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Amendement du règlement sur la langue du commerce et des affaires

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Caroline Jonnaert Et Catherine Bergeron

2024-07-25 11:15:55

Caroline Jonnaert et Catherine Bergeron, les auteures de cet article. Source : Robic
Caroline Jonnaert et Catherine Bergeron, les auteures de cet article. Source : Robic
Quel impact va avoir l’amendement du règlement sur la langue du commerce et des affaires? Éclairage…

Le 26 juin dernier, le gouvernement du Québec a publié le Règlement modifiant principalement le Règlement sur la langue du commerce et des affaires (le « Règlement modifiant »).

Ce texte amende le Règlement sur la langue du commerce et des affaires (le « Règlement amendé »), afin de faciliter la mise en œuvre de la Charte de la langue française (la « Charte ») et ses récents changements.

Depuis sa précédente publication sous forme de projet en janvier dernier (le « Projet de règlement »), le Règlement modifiant a fait l’objet de modifications, dont voici un aperçu.

Inscriptions sur les produits

  • Exigences de la Charte. En règle générale, toute inscription sur un produit, son contenant, son emballage ou sur les documents ou objets qui accompagnent le produit doit être rédigée en français. Il existe plusieurs exceptions à cette règle, dont celle permettant de rédiger, même en partie, uniquement dans une autre langue que le français une « marque de commerce déposée » au sens de la Loi sur les marques de commerce (la « LMC »), lorsqu’aucune version correspondante en français ne se trouve au registre tenu selon la LMC. Toutefois, si un générique ou un descriptif du produit est compris dans cette marque, alors celui-ci doit figurer en français « sur le produit ou sur un support qui s’y rattache de manière permanente ».
  • Clarifications apportées par le Règlement amendé. Le Règlement amendé élargit la portée de l’exception en matière d’inscription sur les produits aux marques de commerce « reconnues » au sens de la LMC, ciblant ainsi non seulement les marques enregistrées, mais également les marques non enregistrées. Il s’agit d’une modification apportée au Projet de règlement, lequel élargissait uniquement la portée de l’exception aux marques en cours d’enregistrement.

Le Règlement amendé précise également que les termes « générique » et « descriptif » réfèrent respectivement à la nature et aux caractéristiques d’un produit, à l’exclusion du nom de l’entreprise et du nom du produit tel que commercialisé, d’une appellation d’origine et d’un nom distinctif à caractère culturel.

Ces exclusions ne figuraient pas dans le Projet de règlement et leur portée n’est pas entièrement claire, de sorte que des clarifications de l’Office québécois de la langue française (« OQLF ») pourraient être bénéfiques.

Aussi, contrairement au Projet de règlement, le Règlement amendé ne précise pas quel traitement visuel donner à la traduction française de termes génériques ou descriptifs d’un produit ; il s’agit d’une autre incertitude à laquelle l’OQLF pourra éventuellement apporter des clarifications dans de futures publications.

Enfin, la période transitoire jusqu’au 1er juin 2027 instaurée par le Projet de règlement, afin de permettre aux entreprises de se conformer aux nouvelles exigences en matière d’inscriptions est maintenue pour les produits fabriqués avant le 1er juin 2025 et dans la mesure où aucune version française de la marque de commerce reconnue au sens de la LMC n’a été déposée en date du 26 juin 2024.

Un délai de grâce additionnel est prévu pour des produits assujettis à certaines règles d’étiquetage.

