Préparation aux éventuels tarifs américains : dates clés et réflexion stratégique
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Collectif D'auteurs
2025-02-10 11:15:35
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Les États-Unis ont signalé qu’ils pourraient imposer des droits de douane de 25 % sur toutes les importations en provenance du Canada et du Mexique. Les récentes annonces du président Donald Trump laissent entendre que ces droits de douane pourraient entrer en vigueur dès le 1er février 2025; l’insistance de la nouvelle administration sur les déficits commerciaux et sa rhétorique protectionniste soulignent davantage la nécessité pour les entreprises de se préparer à agir rapidement.
Le décret intitulé « America First Trade Policy » pris le 20 janvier 2025 ordonne une enquête sur les causes des déficits commerciaux des États-Unis et leurs répercussions sur l’économie et la sécurité du pays. Le décret évoque la possibilité de mesures supplémentaires, dont l’imposition de nouveaux droits de douane, dans le cadre des solutions envisagées par l’administration pour combler ces déficits. L’enquête débouchera sur la publication d’un rapport le 1ᵉʳ avril 2025, et pourrait donner lieu à d’autres mesures commerciales ou durcissement de la surveillance des importations, y compris celles en provenance du Canada.
Comprendre les tarifs
Bien qu’on en pas sache plus sur le sujet, l’administration Trump a annoncé son intention d’imposer un tarif global de 25 %, aucune exemption n’étant prévue pour le moment. Les importateurs américains de produits canadiens sont généralement responsables des droits de douane, ce qui signifie que beaucoup d’acheteurs américains de produits canadiens pourraient demander une réduction des prix pour compenser ne serait-ce qu’une partie de ces coûts supplémentaires.
Le gouvernement canadien a annoncé des plans de représailles tarifaires sur les produits américains importés au Canada. Ces représailles pourraient perturber davantage les chaînes d’approvisionnement en augmentant les coûts pour les entreprises canadiennes qui dépendent des importations américaines.
Le gouvernement canadien a annoncé des plans de représailles tarifaires sur les produits américains importés au Canada. Ces représailles pourraient perturber davantage les chaînes d’approvisionnement en augmentant les coûts pour les entreprises canadiennes qui dépendent des importations américaines. De plus, les importateurs américains, y compris les sociétés canadiennes agissant à titre d’importateurs, devront déposer une caution en douane pour les produits assujettis à des droits de douane qui sont importés aux États-Unis. Le montant minimal de caution exigé est généralement de 50 000 $ US, et les entreprises doivent faire appel à des courtiers en douanes et à des sociétés de cautionnement pour s’en acquitter.
Comment votre entreprise peut se préparer
1. Surveiller les dates clés et prendre ses précautions
1er février 2025 : Le président Trump a indiqué que les tarifs pourraient entrer en vigueur à cette date. Les entreprises doivent se préparer aux répercussions immédiates sur les prix, les chaînes logistiques et les relations commerciales.
1eravril 2025 : Le décret intitulé « America First Trade Policy » prévoit une enquête sur les déficits commerciaux des États-Unis, dont les conclusions pourraient entraîner l’imposition de tarifs supplémentaires ou d’autres mesures commerciales. Les entreprises doivent anticiper cette éventualité en mettant en place des plans d’urgence.
Bien que les produits en transit aient toujours été exemptés de surtaxes (y compris les surtaxes imposées par le Canada sur les véhicules électriques chinois et les surtaxes sur les produits américains lors de la précédente guerre tarifaire en 2018), le Canada n’y est pas tenu pour autant.
Par ailleurs, l’article 53 du Tarif des douanes, qui sert de fondement juridique des mesures de représailles tarifaires du Canada, permet d’imposer rétroactivement des droits de douane. Ces droits rétroactifs poseraient des défis importants, car ni les exportateurs américains ni les importateurs canadiens n’auraient eu la possibilité d’atténuer ou de réduire leur exposition en ajustant les niveaux d’importation après l’entrée en vigueur de la surtaxe.
2. Engager le dialogue avec les clients et les fournisseurs
Répartissez à l’avance les responsabilités pour les droits de douane : Communiquer de façon proactive avec vos clients et fournisseurs pour établir clairement qui assumera la responsabilité des droits de douane, le cas échéant. Cela pourrait passer par la renégociation des contrats existants pour clarifier toute ambiguïté quant à la responsabilité en matière de droits de douane.
Privilégiez les contrats à durée plus courte : Étant donné que les politiques tarifaires pourraient changer plus souvent, les entreprises devraient privilégier des contrats de courte durée. Cela leur permettrait d’ajuster plus facilement les conditions du contrat en cas de nouveaux tarifs ou de modifications réglementaires.
