« C’est la passion qui nous permet de nous démarquer »
Dominique Tardif
2018-05-09 14:15:00
Il n’y avait aucun avocat dans la famille et, jusqu’à maintenant, je suis d’ailleurs encore le seul, bien que pas pour encore bien longtemps comme ma fille étudie en droit!
Pour moi, le droit était une profession qui ouvrait la porte sur beaucoup de possibilités. J’aimais aussi l’histoire et la géopolitique, bien plus que les sciences d’ailleurs, et le droit s’est donc imposé à moi naturellement.
Le fait que je voyais que, dans les années 80, les leaders de bien des enjeux politiques et sociaux étaient des avocats, peu importe de quel « côté » ils étaient, a certainement joué un rôle dans ma décision. Je constatais combien les avocats contribuent de façon significative à la société.
J’aimais aussi le fait que le droit est une profession qui permet de développer sa capacité d’analyse, d’exprimer ses idées, de faire preuve d’imagination et de trouver des solutions. Je n’ai pas été déçu! Après 30 ans en pratique, j’ai encore beaucoup de plaisir à faire mon travail, n’ayant jamais pensé faire autre chose que le métier d’avocat.
2. Quel est le plus grand défi professionnel auquel vous avez fait face au cours de votre carrière?
Mon plus grand défi a sans doute été le mandat que j’ai mené comme négociateur en chef du gouvernement du Québec dans le cadre des négociations des conditions de travail de plus de 500 000 salariés en 2009-2010.
C’était un dossier important et très politique pour le Québec, comme il touchait les secteurs de l’éducation, de la santé et de la fonction publique. Le climat était par ailleurs difficile : grèves, loi spéciale, etc. Il fallait donc négocier avec les syndicats dans un contexte où les relations de travail étaient mauvaises et la confiance, très basse.
Je n’avais pour ma part jamais négocié pour le gouvernement avant cette date, comme je représentais plutôt des sociétés privées. Il y avait bien des observateurs dans ce dossier, dont certains étaient sceptiques quant à ma capacité à dénouer l’enjeu compte tenu du fait que j’avais un profil bien différent de celui de mes prédécesseurs. Lorsque j’ai été approché pour ce mandat, ma première réaction avait justement été de dire que je n’étais pas certain d’être le candidat taillé pour le poste, comme je ne venais pas du milieu. Mais on m’avait alors indiqué que, justement, on cherchait quelqu’un qui allait jeter un nouveau regard sur les choses et avoir une nouvelle approche.
Je suis heureux de dire que, malgré un coefficient de difficulté assez élevé, nous avons réussi à obtenir une entente dans les 90 jours suivant l’échéance des conventions collectives, et ce, sans qu’il n’y ait de grève!
3. Si vous aviez une baguette magique, que changeriez-vous à la pratique du droit?
Je ferais en sorte que nous ayons un système de justice efficace et modernisé, avec des plateformes technologiques qui élimineraient le papier, les délais et la lourdeur du système judiciaire.
Ça se produirait instantanément, si ce n’était que de moi et de ma baguette magique!
4. La perception du public envers la profession et les avocats en général est-elle plus positive, égale ou moins positive qu’elle ne l’était lors de vos débuts en pratique? Et pourquoi, à votre avis?
Je me plais à penser que la perception du public est aujourd’hui plus positive qu’il y a plusieurs années. Je crois que le Barreau fait, en ce sens, du bon travail pour faire connaître les avocats comme des professionnels tournés vers les solutions, plutôt que comme des agents de confrontation ou des « bagarreurs ». Les mesures telles que la médiation et la justice alternative aident aussi les choses.
5. Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un débutant sa carrière et voulant faire sa place et gravir les échelons dans l’univers de la pratique privée d’aujourd’hui?
Pour réussir, il est important de garder l’esprit ouvert et de se laisser la chance de découvrir tout ce que la profession peut nous offrir. En effet, on arrive souvent dans la profession avec des idées un peu préconçues de ce en quoi la pratique consiste. Or, la passion se développe souvent à travers un dossier, un mentor et des collègues.
Au sortir d’une mauvaise expérience, un avocat qui en est encore à ses débuts peut être tenté de « lancer la serviette ». Il faut savoir résister à cela, et se donner un peu de temps pour explorer.
Je pense également que l’engagement fait la différence dans la pratique. C’est un peu cela, à mon avis, le secret, puisque c’est la passion qui nous permet de nous démarquer. Et, parlant d’engagement, il ne s’agit pas que de l’être au bureau, mais aussi dans notre environnement, par exemple par le biais d’implication pro bono dans toutes sortes d’organismes. Il faut aussi savoir redonner.
- La dernier bon livre qu’il a lu : La trilogie « Les Piliers de la Terre » (auteur : Ken Follett)
- Le dernier bon film il a vu? Moineau rouge (réalisateur : Francis Lawrence)
- Sa chanson fétiche : September (groupe : Earth, Wind and Fire)
- Son expression préférée: One team, one vision.
- Il craque pour…le gâteau à la tire d’érable!! (du Bilboquet)
- Son restaurant préféré : Bouillon Bilk (boul. St-Laurent à Montréal)
- Le pays qu’il aimerait visiter : l’Australie
- Le personnage historique qu’il admire le plus et pourquoi :Winston Churchill, pour ses multiples talents de politicien, orateur hors pair, écrivain, etc., et pour le rôle décisif qu’il a joué.
- S’il n’était pas avocat, il serait…un franchisé de Canadian Tire!
Me Pilote a développé une expertise en tant que conseiller stratégique auprès d'entreprises privées et agit au même titre auprès d'organisations gouvernementales et paragouvernementales. Il agit régulièrement comme conférencier en matière de questions relatives à l’emploi et au gouvernement.Membre du Barreau du Québec depuis 1988 et de plusieurs associations professionnelles, Me Pilote a reçu plusieurs distinctions au fil des ans.