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10 enjeux que pose le processus de distribution per capita aux conseils des Premières Nations

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Cherie Brant Et Jennifer Smith

2025-04-28 11:15:41

Quid du recours à la distribution per capita par les Premières Nations?

Les gouvernements des Premières Nations ont couramment recours à la distribution per capita (DPC) pour administrer des règlements de grande envergure. Cela ne veut pas pour autant dire qu’il leur est facile d’employer cette méthode, qui leur demande en fait d’anticiper divers enjeux juridiques.


Cherie Brant et Jennifer Smith - source : BLG

Si l’on prend exemple sur le récent règlement de 10 G$ relatif aux annuités découlant du Traité Robinson-Huron (et le règlement attendu de revendications similaires au titre du Traité Robinson-Supérieur), le règlement de revendications particulières (relatives aux droits fonciers issus de traités, aux délimitations territoriales et aux cessions illicites de terres de réserve) ainsi que sur les paiements liés à diverses ententes de partage des revenus (contrats d’exploration, ententes sur les répercussions et les avantages, etc.), on constate que les gouvernements autochtones doivent régulièrement décider comment mener ce processus sans qu’il en coûte ultérieurement aux conseils des Premières Nations.

Simple en apparence, la DPC comporte pourtant son lot de complexités.

Voici 10 recommandations qui aideront les chefs et leur conseil de bande à prendre de judicieuses décisions.

  • Veillez à ce que le conseil ait le dernier mot

Le chef ou la cheffe et le conseil de bande sont investis de responsabilités juridiques et éthiques accrues et doivent prendre toutes leurs décisions suivant l’intérêt de la communauté qui les a élus; c’est ce que l’on appelle l’obligation d’agir en qualité de fiduciaire, selon laquelle le conseil demeure le décideur final et ne peut ni déléguer ses responsabilités fiduciaires à quiconque (même à un service des finances ou à un autre comité), ni laisser primer l’opinion des membres de la communauté, bien qu’elle doive être prise en considération.

  • Prenez une longueur d’avance dans la planification de la DPC

La somme issue d’un règlement et la complexité de la distribution des fonds dépassent souvent largement les considérations courantes des gouvernements autochtones, lesquels doivent alors pouvoir compter sur la collaboration étroite de leurs équipes et sur des mécanismes financiers bien rodés. Il est donc recommandé de planifier les étapes à venir et les tâches à déléguer, du traitement des formulaires de décharge des membres jusqu’aux versements à effectuer, ce avec quoi nos spécialistes des questions financières et opérationnelles peuvent vous assister. Étayez le processus décisionnel du conseil. Créez des outils d’analyse sur mesure, relevant toutes les données pertinentes, qui aideront le chef ou la cheffe et le conseil de bande à prendre des décisions éclairées. Préparez adéquatement vos systèmes et vos équipes. Assurez-vous que tout est en place pour traiter efficacement tant les formulaires de décharge que les versements liés à la DPC.

  • Faites-vous conseiller par les bonnes personnes

Faire appel à des spécialistes juridiques tout comme à des conseillers et conseillères communautaires dès le début du processus décisionnel peut réduire les problèmes administratifs en cours de route. Les premiers peuvent concevoir des outils personnalisés de détection et d’analyse des risques et veiller à ce que l’ensemble du processus soit mené conformément aux obligations fiduciaires du conseil, tandis que les seconds forment un comité spécial appelé à s’assurer que les décisions sont conformes aux lois et aux traditions de la Première Nation et à faire régulièrement connaître les opinions de la communauté.

  • Mobilisez la communauté

Le conseil a le devoir de tenir les membres informés de tout ce qui est susceptible de nuire à leurs intérêts. Le fait de les solliciter tout au long du déroulement de la DPC nourrit leur sentiment d’inclusion et de participation citoyenne, tout en permettant au conseil d’affiner ses décisions en tenant compte des avis exprimés. Comme les réclamations sont souvent en partie fondées sur les difficultés vécues par les membres, il est essentiel que ces derniers soient inclus dans le processus.

  • Déterminez qui a droit à une part du règlement

Ce point est souvent plus compliqué qu’il n’y paraît au départ. Quelle date butoir déterminera l’admissibilité à une part? Quel registre établira qui est membre? Celui du Canada ou celui de la Première Nation? Que faire pour les gens dont le statut de membre n’est pas encore confirmé à cause de facteurs indépendants de leur volonté, comme dans le cas des enfants pris en charge ou des personnes confrontées à des retards administratifs? Y aura-t-il un délai de grâce pour maximiser l’admissibilité?

  • Pensez à établir un fonds de prévoyance

Ce point est particulièrement important lorsque l’admissibilité à la DPC repose sur l’appartenance à une bande ou à Première Nation, laquelle est déterminée par voie juridique; les conseils de bande doivent donc viser à inclure – et non à exclure – des personnes. Il existe de la jurisprudence sur laquelle se fonder pour s’assurer de traiter les membres équitablement lors de processus de ce type. Les conseils doivent toutefois garder en tête qu’il leur faudra déterminer en toute transparence comment utiliser la portion restante de leur fonds de prévoyance.

  • Prévoyez du temps pour la création de fiducies

Une fois le cabinet juridique et le fiduciaire choisis, il faudra peut-être encore des semaines pour mettre en place une fiducie, même celles qui servent simplement à détenir les fonds destinés à une DPC, ou à conserver une somme pour une personne mineure jusqu’à l’atteinte de sa majorité.

  • Envisagez la compensation de dettes

Une DPC offre à une Première Nation la possibilité de recouvrer des sommes qui lui sont dues par leurs membres, lesquels peuvent choisir d’utiliser leur part pour rembourser leurs dettes. Comme il existe des restrictions sur la façon de procéder, il est préférable de demander un avis juridique avant d’aller de l’avant.

  • Rédigez une décharge sur mesure

Une décharge claire et bien rédigée peut aider à protéger la Première Nation et le conseil de bande contre les revendications éventuelles de bénéficiaires. Il n’existe pas de décharge standard, puisqu’elle doit toujours être adaptée à l’objet du règlement et à la DPC.

  • Préparez votre communauté

Les membres de votre communauté sont-ils prêts à recevoir une importante somme d’argent en un seul versement? Votre conseil de bande tient-il compte du soutien à procurer aux gens vulnérables, comme les personnes aînées et celles ayant une incapacité?

À propos des auteurs

Cherie Brant, avocate chez BLG, exerce en droit autochtone et en droit commercial dans une grande variété de secteurs, notamment les grands projets d’infrastructures énergétiques, de transmission et d’exploitation minière.

Jennifer Smith a rejoint le cabinet BLG après plus de 20 ans d’expérience en finance.

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