Encore visée par une plainte!
Didier Bert
2024-07-19 15:00:44
Une avocate doit répondre à une plainte déposée auprès du syndic du Barreau visant une de ses publications sur TikTok…
L’avocate Vivan Nguyen fait l’objet d’une plainte portant sur une publication sur TikTok, dans laquelle elle critique le système de protection de la jeunesse.
Cette publication a été publiée en réponse à la question posée par un abonné du réseau social: « Si vous le pouviez, que changeriez-vous dans le système du département de la protection de la Jeunesse ? Sur quel point, il serait urgent d'agir ? »
À cette question, Me Vivan Nguyen répond: « C'est difficile d'avoir des attentes envers des personnes qui ne sont pas nécessairement la crème de la crème des cerveaux les plus performants au Québec. La DPJ, ce n'est pas le département de neurochirurgie de McGill.
Mais pour être plus constructif, je suggère d'abord d'arrêter le jeu du bâillon de la preuve des parents ou du bâillon de l'avocate des parents.
Je suggère des auditions filmées diffusées publiquement, mais confidentielles (visages flous et voix modifiées). Je suggère que le public entier sache ce qui se passe. »
À la suite de cette publication, le syndic du Barreau a déclenché une enquête quant au devoir de modération et de respect.
« J’admets critiquer ouvertement le système de protection de la jeunesse au nom de la justice en tant qu'officier de justice. Ce sont des dossiers à huis clos et personne ne sait vraiment ce qui se passe avant qu'un scandale n’éclate dans les médias », rétorque Me Nguyen. « Si j'étais avocate criminaliste, je ferais pareillement avec la brutalité policière et le non-respect de la Charte canadienne. »
Rappelons-le, Me Nguyen est cette jeune avocate qui remet sa carrière en question, tel qu’elle l’a déjà expliqué à Droit-inc dans un récent article.
Plainte frivole?
« Je crois que l'enquête doit être fermée pour plainte frivole », considère Me Vivan Nguyen, qui se définit comme une avocate militante. « Il faut être critique, sinon on cautionne des drames. »
Pour expliquer sa description imagée, peu élogieuse de la DPJ, l'avocate dit avoir préféré utiliser des termes polis plutôt que des formules plus directes. « Un peu de réserve est mieux quand on est membre d'un ordre professionnel », souligne-t-elle.
Quant à ses indications sur le bâillon, l'avocate affirme que « la DPJ s'oppose à mes preuves documentaires systématiquement dans neuf cas sur dix, plus ou moins. Certains juges vont s'offusquer et leur répondre : en quoi la preuve des parents est non pertinente? Aussi, on tente de me censurer depuis le début avec les plaintes au Barreau que je collectionne désormais. »
Enfin, au sujet des auditions publiques, mais confidentielles, l'avocate explique sa proposition: « C'est une suggestion dans l'intérêt public et l'intérêt des justiciables. C'est dans le silence qu'opèrent les abus de pouvoir et les comportements reprochables. À la grande lumière, versus la noirceur, les acteurs feront plus attention. C'est pas mal pour cela que les auditions criminelles sont publiques. »
Par ailleurs, Me Nguyen, qui se dit fière de servir la justice, dit avoir du mal à comprendre qu’on mène une enquête pour cette publication alors que d’autres avocats ont été peu ou pas punis pour des faits bien plus préjudiciables à la profession.
Me Vivan Nguyen cite plusieurs cas, dont celui d'un avocat de Québec, qui défendait des enfants de la DPJ, et qui a reconnu en juin 2023 avoir exposé ses parties intimes près d'un arrêt d'autobus en 2019. L'avocat a pu continuer à pratiquer, y compris auprès d'enfants, en attendant le dénouement de sa cause. L’avocat était passible d'un maximum de deux ans d’emprisonnement: le Barreau avait alors indiqué ne pas pouvoir l'empêcher de pratiquer, car seules les accusations passibles d'une peine de cinq ans d’emprisonnement et plus peuvent faire l'objet d'une intervention de l'Ordre.
Me Nguyen n’en est pas à sa première plainte. Elle précise que les deux premières plaintes — concernant des vidéos sur YouTube — ont été clôturées sans accusation, tandis que d'autres plaintes — à propos de publications sur TikTok — sont toujours en cours.