Cri du cœur sans précédent pour l’Aide juridique
Julien Vailles
2018-08-21 15:00:00
Le constat est sans appel : il faut un investissement massif dans le système d’Aide juridique québécois afin de payer davantage les avocats qui prennent des mandats d’Aide juridique.
Le Barreau du Québec tenait ce matin une conférence de presse sur la question. Le bâtonnier du Québec Paul-Matthieu Grondin était accompagné de Me Mia Manocchio, présidente de l’Association québécoise des avocats et des avocates de la défense (AQAAD), de Me Catia Larose, vice-présidente de l’Association des avocats et des avocates de province (AAP), de Me Stéphanie Valois, administratrice de l’Association québécoise des avocats et avocates en droit de l’immigration (AQAADI) et enfin de Me Jonathan Pierre-Étienne, président du Jeune Barreau de Montréal (JBM).
Parmi eux, un consensus : les tarifs accordés aux mandats d’Aide juridique sont nettement insuffisants. À l’approche des élections provinciales, on réclame donc un investissement du gouvernement à la hauteur de 48 millions de dollars. On demande également à ce que l’évaluation de l’admissibilité à l’Aide juridique soit faite non pas sur une base annuelle comme c’est le cas présentement, mais sur une base mensuelle, comme toutes les autres provinces canadiennes, souligne Me Grondin. Cette mesure coûterait trois millions de dollars, pour un total de 51 millions.
Plus d’avocats, moins de mandats
Un élément est particulièrement alarmant : alors qu’il y a plus d’avocats que jamais au Québec, ils sont de moins en moins à accepter des mandats d’Aide juridique, rappelle le bâtonnier.
Pour corriger la situation, il n’est pas question d’indexer les tarifs : il faut un rattrapage important.
« Dès l’université, les futurs juristes savent qu’ils auront de la difficulté à survivre en remplissant des mandats d’Aide juridique. Entendons-nous : ils ne veulent pas s’enrichir en remplissant des mandats d’Aide juridique, ils veulent seulement vivre décemment », explique Me Grondin.
Même son de cloche chez Me Manocchio. La présidente de l’AQAAD rappelle que des tribunaux de trois niveaux différents – la Cour suprême, la Cour d’appel du Québec et la Cour supérieure – ont rendu des décisions dans lesquelles ils ont souligné l’importance des investissements dans l’Aide juridique. Notamment, dans un dossier qui nécessitait une expertise, une partie a dû consulter pas moins de 13 experts avant d’en avoir un qui acceptait d’agir dans un mandat d’Aide juridique.
En-deçà du salaire minimum
Me Larose, vice-présidente de l’AAP, rappelle également la gravité de la situation. « Comment justifier qu’en 2018, un dossier de garde d’enfant et de pension alimentaire soit rémunéré à un tarif fixe de 500 $ pour une prestation de travail moyenne de 40 heures? » s’indigne-t-elle.
À ce prix, elle s’explique bien que de moins en moins de gens acceptent de travailler pour un tarif inférieur au salaire minimum et ce, tout en engageant leur responsabilité professionnelle.
Cette situation a également des répercussions importantes en droit de l’immigration. Des résidents permanents menacés d’expulsion, ou des demandeurs d’asile qui risquent d’être renvoyés dans des pays où ils risquent la torture, ont ainsi de plus en plus de mal à trouver un avocat, rappelle la présidente de l’AQAADI, Me Valois.
« Au gouvernement de faire sa part »
Enfin, Me Pierre-Étienne, président du JBM, souligne que son organisation a publié un Guide de travail et de facturation afin de venir en aide aux avocats de pratique privée qui acceptent des mandats d’Aide juridique.
À l’instar de ses collègues, il estime que la balle est à présent dans le camp politique. « Au gouvernement de faire sa part », souligne-t-il.
Des changements à venir
« Cette demande est un marathon, pas un sprint », déclare à Droit-inc Me Grondin, conscient que le dossier ne sera pas réglé en un mois.