Affichage public et publicité commerciale

  • Exigences de la Charte. En règle générale, l’affichage public et la publicité commerciale au Québec doivent se faire en français. Une autre langue peut également être utilisée en plus du français, à condition que le français y figure « de façon nettement prédominante ». La Charte prévoit néanmoins une exception pour les « marques de commerce déposées » au sens de la LMC, de sorte que celles-ci peuvent figurer, même en partie, uniquement dans une autre langue que le français, à condition qu’aucune version correspondante en français ne se trouve au registre des marques de commerce. De plus, la Charte prévoit qu’à compter du 1er juin 2025, les marques de commerce déposées dans une autre langue que le français devront se soumettre à la règle de la « nette prédominance » dans l’affichage public visible depuis l’extérieur d’un local. Cette nouvelle règle remplacera l’exigence de « la présence suffisante du français » dans l’affichage public d’une marque de commerce visible à l’extérieur d’un local.
  • Clarifications apportées par le Règlement amendé. Le Règlement amendé élargit la portée de l’exception en matière d’affichage public aux marques de commerce « reconnues » au sens de la LMC, ciblant ainsi tant les marques enregistrées, que les marques non enregistrées. Le Règlement précisant la portée de l’expression « de façon nettement prédominante » pour l’application de la Charte de la langue française est par ailleurs abrogé. À la place, le Règlement amendé précise que la « nette prédominance du français » est rencontrée, lorsque « le texte rédigé en français a un impact visuel beaucoup plus important que le texte rédigé dans une autre langue », notamment lorsque l’espace consacré au texte rédigé en français est au moins deux fois plus grand que celui consacré au texte rédigé dans une autre langue.

Publications commerciales

  • Exigences de la Charte. Selon la Charte, toute « publication commerciale » doit être rédigée en français. Une publication commerciale peut également être rédigée à la fois en français et dans une autre langue, à la condition que la version française soit accessible dans des conditions au moins aussi favorables. Selon la Charte, la documentation commerciale visée par ces règles inclut « les catalogues, les brochures, les dépliants, les annuaires commerciaux, les bons de commande et tout autre document de même nature qui sont disponibles au public ». Contrairement aux inscriptions sur les produits ainsi qu’à l’affichage public et la publicité commerciale, la Charte ne prévoit pas d’exception pour les « marques déposées » utilisées dans ces documents.
  • Clarifications apportées par le Règlement amendé. À ce chapitre, le Règlement original n’a pas été amendé, de telle sorte que l’exception pour les marques de commerce « reconnues » au sens de la LMC continue de s’appliquer. Par ailleurs, bien que le Projet de règlement spécifiait que les médias sociaux et les sites Internet étaient considérés comme étant des publications commerciales aux fins de la Charte, ce qui avait pour but de cristalliser la position administrative de l’OQLF à ce sujet, le Règlement amendé ne prévoit toutefois plus cette précision. Il demeure probable que l’OQLF maintienne son interprétation, de sorte que les médias sociaux et les sites Internet demeureraient assujettis aux dispositions de la Charte applicables aux publications commerciales.

Contrats d’adhésion

  • Exigences de la Charte. Selon les nouvelles dispositions de la Charte,les contrats d’adhésion, ainsi que les documents qui s’y rattachent, doivent être rédigés en français. Les parties à un tel contrat peuvent toutefois être liées par sa version dans une autre langue que le français si, « après que sa version française ait été remise à l’adhérent, telle est leur volonté expresse ». Dans ce cas, les « documents se rattachant au contrat » peuvent également être rédigés exclusivement dans cette autre langue.
  • Clarifications apportées par le Règlement amendé. Le Règlement amendé précise ce que constitue un « document se rattachant à un contrat d’adhésion ». Il s’agit notamment de tout document : (i) attestant l’existence du contrat, tel un certificat d’assurance ou une attestation d’assurance ; (ii) dont l’annexion au contrat est requise par la loi, tel un formulaire de résiliation ou de résolution ; ou (iii) qui en constitue autrement l’accessoire. Le Règlement amendé prévoit également certaines présomptions quant à la « remise » d’un contrat d’adhésion lorsque celui-ci est conclu par téléphone ou via un moyen technologique.

Les nouvelles dispositions du Règlement amendé entreront en vigueur le 1er juin 2025, à l’exception des dispositions relatives aux contrats d’adhésion qui sont entrées en vigueur le 11 juillet dernier.

À l'origine, cet article a été publié sur le site de Robic.

À propos des auteures

Caroline Jonnaert fait partie du Groupe des Technologies émergentes chez ROBIC. Elle se spécialise en droit des technologies de l’information, marques de commerce, droit d’auteur, et droit de la publicité et du marketing.

Catherine Bergeron est la cheffe de pratique du groupe de marques de commerce, chez Robic. Elle se spécialise dans les marques de commerce, plus précisément la poursuite de demandes d’enregistrement, le litige de marques et la gestion stratégique de portefeuilles de marques.

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