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Les avocats forcés de promouvoir des « valeurs » ?

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Jean-francois Parent

2017-10-26 15:00:00

Des avocats seraient obligés de promouvoir l'équité, la diversité et l'inclusion pour avoir droit de pratique, ce qui provoque un tollé...
Le plaideur torontois Joseph Groia
Le plaideur torontois Joseph Groia
Le barreau ontarien veut imposer l'adhésion à une déclaration de principes visant à ce que les avocats s'engagent à mettre ces valeurs en pratique.

Les critiques fusent, alors que certains estiment que le Barreau du Haut-Canada veut jouer les polices de la pensée.

Parce que « tous les avocats et les parajuristes jouent un rôle crucial dans l’accélération du changement de culture », le barreau ontarien veut en effet engager ses assujettis dans un projet de lutte au racisme et à la discrimination.

Obligation

Cette obligation de signer une déclaration de principes fait partie des recommandations émises par un groupe de travail sur les personnes « racisées » dans le milieu juridique, piloté par le Barreau.

« Dans le cadre de cette stratégie, vous êtes tenus de créer et de respecter une déclaration de principes individuelle qui reconnaît votre obligation de promouvoir l’égalité, la diversité et l’inclusion en général, ainsi que dans votre comportement envers vos collègues, vos employés, vos clients et le public », affirme le barreau ontarien.

Tous les avocats et les parajuristes devront signer cette déclaration cette année. Aucune sanction disciplinaire n'est prévue pour l'instant, mais le BHC dit ne pas écarter cette voie pour ceux qui refuseraient d'emboîter le pas et ne s'engageraient pas à respecter l'obligation dans les prochaines années.

Contraire aux valeurs

En entrevue, le plaideur torontois Joseph Groia demande au BHC de rendre l'adhésion à la déclaration volontaire. « Plusieurs avocats disent ne pas pouvoir en toute conscience adhérer à des principes qui vont à l'encontre de leurs valeurs ou de leur foi », dit-il à Droit-Inc.

Il cite la Cour suprême, selon laquelle des contraintes imposées au discours public sont la marque d'un régime totalitaire.

John Felderhof, défendu par Joseph Groia
John Felderhof, défendu par Joseph Groia
L'associé principal et fondateur du cabinet Groia et Cie a déposé une requête pour demander au BHC de convertir l'obligation en adhésion volontaire.

Joseph Groia n'en est pas à son premier pugilat avec son ordre : l'ex-avocat de la tête dirigeante de Bre-X ferraille maintenant devant la Cour suprême pour faire casser un verdict d'inconduite professionnelle imposé par le conseil de discipline du BHC.

Alors qu'il défendait feu John Felderhof, l'un des architectes de la fraude aurifère de Bre-X, Joseph Groia avait rudoyé verbalement les enquêteurs, ce qui lui avait valu une radiation provisoire de 1 mois et une amende de 200 000 dollars.

Quelle autorité?

Lorsqu'on lui demande en quoi le fait de s'engager à respecter ces principes pose problème, alors qu'ils sont déjà enchâssés dans les règles encadrant le marché du travail par exemple, il riposte : « La question fondamentale, c'est de se demander si le Barreau a l'autorité de forcer les avocats et les parajuristes à promouvoir ces principes », avec lesquels certains ne sont pas d'accord par ailleurs.

« Un régulateur qui m'impose quoi dire et quoi penser, c’est inacceptable, poursuit Joseph Groia. Aucune loi, aucun règlement nulle part au Canada n'oblige personne à promouvoir les droits de la personne. »

Si on veut lutter contre la discrimination et le racisme, ce n'est pas la bonne façon. « On n'impose pas des principes. C'est ce que le gouvernement Couillard semble tenter de faire au Québec avec le projet de loi 62 (sur les signes religieux dans l'espace public), et voyez ce qui arrive. On veut faire la même chose (en Ontario) avec cette obligation », dit-il.
Au nom de la diversité, justement, « la LSUC devrait laisser le choix aux avocats ».

