critiques, à tous les égards, alors que les clients et les employés exigent des organisations qu'elles jouent un rôle actif dans la résolution des problèmes environnementaux et sociaux.
En conséquence, les services juridiques d’entreprises sont appelés à s’investir davantage dans ces questions, et sont appelés à élargir leurs champs d’action.
Et comme un problème n’arrive jamais seul, l'étude de EY Law révèle que 99 % des départements juridiques s'attendent à ce que leur charge de travail augmente d’au moins 10 % au cours des trois prochaines années.
Sans compter bien sûr que les répondants du sondage affirment, dans une proportion de plus de 90 %, qu’ils ne disposent pas du talent et des budgets nécessaires pour faire face à l'augmentation de la charge de travail.
Élargir le degré d’implication d’un service juridique n’est cependant pas chose facile : plus de 90% des départements juridiques disent être confrontés à des difficultés pour créer des politiques répondants aux préoccupations sociales et environnementales des parties prenantes lorsqu'il n'existe pas de réglementation spécifique.
Tout cela est compliqué davantage par les directives souvent ambiguës des régulateurs, la pression des parties prenantes et les objectifs concurrents au sein même de l'entreprise.
Il reste que certains signaux démontrent que les organisations prennent des mesures pour renforcer leur capacité à gérer les risques ESG, notamment au chapitre des collaborations inter-services. L'étude révèle ainsi que 61 % des départements juridiques prévoient accroître leur collaboration avec d'autres services, notamment les finances, les RH et les opérations, au cours des trois prochaines années.