L’ex-juge Delisle est décédé
Radio-canada Et Cbc
2024-08-12 10:15:28
Un ex-juge, qui a reconnu sa culpabilité à l'accusation d'homicide involontaire de sa femme, est décédé…
L’information d’abord publiée par Le Journal de Montréal a été confirmée par Radio-Canada.
Jacques Delisle avait siégé pendant 25 ans à la Cour supérieure et à la Cour d’appel du Québec. « Il était méticuleux, il exigeait un travail de qualité », a souligné Me Guy Bertrand, un avocat qui le connaissait personnellement. « Malheureusement, ce qui s'est passé à la fin de sa vie, c'est le souvenir que les gens vont avoir de lui ».
« J’ai souvent plaidé devant lui. C’est un homme intelligent, capable, et c’est regrettable pour lui, pour sa famille et également pour la communauté juridique de perdre cet homme », a pour sa part affirmé Me Julius Grey.
« Malheureusement, je pense que beaucoup de gens vont se rappeler son procès, sa condamnation et son plaidoyer. Je crois qu’il serait mieux de se rappeler le juriste (...), l’homme qui a fait une grande contribution au droit québécois », a-t-il ajouté.
Jacques Delisle était le protagoniste d'une cause judiciaire rarissime qui, au fil de coups de théâtre, a pris des airs romanesques.
En 2012, il a été reconnu coupable du meurtre prémédité de sa femme, Nicole Rainville, après un procès hautement médiatisé. Il a alors écopé d'une peine de prison à perpétuité, une première au Canada pour un ex-magistrat.
Il avait tenté de camoufler son meurtre en suicide, avait tranché le jury, puisque sa femme, paralysée du côté droit, n’aurait pas pu se tirer elle-même une balle dans la tête.
Pendant le procès, l’avocat de Jacques Delisle avait fait le pari audacieux de ne pas faire témoigner l’ex-juge.
En 2015, après avoir épuisé tous ses recours d’appel, il a accordé une entrevue d’une heure au journaliste Alain Gravel, directement de la prison, révélant une version des faits surprenante. Il admettait avoir aidé sa femme à se suicider, mais persistait à dire qu’il ne l’avait pas tuée.
Au départ, il avait raconté aux policiers que sa femme s’était suicidée en son absence avec une arme prohibée.
Le jour de la diffusion de l’entrevue, il a fait une demande de révision, remettant en question le travail du pathologiste présenté par la Couronne lors du procès, et expliquant pourquoi il n’avait pas dit la vérité auparavant.
Ces éléments, selon lui, constituaient de nouvelles preuves qui auraient pu influencer le procès.
En 2017, le Groupe de révision des condamnations criminelles (GRCC) avait conclu dans un rapport que l’ex-juge n’avait pas été victime d’une erreur judiciaire comme il le prétendait.
Mais en 2021, le ministre fédéral de la Justice, David Lametti, avait utilisé son pouvoir discrétionnaire pour ordonner la tenue d’un nouveau procès – une manœuvre rarement utilisée –, « soulevant la possibilité d’une erreur juridique ». Cette décision avait été largement remise en question.
Au cours du second procès, un arrêt des procédures a été imposé, alors que la disponibilité de certaines preuves était remise en cause. Jacques Delisle avait alors été libéré, avant que le procès puisse finalement reprendre.
En mars dernier, Jacques Delisle avait finalement reconnu sa culpabilité à l'accusation d’homicide involontaire, dans l’ultime coup de théâtre de cette saga.