Un enquêteur de choc
Diane Poupeau
2019-06-19 11:15:00
Entré en 1986 au service de police de Laval, il a fait son métier d'enquêteur jusqu'à sa retraite début 2015. Depuis, il met ses compétences au service de Sirco, une entreprise d’investigation indépendante et dont il est aujourd'hui Vice-président exécutif.
Au cours de sa carrière, Antony Donato a passé 23 ans aux enquêtes criminelles, toujours dans des escouades spécialisées. Il a notamment oeuvré à l'antigang, aux stupéfiants, aux homicides et au SWAT. Il a également été négociateur en prises d'otages.
« Le summum de ma carrière, raconte-t-il, c'est d'avoir été responsable d'une escouade régionale mixte, l'escouade Carcajou, qui s'est attaquée au phénomène des gangs de rue. »
Pendant 5 ans, le policier est prêté à la Sûreté du Québec pour gérer une équipe de douze enquêteurs venus de la GRC, de la Sûreté et de différents services de police. Ces enquêteurs sont la crème de la crème, « les meilleurs de chaque organisation ».
Un enquêteur passionné
L'homme est un touche à tout doublé d'un travailleur acharné et d'un policier passionné. Hors de question pour lui de raccrocher les gants une fois la retraite venue. Quand Claude Sarazin, président de Sirco, lui propose de rejoindre son entreprise, il accepte.
« Dans le privé, ma spécialité reste l'enquête criminelle mais j'apprends tous les jours en droit des assurances, en droit du travail, en droit civil… C'est un beau challenge », explique-t-il.
Si les règles de preuve sont différentes et qu'il travaille désormais pour des clients et non plus pour des victimes, les techniques d'enquêtes restent les mêmes.
Parmi elles, la filature et l'infiltration. « On croit souvent que les enquêtes privées c'est de cacher quelqu'un pour surveiller un homme qui trompe sa femme, mais on n'a plus fait un dossier comme ça depuis 15 ans ! » fait-il remarquer.
Ses clients sont souvent des employeurs confrontés à des problèmes tels que le vol, la fraude ou l'usage de stupéfiants dans leurs locaux. L'entreprise fait aussi affaire avec quelques uns des plus gros cabinets d'avocats du Québec.
Observer sans être vu
Enquêter dans le privé a quand même son lot de particularités. « Une filature, dans la police, c'est une équipe de cinq fileurs et un sergent. Dans le privé, pour limiter les coûts, ce sont des équipes de deux fileurs. C'est plus difficile, ils doivent être très alertes et créatifs », raconte Antony Donato.
Selon lui, « c'est un art de suivre ou observer sans être vu ». Et ce principe s'applique aussi bien à l'enquêteur qu'à son matériel. L'équipe doit déborder d'imagination pour se fondre dans le paysage : changements de voitures, manteaux réversibles, ils ne laissent rien au hasard.
Les qualités d'un bon fileur ? Le sens de l'observation, la connaissance de son environnement… et un excellent volant. Avec 60 000 km au compteur chaque année, les enquêteurs se doivent d'être prêts à réagir à toutes les situations.
Des mois d'infiltration
Sirco a aussi recours aux infiltrations, « une des techniques d'enquêtes les plus efficaces », estime Antony Donato.
Quand un employeur fait appel à ses services, l'entreprise peut lui proposer d'infiltrer un de ses enquêteurs au sein de son équipe. « Il faut adapter le profil de l'enquêteur ou l'embaucher dans une job qu'il est capable de faire. S'il faut passer le balais, il va passer le balais ».
Pour ce faire, Antony Donato peut compter sur plus d'une centaine d'enquêteurs. Pour les profils particuliers, il peut faire appel à une banque d'agents d'infiltration qui travaillent à la pige.
Si elle est une technique efficace, l'infiltration n'en est pas moins un travail de longue haleine. « L'enquêteur doit être capable de gagner la confiance de l'entourage puis au bout de deux ou trois semaines, il fait progresser son enquête. Un projet d'infiltration dure entre deux et quatre mois », explique le Vice-président exécutif de Sirco.
Parfois, l'infiltration se révèle tellement efficace que l'agent infiltré obtient des preuves qu'il n'était pas venu chercher, pour des exactions dont l'employeur n'avait même pas connaissance. C'est à lui de décider s'il les soumet à la police ou s'il se contente de mesures disciplinaires, selon les faits.
Consultant pour la télé
En dehors de la filature et de l'infiltration, l'entreprise a recours à d'autres moyens d'enquêtes comme la surveillance électronique ou des puces de géolocalisation. Attention toutefois, ce type de surveillance est strictement circonscrite au domaine professionnel pour lequel aucun mandat n'est nécessaire.
Avec cette vie qui n'est pas sans rappeler certains personnages hollywoodiens, Antony Donato a logiquement été approché par des scénaristes.
Il est d'ailleurs intervenu comme consultant dans le cadre de la série ''Appelle moi si tu meurs'', de Pierre-Yves Bernard et Claude Legault, diffusée sur le Club illico de Vidéotron en début d'année.
Quant à une biographie, ça sera « peut-être pour plus tard »...