Application déraisonnable par l’employeur d’une politique de vaccination
Émile B. Denault
2024-12-17 11:15:51
Une décision récente a mis en lumière des enjeux relatifs à l'application de certaines politiques par les employeurs.
Dans la décision Teamsters Québec, local 1999 et Air Inuit ltée, 2024 QCTA 501, 17 septembre 2024 (a. Dominic Garneau), le Tribunal se penche sur un litige impliquant l’application d’une politique de vaccination chez l’employeur. En pleine pandémie de la COVID-19, l’employeur, conformément aux décrets ministériels s’appliquant aux activités de transport aérien, impose à ses employés la vaccination contre le virus. En vertu de cette politique, les employés avaient jusqu’au 31 octobre 2021 afin d’être entièrement vaccinés. Le travailleur visé par le grief a été suspendu administrativement du 1er novembre au 15 décembre 2021, date à laquelle il a confirmé l’obtention des deux doses de vaccin.
Le syndicat conteste cette mesure étant d’avis que l’employeur a agi de façon abusive et déraisonnable dans l’application de sa politique. Il explique que le salarié a reçu un test positif à la COVID-19 le 9 octobre 2021, l’empêchant d’obtenir sa première dose vaccin avant le 9 novembre 2021 conformément aux règles en vigueur. Étant dans l’impossibilité d’être entièrement vacciné à la date butoir du 31 octobre, le syndicat est d’avis que l’employeur aurait dû faire preuve de souplesse dans l’application de sa politique.
Le Tribunal conclut que l’employeur s’est comporté de manière déraisonnable en appliquant sa politique fermement sans tenir compte des particularités de la situation du salarié. L’employeur a ainsi manqué aux principes d’une gestion raisonnable.
À des fins d’analyse de la raisonnabilité de la mesure administrative, le Tribunal est d’avis que l’employeur devait se conformer à la politique de l’aéroport de Montréal qui exigeait la vaccination complète de tous les membres de la communauté aéroportuaire à compter du 1er novembre 2021. Selon cette politique, une personne infectée devait attendre 21 jours avant de recevoir une première dose et était considérée comme adéquatement vaccinée 14 jours après cette injection.
Le travailleur ayant été infecté le 8 octobre 2021 et ayant reçu sa première dose le 9 novembre 2021 est considéré comme adéquatement vacciné le 23 novembre 2021. De ce fait, le Tribunal conclut que la mesure administrative était raisonnable à compte du 1er novembre 2021, mais qu’au 23 novembre 2021, elle ne l’était plus. Le salarié devait être réintégré à cette date.
Le grief est partiellement accueilli.
À propos de l’auteur:
Émile B. Denault est avocat chez RBD. Il a développé son intérêt pour le droit du travail en milieu syndical en travaillant chez Unifor comme étudiant, notamment au sein du contentieux représentant les travailleurs en matière d’accréditation, de santé et sécurité au travail et de griefs relatifs aux mesures disciplinaires.