La Presse

Une star chez Osler

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Rene Lewandowski

2010-12-03 10:15:00

Une des meilleures plaideuses au pays déménage de bureau... Ça fait jaser chez les avocats!
À chacun ses champs d'intérêt. Lundi, les médias n'en avaient que pour WikiLeaks, la victoire des Alouettes à la Coupe Grey et les funérailles de Pat Burns. Pourtant, dans la petite communauté juridique montréalaise, ce ne sont pas ces manchettes qui ont retenu l'attention, mais le transfert d'une de leurs collègues d'un grand cabinet à un bureau concurrent. Toute la journée, les avocats des autres bureaux ont en effet discuté de Suzanne Côté, superplaideuse de Stikeman Elliott, et de son départ pour Osler Hoskin&Harcourt.

«Wow!» s'est exclamé le patron du bureau de Montréal d'Ogilvy Renault, Jean Bertrand, en apprenant la nouvelle.

«C'est une grande nouvelle, je ne l'ai pas vue venir», a ajouté l'associé de McCarthy Tétrault, Simon Potter.

Il faut dire que, pour une nouvelle, c'en est toute une. Des mouvements latéraux entre grands cabinets, il y en a toutes les semaines, tellement la chasse au talent est féroce. Mais de cette ampleur? C'est très rare. Si bien que certains parlent déjà du meilleur coup de l'année.

Il est vrai qu'Osler s'adjoint les services d'une supervedette. En 2003, le magazine Lexpert l'a reconnue comme l'une des 25 meilleures avocates au Canada, et elle est devenue, en 2005 membre de l'American College of Trial Lawyers, distinction accordée aux meilleurs plaideurs en Amérique du Nord. Il y a deux ans, elle a reçu le titre de Plaideur de l'année, décerné par le magazine Le Monde juridique.

Chez Stikeman, Suzanne Côté, 51 ans, dirigeait depuis neuf ans le département de litige. Plusieurs grands dossiers étaient sous sa direction. Il y a quelques années, elle a représenté l'ex-président du conseil de VIA Rail, feu Jean Pelletier, dans un litige l'opposant au gouvernement fédéral pour son congédiement à la suite de ses déclarations à l'égard de Myriam Bédard. Elle a aussi travaillé comme avocate indépendante sur l'enquête de la Cour d'appel du Québec sur la juge Andrée Ruffo, qui a mené à sa démission.

Ceux qui ont suivi la commission Bastarache ont pu récemment la voir à la télé, alors qu'elle représentait le gouvernement du Québec. Ce n'était pas ses premières apparitions télévisées: les amateurs de jeux télévisés ont pu admirer son talent à l'émission La joute, sur les ondes de Télé-Québec. Elle a d'ailleurs été la grande gagnante de ce jeu-débat à l'hiver 2009.

Pourquoi partir?

Mais pourquoi a-t-elle quitté Stikeman? Dès l'annonce, lundi midi, les spéculations ont commencé à circuler. Certains ont avancé la commission Bastarache justement. Vrai que l'avocate n'a pas été épargnée dans les médias. On lui a reproché son style hargneux et agressif au cours de son interrogatoire de Marc Bellemare. Certains éditorialistes, dans Le Devoir notamment, ont même mis en doute son indépendance, sa «confusion des genres affichée et assumée par l'avocate du gouvernement, Me Suzanne Côté, donatrice pendant des années au PLQ». Est-ce que cela a déplu à ses patrons? Peut-être, mais au point de provoquer son départ? Douteux.

Un défi

Peut-être qu'elle a tout simplement eu envie de relever un nouveau défi. Chez Stikeman, elle dirigeait un groupe de 40 avocats, une équipe mature qui compte plusieurs vedettes, dont Louis P. Bélanger, avocat qui a représenté récemment le Groupe Polygone en Cour suprême pour forcer - en vain - Daniel Leblanc, journaliste du Globe and Mail, à dévoiler l'identité de sa source dans le scandale des commandites. Or, comme le mentionne William Brock, de Davies, «c'est très rare que deux étoiles puissent travailler ensemble».

Chez Stikeman, on n'a pas attendu bien longtemps pour la remplacer. Dès l'annonce officielle de son départ, on a nommé son successeur, Me Jean Fontaine, 44 ans. Il demeure aussi chef du département de faillite et de restructuration.

Chez Osler, Me Côté aura aussi l'occasion de travailler avec de très bons plaideurs, tels que Silvana Conte, Sylvain Lussier et George Hendy, qu'elle remplace comme chef du groupe. Mais, avec seulement 14 avocats, l'équipe est encore à construire et c'est sûrement le genre de défi qui lui a donné envie de traverser la rue. D'autant plus que tous les gros dossiers seront presque automatiquement dirigés vers elle, alors qu'elle devait partager la tarte dans son ancien cabinet.

Il n'empêche qu'elle devra faire preuve d'un certain tact avec ses nouveaux collègues. Car quelques-uns devaient probablement penser que le rôle de chef du litige leur revenait de droit, surtout ceux de la même génération qu'elle. Comment réagiront-ils? Voilà un défi qu'elle devra aussi relever dans les prochains mois...

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