L’intelligence artificielle arrive en ville
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Jean-Francois Parent
2019-08-21 11:15:00
![Mark Dobble, président et cofondateur de Alexsei. Sources : Sites Web d'Alexsei et Twitter de Mark Dobble.](https://gvm.nyc3.digitaloceanspaces.com/store/uploads/public/di/article/25240__1.jpg)
« Quelles parties sont responsables des dépens, dans une demande de redressement en droit commercial, ou comment sont calculées les prestations dans telle ou telle situation en droit de la famille », illustre Mark Dobble, président et cofondateur de Alexsei.
La jeune entreprise, qui complète sa première année d’existence, offre un service de recherche juridique s’appuyant sur l’apprentissage machine et le traitement automatique du langage naturel.
Le service peut ainsi répondre à des questions juridiques complexes, dans tous les domaines du droit.
Établie à Toronto, la boîte comptant 3 fondateurs et 3 associés a pourtant été fondée à Montréal, en 2017. Ou du moins, l’idée d’utiliser l’intelligence artificielle pour générer des analyses de la jurisprudence a-t-elle été mise de l’avant sur l’île, avant que l’entreprise ne migre vers la Ville-Reine.
L’I.A. juridique
Le traitement automatique du langage naturel, c’est notamment la capacité technologique de synthétiser des milliers de textes ardus et très longs et pour en tirer des conclusions claires, et applicables.
On y ajoute l’apprentissage machine, permettant à l’application de préciser davantage ses réponses au fil des questions posées.
« Nous ne formulons pas d’avis juridique, poursuit Mark Doble. Nous fournissons des contenus juridiques, qui répondent à des questions complexes. »
Avec un accès aux bases de données tel CanLII et LexisNexis et des ententes avec plusieurs juridictions afin d’avoir accès aux jugements qui échappent aux bases de données, Alexsei se targue d’avoir un outil qui s’appuie sur l’essentiel de la jurisprudence formulée au Canada.
Par exemple, un concept juridique peut être formulé de plusieurs façons différentes, et s’appliquer à plusieurs contextes tout aussi différents. Alexsei ingère l’ensemble de la jurisprudence, de la loi et des ratio decidendi applicables à une question précise et génère ainsi un rapport de recherche faisant le point sur le droit applicable et synthétisant les décisions rendues par les tribunaux.
« Nous pouvons ainsi fournir, en moins de 24 heures, une note de recherche juridique expliquant la jurisprudence telle qu’elle s’applique à un contexte particulier. Dans la réponse à la question, on tient ainsi compte du fait qu’un juge interprétera la loi différemment selon le contexte », poursuit Mark Dobble.
C’est d’ailleurs en réalisant qu’il faisait essentiellement les mêmes recherches juridiques que des milliers de juristes dans d’autres cabinets qu’il a conçu l’idée d’automatiser le processus.
Des économies
Alexsei, c’est un service de recherche et de rapport juridiques qui permet de se défaire des tâches cléricales essentielles à la formation d’une opinion juridique, poursuit Mark Doble, qui a complété un diplôme de Juris Doctor à l’Université Queen’s de Kingston.
En cabinet ou en entreprise, « on délègue la recherche aux stagiaires ou aux avocats juniors. Ils peuvent mettre 2 ou 3 jours à préparer le mémorandum », avec les coûts que cela implique.
Les entreprises et les cabinets qui font appel aux services d’Alexsei obtiennent une réponse beaucoup plus rapidement, parfois dans la journée.
« Nous constatons chez nos clients que leurs coûts de recherche juridique sont divisés par 5 », assure-t-il.
Autre variable non négligeable du service : les réponses proposées par l’application sont ensuite validées par des juristes en chair et en os. Alexsei s’est d’ailleurs doté d’un réseau d’universitaires, de juges à la retraite et de praticiens d’expérience qui pourront compléter au besoin les rapports produits par l’intelligence artificielle.
Et ces informations complémentaires seront ajoutées à la base de connaissances d’Alexsei.
Un marché prometteur
Loin d’être un feu de paille, Alexsei a même été invité à présenter sa technologie à un groupe de clercs et d’avocats à la Cour suprême du Canada, l’hiver dernier.
L’entreprise cible les cabinets de taille intermédiaire, plus susceptibles tirer un grand bénéfice de l’intelligence artificielle. Dans les grandes études, on a souvent les ressources et la capacité d’innovation pour réduire les délais et les coûts de la recherche juridique.
Alexsei ne s’attaque cependant qu’à la common law, qui mise sur e la trame factuelle et les précédents—la case law—pour motiver une décision. Cela rend l’analyse par l’intelligence artificielle plus facile, et surtout plus adéquate.
Ensuite, comme le droit civil met davantage l’accent sur la doctrine par rapport aux faits, la recherche bénéficierait moins d’un produit comme Alexsei.
Comme fournisseur de services alternatifs, l’entreprise occupe une niche où son avantage concurrentiel est indéniable, plaide Mark Doble: elle est la seule à avoir systématisé le recours à l’intelligence artificielle. Elle est donc plus rapide, et moins chère, que ses concurrentes où les services sont surtout opérés par des humains, de chair et d’os.