Louis P. Bélanger : de Stikeman à un cabinet boutique
Delphine Jung
2018-01-12 15:00:00
Son départ avait été annoncé laconiquement par un courriel signé de l’associé directeur du bureau de Montréal, Me André Roy. « C’est moi qui avais préparé ce courriel… J’ai préféré parler aux gens directement », corrige Me Bélanger.
« Nous sommes très heureux de le recevoir parmi nous. C’est un avocat de grande expérience qui va travailler à sa pré-retraite ici », explique Me Jean-Rémi Thibault, l’un des associés de ce cabinet fondé en 1994.
Arnault Thibault Cléroux est spécialisé en litiges commercial, immobilier, successoral et fiduciaire. Les trois associés sont Mes Jean-Rémi Thibault, Luc Arnault et Stéphane Cléroux.
Désir de ralentir
« Je connaissais très bien Jean-Rémi Thibault et cela faisait un moment que je pensais à une nouvelle formule. Je vais avoir 65 ans dans quelques mois et cela fait quelque temps que j’essaye de ralentir. J’ai déjà essayé lorsque j’en avais 62, mais ça n’avait pas vraiment marché… », explique l’avocat originaire de Montréal.
Sauf que tout quitter d’un coup n’est pas facile. « Certains clients m’ont demandé de finir leur dossier. Intégrer un cabinet me permet d’avoir une infrastructure », dit-il.
L’objectif pour le moment est de rester chez Arnault Thibault Cléroux pendant environ deux ans, pour entamer une transition « vers une belle retraite ». Me Bélanger sait que la réalité diverge parfois, mais a bon espoir de garder le cap pendant encore deux ans.
D’un monde à un autre
Pour l’avocat qui a exercé dans un gros bureau d’envergure internationale, le changement semble radical. « Pas tant que ça en fait. Car les gros bureaux travaillent parfois avec des plus petits, notamment lorsqu’il y a des problèmes de conflits d’intérêts. Ce n’est pas un milieu inconnu », raconte le sexagénaire en ajoutant qu’il « faut tout de même s’adapter ».
Me Bélanger passe d’une « grande famille » d’avocats, « à une plus petite » et il souligne les différences entre les gros et les petits bureaux. « Dans un cabinet comme Stikeman, les gens travaillent dans un secteur spécialisé, ils se retrouvent un peu comme dans une petite boutique, elle-même dans une grande organisation. Mais dans un cabinet boutique, les choses se font plus facilement, les décisions sont prises plus rapidement et il y a moins de conflits d’intérêts », détaille-t-il.
Souvenirs de gros dossiers
L’avocat ne renie pas son passé. Sa longue carrière comme plaideur chez Stikeman a été marquée par plusieurs dossiers comme celui d’Onex qui a tenté de mettre la main sur Air Canada à la fin des années 1990. « Les enjeux étaient énormes et le dossier devait être bouclé en trois mois », se souvient-il.
Me Bélanger a également vécu de l’intérieur la tragédie de Lac-Mégantic. « Je suis resté sur place deux semaines. Je conseillais la partie qui était propriétaire du pétrole et qui avait loué les wagons. C’était un dossier très intense », dit-il.
Autre affaire qui a marqué Me Bélanger: celle du recours collectif sur la fixation du prix de l’essence. « Le dossier a débuté en 2008 et il s’est terminé en 2016. Nous sommes allés deux fois à la Cour suprême sur interlocutoire, c’est plutôt rare », raconte l’avocat qui n’est pas sans se souvenir du défi juridique que représentait cette cause.
De ses débuts chez Stikeman, Me Bélanger reste aussi beaucoup marqué par son maître de stage, Me Gérald Tremblay, « mais pas le maire », aime-t-il rappelé avec sourire. Pour lui, Me Tremblay était un « grand juriste », « la quintessence des grands plaideurs », ose-t-il même.
Depuis, le temps a filé, et Me Bélanger compte sur ses prochains mois un peu moins chargés pour profiter. Le plaideur confie qu’il est un grand amateur de navigation, et ce, depuis 1994. « Je suis déjà allé à New York et au Saguenay avec mon bateau», dit-il.
Et lorsqu’il aura quitté la mer, il compte bien dévaler les routes québécoises avec sa motocyclette. « Ce sont des passe-temps d’été c’est sûr… Il va falloir que je me trouve quelque chose pour l’hiver… », conclut-il.