Prévenez les litiges relatifs aux prix : Abordez les répercussions potentielles des tarifs sur les prix lors des négociations afin de réduire au maximum les risques de litiges. En définissant les attentes et en clarifiant les responsabilités dès le départ, les entreprises peuvent réduire le risque de perturbation des chaînes d’approvisionnement et des relations avec les clients.
La collaboration précoce avec les partenaires commerciaux contribuera à faciliter les activités d’exploitation et à prévenir des litiges coûteux.
3. Examiner les contrats et les Incoterms
Les entreprises devraient passer en revue les termes de leurs contrats et les Incoterms (dont il est question ci-après) qui y sont utilisés afin de savoir qui sera responsable des droits et des tarifs. Il serait prudent d’ajuster les Incoterms ou de renégocier les contrats afin de tenir compte des nouveaux risques tarifaires.
Comprenez les Incoterms et la responsabilité eu égard aux droits de douane: Les contrats utilisent souvent les Incoterms (International Commercial Terms) pour définir les responsabilités des acheteurs et des vendeurs dans les transactions transfrontalières. Certains Incoterms peuvent réattribuer la responsabilité à l’égard des droits de douane et des tarifs. À titre d’exemple :
Rendu droits acquittés (DDP): Il incombe au vendeur de payer tous les droits de douane, y compris les tarifs applicables. Les exportateurs canadiens qui utilisent ce terme peuvent assumer le coût direct des tarifs américains.
Franco à bord (FOB) ou À l’usine (EXW): L’acheteur est responsable de l’importation des produits et du paiement des droits de douane. En vertu de ces termes, les importateurs américains assumeraient normalement les tarifs de 25 %.
Coût, assurance et fret (CIF) : Le vendeur couvre les coûts jusqu’à l’arrivée des produits au port, mais l’acheteur est responsable des droits de douane et des tarifs.
Discutez de l’éventualité d’une résiliation ou de litiges: Les acheteurs ou les vendeurs peuvent envisager de résilier les contrats ou d’ajuster les conditions si les tarifs ont une incidence significative sur les coûts. Les parties doivent examiner attentivement leurs contrats afin de déterminer si les tarifs peuvent être considérés comme un cas de force majeure et envisager l’ajout de clauses prévoyant un ajustement des prix ou la résiliation du contrat dans de tels cas.
Négociez des conditions de remise de droits ou de drawback dans les futurs contrats : La partie responsable du paiement des tarifs peut envisager d’intégrer des conditions dans les contrats futurs prévoyant une remise ou un drawback des droits payés si de nouveaux tarifs américains sont imposés.
4. Atténuer les droits de douane en envisageant des arrangements en matière de prix de transfert
Les arrangements en matière de valeur en douane et de prix de transfert peuvent contribuer à la maîtrise des coûts des droits en établissant une valeur inférieure pour les produits à l’importation. En réduisant la valeur de base sous-jacente des produits soumis aux tarifs, les entreprises pourraient réduire au maximum et atténuer l’incidence des droits de douane.
Consultez un avocat-conseil américain au sujet des arrangements en matière de prix de transfert: Les exportateurs canadiens peuvent consulter des avocats-conseils américains compétents pour structurer leurs ventes aux États-Unis de sorte à vendre leurs produits d’abord à une société affiliée américaine, qui se chargerait ensuite de les revendre au client final américain. Si la première vente est une transaction de bonne foi sans lien de dépendance à des fins d’exportation et que la société affiliée américaine engage des coûts aux États-Unis, comme des frais de vente, des frais généraux et des frais administratifs, il est possible de réduire la valeur en douane payable en se fondant sur la première vente à prix inférieur. Les importateurs américains peuvent demander des décisions anticipées auprès du Service des douanes et de la protection des frontières des États-Unis (SDPF) pour savoir s’ils sont admissibles à cette méthode d’évaluation.
Valeur en douane et arrangement en matière de prix de transfert pour les importateurs canadiens: Les importateurs canadiens peuvent structurer leurs importations de manière similaire pour réduire au maximum les droits de douane grâce à une stratégie d’optimisation de la valeur en douane fondée sur un prix de transfert approprié.
La conception d’arrangements aussi complexes avec l’aide de conseillers juridiques peut permettre une optimisation des droits de douane et offrir une plus grande certitude en matière de prix de vente aux clients.
5. Interagir avec les autorités gouvernementales
Il est important d’interagir avec les autorités gouvernementales de part et d’autre de la frontière afin d’atténuer les répercussions des éventuels tarifs. En menant des efforts de plaidoyer et en parcourant les programmes d’aide financière disponibles, les entreprises canadiennes peuvent influencer l’élaboration des politiques, obtenir des exemptions et/ou accéder à d’autres formes de soutien pour compenser l’augmentation des coûts. Des approches collaboratives à travers des groupements sectoriels peuvent renforcer l’efficacité de ces efforts.
