Action collective contre l’archidiocèse de Sherbrooke: plus de 70 présumées victimes
Radio -canada
2023-11-28 12:00:00
« Les parties ont convenu de commencer des négociations pour peut-être arriver à une entente à l'amiable. Nous, en tant qu’avocats, avons invité toutes les victimes qui se reconnaîtraient à s’inscrire à l’action collective. (...) Depuis cet appel, le nombre d’inscriptions a augmenté. Nous sommes maintenant rendus à 75 », souligne Me Justin Wee du cabinet Arsenault Dufresne Wee, qui représente les présumées victimes.
Plus d'une quarantaine de membres de l'archidiocèse sont désormais visés, dont l’abbé Bruno Dandenault et l’abbé Robert Jolicoeur, tous deux décédés. Ce dernier est celui qui est le plus visé par cette liste mise à jour des présumées victimes.
Les faits décrits seraient survenus entre 1935 et aujourd’hui.
« Le nombre d’agresseurs concernés est important. Quand on regarde certaines statistiques, qui montrent qu’un agresseur peut faire en moyenne cinq ou sept victimes, quand on est rendu à 40 noms d’agresseurs concernés par ces dénonciations, on peut penser que ça peut dépasser 200 (victimes) », fait remarquer Me Wee.
Il décrit l'action collective comme une « occasion historique » de dénoncer.
Les allégations n'ont pas encore subi le test des tribunaux et il est encore trop tôt pour parler d'indemnisation.
Me Wee invite d'autres présumées victimes à se manifester de façon gratuite et confidentielle en téléphonant au 514 527-8903 ou en envoyant un courriel à actioncollective@adwavocats.com.
L'Archidiocèse de Sherbrooke et le cabinet de Justin Wee négocient actuellement pour trouver une entente hors cours. S'ils n'y parviennent pas, la cause se retrouvera devant les tribunaux.
Une victime se confie
Au début des années 80, une victime, dont l'identité est protégée par la Cour, a été agressée sexuellement par l’Abbé Richard Bouffard. En 2006, son agresseur a plaidé coupable et a été condamné à 15 mois de prison ferme.
« Il n'y a personne qui devrait vivre ça dans sa vie, c'est impardonnable », confie-t-elle à Radio-Canada.
Cet homme n’a pas hésité à joindre sa voix à l’action collective intentée contre l’Archidiocèse de Sherbrooke.
« Moi, je me pensais guéri à un moment donné, j'ai dit : ah je suis capable d'en parler ouvertement! Dans mon cheminement personnel, je crois que je suis rendu là. Si c'est venu me chercher encore (c'est que) je ne suis pas allé au bout encore. Si ça prend ça pour aller au bout, regarde, je fonce. »
Passer à travers cette épreuve n'a pas été facile. Cet homme compte bien suivre les procédures judiciaires jusqu'au bout, même si la démarche ravive plusieurs souvenirs. « Des idées suicidaires, j'en ai eu, sauf que je suis passé à travers », affirme-t-il.
Cet estrien espère convaincre d'autres de suivre ses traces. « Aujourd'hui, je vais quand même bien. Je suis heureux, sauf quand on reparle de ça, ça vient jouer encore dans mon cerveau. C'est encore ancré quelque part en arrière. Ce n'est pas évident, mais si je suis capable, il y a plein d'autres personnes qui sont capables aussi », lance-t-il.
Une démarche qui peut être bénéfique d'après l'intervenante au Centre d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS) Agression Estrie, Kelly Laramée.
« Ce que ça va apporter aux victimes, c'est que ça va leur donner une voix et je pense que ce que ça apporte aussi, c'est de valider ce qui a été vécu et de dire bien, même si ça fait longtemps, même si l'agresseur est décédé, il y a des impacts, il y a des conséquences dans la vie et on doit en parler pour valider ces émotions-là et ces impacts-là que les gens vivent encore à ce jour », dit-elle.
L'archidiocèse de Sherbrooke a refusé la demande d’entrevue de Radio-Canada.