Des obligations existantes

L'un des auteurs de la déclaration, l'avocat Raj Anand, affirme quant à lui au Canadian Lawyer que la nouvelle obligation reflète ce qui est inscrit au code de conduite des avocats, qui impose une responsabilité professionnelle de défense de l'égalité.

Raj Anand, l'un des auteurs de la déclaration
Raj Anand, l'un des auteurs de la déclaration
À l'Association du barreau ontarien, on est d'avis qu'il est normal que les avocats engagés pour défendre les principes d'équité, de diversité et d'inclusion aient l'obligation de mettre ces principes en pratique, rapporte le Canadian Lawyer.

Ironie

La requête de Groia contre la déclaration de principes sera entendue le même jour que celui où la Cour suprême entendra celle de l'Université Western Trinity, de la Colombie-Britannique, une faculté de droit de confession chrétienne dont les diplômés se voient refuser le titre d'avocat par le barreau de la C.-B.

Les diplômés de l'UWT doivent signer une profession de foi chrétienne pour obtenir leur diplôme de droit, ce qui leur barre l'accès au barreau non seulement en C.-B., mais dans plusieurs provinces. « Il est ironique qu'on veuille interdire à des avocats de pratiquer parce qu'ils affirment leurs croyances religieuses, alors qu'on voudrait forcer d'autres avocats à affirmer leurs croyances dans des principes », conclut Joseph Groia.

Un changement de nom plus conforme aux nouvelles valeurs ?

Par ailleurs, le Barreau du Haut-Canada songe à changer de nom. La décision de bannir le terme « Haut-Canada » a été prise par 38 voix contre 11 lors du conseil qui s’est tenu le 28 septembre.

Julian Falconer, président du groupe qui pilote ce changement
Julian Falconer, président du groupe qui pilote ce changement
Le nom serait archaïque et porteur du mauvais message, selon Julian Falconer, président du groupe qui pilote ce changement. « Ce n’est pas un secret que le terme « Haut-Canada » comporte une connotation négative pour de nombreux peuples autochtones. »
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8 commentaires
  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a 7 ans
    Wet dreams
    "Joseph Groia avait rudoyé verbalement les enquêteurs, ce qui lui avait valu une radiation provisoire de 1 mois et une amende de 200 000 dollars."

    200k$ pour un rudoyage verbal! ça a dû donner des wet dreams aux syndic des autres provinces!

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 7 ans
      Me
      Lollllll

  2. Anonyme
    Anonyme
    il y a 7 ans
    Hum
    « Ce n’est pas un secret que le terme « Haut-Canada » comporte une connotation négative pour de nombreux peuples autochtones. »

    Une connotation négative pour le "Bas-Canada" aussi!

  3. Gary
    Police de la pensée
    Bel exemple de totalitarisme, tu dois faire une profession de foi envers les valeurs globalisantes de l'internationlista multiculturaliste sinon tu perds ton droit de pratiquer ou tu te fais cibler etc.

    On est vraiment rendu là.

    Les gens sont conservateurs ou réactionnaires parce qu'ils en arrivent à penser que les choses étaient mieux avant.

    Et ceci en est un bel exemple.

    On était beaucoup mieux avant quand on pouvait dire ce qu'on voulait, quand on voulait. Plus libre.

    La tyrannie des minorités est arrivée.

    • Avocat
      Avocat
      il y a 7 ans
      Hélas...
      Amen...

  4. DSG
    de promouvoir l’égalité
    What are they talking about? Lawyers are at the forefront in the struggle for equal rights. Law firms treat all new lawyers (regardless of race, color or creed)equally like utter and complete garbage. When I started out I would go home at the end of a long day and find myself envying my dog.

  5. Anonyme
    Anonyme
    il y a 7 ans
    Cool !!
    Cool, nous allons devenir des SJW par la contrainte !!!

  6. EFL
    "Barreau"
    Personnellement, je trouve que le terme "Barreau" a une connotation négative pour les ex-détenus, et nous rappelle la répression à laquelle ont fait face les premières nations.

    Je propose de remplacer l'expression "Barreau du Québec" par "Papillon pacifique de la région de la Huronie, aussi connue sous le nom de Québec".

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