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Affaire Delisle : Lametti s’explique, mais le mystère s’épaissit

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Radio-canada Et Cbc

2024-03-19 11:15:31

David Lametti. Source: Radio-Canada / La Presse canadienne / Adrian Wyld

L'ancien ministre fédéral de la Justice affirme qu'il ne s'est pas seulement appuyé sur le rapport de la GRCC...

La controverse autour de l’ordonnance d’un nouveau procès pour l’ancien juge Jacques Delisle prend de l’ampleur. L’ex-ministre fédéral de la Justice affirme qu’il ne s’est pas seulement appuyé sur le rapport du Groupe de révision des condamnations criminelles du Canada (GRCC) pour prendre sa décision. Il dit avoir sollicité deux avis juridiques, refusant toutefois d’en dévoiler la provenance.

« Ce n'est pas uniquement le rapport du GRCC », a-t-il assuré en entrevue à l’émission Isabelle Richer lundi. « En tant que ministre, je suis encadré seulement par une quête de la justice. J'ai le pouvoir de demander d'autres évaluations, d'autres preuves. »

La semaine dernière, on apprenait que le rapport du GRCC, un comité de juristes du ministère fédéral de la Justice, avait conclu qu’il n’y avait pas eu d'erreur judiciaire dans le dossier de Jacques Delisle et que les nouvelles expertises présentées pour appuyer sa demande étaient basées sur des preuves qui existaient déjà au moment du procès.

Vers qui David Lametti s’est-il tourné pour obtenir ces avis juridiques? Que contiennent-ils? David Lametti prétend que, puisqu'il n'est plus ministre, il n'a plus accès aux contrats ni aux documents et qu'il est soumis aux règles de confidentialité entre un avocat et son client.

« Il y avait des questions soulevées dans les documents, et j'étais convaincu qu'il y avait quelque chose à refaire », se défend l'ancien membre du gouvernement Trudeau.

Un collaborateur indisponible

Morris J. Fish. Source: Radio-Canada / La Presse canadienne / Fred Chartrand
En temps normal, le ministre de la Justice du Canada peut se tourner vers le conseiller spécial en matière de condamnations injustifiées, l’honorable Morris J. Fish, un ancien juge de la Cour suprême. Son mandat est d’examiner les demandes à différentes étapes du processus de révision et de fournir des conseils juridiques indépendants.

Or, dans ce cas-ci, ce n’était pas possible. Morris Fish a siégé à la Cour d’appel à la même époque que Jacques Delisle.

Le ministre dit s'être tout de même tourné vers une personne « éminente », avec un statut similaire à celui du juge Fish. « Ç'a pris du temps, mais j'ai voulu être sûr et certain de mon affaire. Je connaissais le renom de la personne », dit David Lametti.

James Lockyer, avocat réputé qui a travaillé au dossier de l'ex-juge Delisle, n'a pas été consulté, précise David Lametti.

« Je peux vous assurer que, pour moi, le processus devrait être juste et égal. Pour moi, ce qui est important, c'est d'être neutre dans l'évaluation et c'est ce que j'ai fait. J'ai pris mes responsabilités au sérieux. » — David Lametti, ancien ministre fédéral de la Justice

Ces explications surviennent au lendemain des questions soulevées publiquement par le directeur des poursuites criminelles et pénales du Québec (DPCP), Patrick Michel, qui a confié à Enquête qu’il s’attendait à ce que l’ancien ministre fédéral de la Justice justifie publiquement sa décision d’avoir ordonné un nouveau procès à l’ancien juge en 2021. M. Michel a refusé les demandes d’entrevue subséquentes d’Enquête.

Le DPCP préoccupé

En entrevue la semaine dernière, Patrick Michel jugeait inconcevable d’apprendre, après trois ans de procédures additionnelles, l’existence d’avis juridiques.

Patrick Michel. Source: Radio-Canada / Sébastien Vachon
« Ces avis, on en ignorait l’existence. Ça ne nous aide pas à comprendre. Au contraire, ça suscite encore plus d’incompréhension quant au processus décisionnel du ministre d'ordonner un nouveau procès », a-t-il mentionné.

« Je ne veux pas spéculer, mais on est en droit de se demander : si on avait eu ces opinions-là au moment où on les a demandées, est-ce que ç'aurait pu influencer notre décision de continuer les procédures? Juste qu’on ait à se poser ces questions-là, c’est préoccupant. Ce n’est pas souhaitable pour la confiance du public », a-t-il clamé.

Après avoir clamé son innocence pendant des années et s’être dit victime d’une grave erreur judiciaire, l'ex-juge Jacques Delisle a finalement reconnu la semaine dernière avoir causé la mort de sa femme en plaidant coupable d'homicide involontaire. Nicole Rainville a été retrouvée morte, une balle dans la tête, en 2009 dans leur condo de Québec.

Le GRCC critiqué

L'ancien ministre David Lametti rappelle que le GRCC a été « fortement critiqué » dans le passé.

« J'ai proposé des changements dans la loi pour justement éviter dans l'avenir une telle situation », a-t-il plaidé.

« Je n’ai jamais dit que l'ex-juge était innocent. J'ai remis le tout pour que ce soit réévalué par la personne qui doit le faire dans notre système, un juge de première instance. » — David Lametti, ex-ministre de la Justice

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