Dans ce contexte, quel que soit le gouvernement en place en octobre prochain, il exhorte le parti politique au pouvoir à prendre la situation au sérieux. Le Québec aura un nouveau ministre de la justice, puisque même advenant une victoire libérale, Me Stéphanie Vallée a annoncé qu’elle ne solliciterait pas de nouveau mandat.
Les élections prochaines ont-elles ainsi eu un impact sur le timing de la conférence de presse? « Il s’agit d’une coïncidence, assure Me Grondin. Reste que ça tombe plutôt bien dans les circonstances », conclut-il.
Anne
il y a 6 ansJe suis tout à fait d'accord avec cette prise de position. Le "timing" est excellent. Espérant que les partis sauront agir !
dar
il y a 6 ansLe constat n'est pas nouveau; Il est grand temps que les médias et politiciens accordent l'attention requise à cette injustice trop longtemps ignorée. Le traitement financier des avocats/avocates qui acceptent des mandats d'aide juridique est excécrable. Souhaitons que nos élus mettront fin à l'exploitation des plus vulnérables dans notre profession ===et=== dans notre société
GH
il y a 6 ansLe Barreau agit pour ses membres. Bon travail!
Anonyme
il y a 6 ansLe Barreau agit pour le public,comme sa mission le dicte, pas pour les membres. Dans ce cas, ça adonne que les conséquences sont également positives pour les membres.
Bravo Barreau! Belle initiative
DSG
il y a 6 ansI disagree and more importantly, I don't appreciate that the Barreau is getting involved in this issue on my behalf. I don't want my tax dollars to subsidize peoples' legal fees and I don't want my Barreau fees used to finance this initiative. People who can't afford lawyers can either get a better job or support whichever candidate they feel will initiate changes to legal aid. If their candidates don't win in October, tough, it's democracy.
Aanonyme
il y a 6 ansOur legal aid system in Quebec with respect to lawyers in private practice is so inadequate that it amounts either to encouraging lawyers to settle cases no matter what the merits or is no legal aid system at all. It's called hypocrisy and I am glad to see the Barreau call the government out on it.
MC
il y a 6 ansThis is our culture - helping those in need (and which was democraticaly voted that way).
Top it with the fact that our current law is also thinking the same way: anyone can
Also, as stated in the article, some cases involve abuse regarding kids rights (which can't wait and should be treated urgently).
Bottom line, I beg you to deffer.
Alexandre
il y a 6 ans«Get a better job». Ça me fait toujours rire. J'imagine que vous travaillez dans un bureau d'avocats? Il y a des réceptionnistes, des gens qui font le ménage, qui font des photocopies? Que souhaitez-vous exactement? Payer votre réceptionniste 100K$ ou bien qu'elle quitte pour se trouver un «meilleur emploi»? De la même façon, souhaitez-vous arrêter d'aller au restaurant ou de payer votre plat 3x plus cher? C'est drôle comment les gens qui tiennent ce genre de discours dépendent pourtant des employés qui font un petit salaire qu'ils refusent d'augmenter.
Anonyme
il y a 6 ans"Our legal aid system in Quebec with respect to lawyers in private practice is so inadequate that it amounts either to encouraging lawyers to settle cases no matter what the merits or is no legal aid system at all."
En quoi est-ce différent de la situation de ceux qui ne sont pas admissibles à l'aide juridique? Vous penser que la personne qui fait 50k$ par année a les moyens de mettre 30K$ sur un procès? Ve N'est pas l'avocat qui va tirer sur la plug (i.e. faire passer ses intérêts devant), c'est le client qui le fera.
DSG
il y a 6 ansThat was altered, perhaps from the moderator (who has probably had enough of DSG by now, who can blame the poor guy). What I wrote was, "People who can't afford lawyers can either get a job..."
DSG
il y a 6 ansAs for the kids, my comment was not directed at them. As is often the case, the truly needy are often the victims when people abuse and fleece the system. Let's face it, people accused of crimes are more likely to apply for legal aid. As someone pointed out above, it some cases it's very rich criminals. If I needed to protect a kid I wouldn't need legal aid because I wouldn't even charge any fees at all.