Obtenir le soutien des pouvoirs publics: Les entreprises canadiennes doivent réfléchir à la manière de collaborer avec les gouvernements provinciaux et fédéral pour obtenir un soutien financier, notamment sous la forme de subventions ou des programmes de financement.
Collaborer avec les associations sectorielles: Les entreprises doivent envisager de collaborer avec les associations sectorielles pour intensifier leurs efforts de plaidoyer et parler d’une même voix aux décideurs.
Collaborer avec les sociétés affiliées et les clients américains: Les entreprises doivent envisager une collaboration avec des sociétés affiliées ou des clients américains afin d’obtenir des exemptions tarifaires, en particulier sur des biens essentiels pour les industries ou les consommateurs américains.
Le gouvernement du Canada envisagerait de mettre en place un train de mesures en faveur des entreprises canadiennes au cas où les États-Unis imposeraient des tarifs sur les produits canadiens; la portée de ces mesures d’allègement devrait être fonction de l’étendue et de l’importance des tarifs.
6. Diversifier les marchés
Les entreprises fortement tributaires du commerce américain doivent chercher les voies et moyens d’étendre leurs activités à d’autres marchés et renforcer leurs relations avec leurs partenaires non américains actuels. Les programmes de soutien fédéraux et provinciaux peuvent les accompagner dans leurs initiatives de diversification des marchés. Le Canada est très bien placé pour bénéficier d’un accès en franchise de droits au marché européen dans le cadre de l’AECG et à nombre de marchés asiatiques dans le cadre du PTPGP, ainsi qu’en vertu des accords commerciaux bilatéraux conclus avec la Corée du Sud et plusieurs pays d’Amérique du Sud.
Les entreprises canadiennes devraient également penser à renforcer leur présence sur le marché national. La protection de la part du marché intérieur pourrait passer par l’introduction de plaintes en matières commerciales pour concurrence étrangère déloyale en vertu des lois commerciales canadiennes, notamment à l’égard des exportations américaines qui ne font pas l’objet de représailles tarifaires. Dans les secteurs où il existe des obstacles importants au commerce interprovincial, les entraves à l’accès au marché américain pourraient servir de catalyseur pour lever ces obstacles et accroître le commerce intérieur au Canada.
Conclusions et principaux points à retenir
Afin de se préparer à l’éventuelle imposition de tarifs de 25 % sur les exportations canadiennes vers les États-Unis et à d’autres mesures que pourrait entraîner le décret America First Trade Policy, les entreprises doivent :
Être attentives aux dates clés, notamment le 1ᵉʳ février et le 1ᵉʳ avril 2025, afin d’anticiper les perturbations et mettre en œuvre des plans d’urgence.
Discuter avec les clients et les fournisseurs pour clarifier la responsabilité en matière de droits de douane, négocier des contrats à plus court terme et éviter de potentiels litiges sur les prix.
Examiner les contrats et les Incoterms pour déterminer sans ambiguïté les responsabilités en matière de tarifaire.
Optimiser les arrangements en matière de prix de transfert afin de réduire les droits de douane.
Mener des actions de plaidoyer auprès des gouvernements pour obtenir un soutien financier ou des exemptions.
Diversifier les marchés afin de réduire la dépendance à l’égard du marché américain et préserver les débouchés nationaux.
À propos des auteurs
William Pellerin est associé au sein du groupe Commerce international chez McMillan.
Jonathan O’Hara est avocat plaidant réputé pour son expertise exceptionnelle dans les régimes réglementaires complexes nécessitant une analyse économique chez McMillan.
Dr. A. Neil Campbell, associé chez McMillan, est reconnu en matière de droit de la concurrence, de droit antitrust, d’investissements étrangers et de commerce international.
Jamie M. Wilks, avocat chez McMillan, aide ses clients à se développer dans les univers complexes des taxes à la consommation, des douanes et du commerce international.
Gray Morfopoulos, du cabinet McMillan, est un avocat spécialisé en droit commercial international qui possède une expérience en litige et en arbitrage dans les domaines du droit réglementaire, commercial et administratif.
Peter Jarosz, du cabinet McMillan, possède plus de 20 ans d’expérience en droit du commerce international.
Kathleen Wang, du cabinet McMillan, se spécialise en droit commercial international, avec une expertise particulière en recours commerciaux et en questions de réglementation fédérale.
Philip Kariam, avocat chez McMillan, fournit des conseils juridiques aux clients sur les différends relatifs au commerce et aux investissements internationaux ainsi que sur les questions de réglementation.
Brigid Martin développe une pratique juridique en droit du commerce international, se concentrant sur les mesures commerciales, les marchés publics et les questions réglementaires fédérales chez McMillan.
Tayler Farrell conseille des clients nationaux et internationaux sur les recours commerciaux, les questions réglementaires fédérales et les marchés publics chez McMillan.