As the comment, "this is our culture", yes it is. It's the culture which leads to a "le b.s. comme mode de vie" society. If we add legal services in the countless free stuff people get, people will be unmotivated to get ahead in life and the courts would be inundated with cases involving late rental payments.
Anonyme
il y a 6 ansJ'ai écouté la conférence de presse sur Facebook live et j'ai été bien heureuse de la sortie du Barreau.
Anonyme
il y a 6 ansIl s'agit d'une question que le Barreau n'ose jamais soulever, et où il pourrait s'impliquer au grand bonheur de la population:
Étant donné que l'inssufisance des fonds du régime d'aide juridique est de plus en plus aigue, ne serait-il pas temps de rouvrir le débat sur ceux qui devraient y avoir droit, pour en exclure ceux qui sont impliqués dans des activités de crime organisé, qui devraient assumer la charge des risques de leur occupation.
Me(e)
il y a 6 ansJ'ai déjà travaillé dans un dossier 80 heures en matière familiale, avec plusieurs sauvegardes, témoins à préparer, etc. J'ai gagné, mais à un tarif horaire dérisoire. Lorsque j'ai vu l'indemnité des témoins, j'ai compris que c'était eux les vrais gagnants. La famille qui est venu témoigner a fait le double en indemnité pour 2 jours alors que mes honoraires pour 80 hrs sur l'AJ faisaient à peine la moitié. Pour eux, l'indemnité représentait plusieurs mois de BS. C'est humiliant.
Aussi, l'AJ autorise des frais d'expertise de plus de 1000$ pour un docteur qui voit le patient 1h, alors qu'on se farcit le sal boulot pendant 1 an pour beaucoup moins. L'argent est disponible, mais pas pour les avocats.
J'ai quitté la pratique privé car la majorité de mes mandats étaient de l'AJ et mes voisins BS avaient plus de revenus disponible que moi (Maison HLM, toiture et asphalte refaite aux frais de l'état, dentiste payé, avocat, médicaments, lunettes, pas de service de garde à payer, etc). Ceux qui travaillent pour eux en arrachent toutefois.
Me Redoute
il y a 6 ansUn avocat de pratique privée n'est pas obligé d'accepter de représenter des clients en vertu d'une entente avec l'Aide juridique. Oui, les tarifs sont ridicules: alors on ne va pas dans ce système.
Si vous voulez aider et représenter les pauvres, allez travailler à l'Aide juridique. Ce n'est pas payant mais au moins c'est un salaire et une belle pension de retraite à la fin de la carrière.
Me(e)
il y a 6 ansLes seuils minimaux d'admissibilité ayant nettement augmenté, les travailleurs dans certaines régions du Québec sont majoritairement admissibles à l'AJ. Refuser systématiquement les mandats d'AJ n'est pas réaliste dans certaines régions, même pour des avocats en milieu de carrière.
Lorsque vous regardez les salaires moyens des avocats de moins de 10 ans de pratique, vous ne pouvez leur inculquer votre philosophie cogitée au 32ième étage d'un édifice à bureau de Montréal. La seule voie réaliste pour survivre est de continuer à travailler à rabais, et c'est ce qu'on dénonce.
Me Althusser
il y a 6 ansComment se porte votre pratique en droit corporatif cher collègue?
Me(e)
il y a 6 ansÇa ne "prend pas le pogo le plus dégelé" pour comprendre que le corpo n'est pas couvert par l'AJ, donc vos propos n'ont aucune valeur dans ce débat qui se concentre exclusivement sur les tarifs de l'AJ.
À lire votre nom et la qualité de vos propos, on comprend bien que votre cogitation émane de l'aile gauche de l'institut Pinel.
Anonyme
il y a 6 ansEst-ce que plus d'argent fait en sorte qu'il y aura plus d'aide pour les moins nantis ou est-ce que ça veut dire que les avocats qui prennent ce genre de dossier vont faire plus d'argent? Parce que les 2 ne sont pas synonymes.