Les tribunaux en voient de toutes les couleurs…
Geneviève Gélinas
2015-08-19 13:15:00
Commençons par une affaire qui peut paraître anodine mais qui s’est avérée lourde de conséquences. En effet, une caissière employée de longue date d’un supermarché a été congédiée pour avoir suggéré à un client d’aller magasiner chez Wal Mart.
Un arbitre a conclu que malgré un dossier disciplinaire sans tache, mais devant l’absence de remords exprimés, l’employeur avait le droit de congédier la caissière en raison du bris du lien de confiance.
La Cour supérieure a rejeté la demande en révision judiciaire de cette sentence arbitrale car, «compte tenu du caractère stratégique du poste occupé(, il) est impensable qu’une caissière qui sert un client, au moment où il paie pour ses emplettes, lui dise que certains produits qu’il achète sont moins chers chez un compétiteur» (paragr. 61). Qu’on se le dise, la loyauté envers l’employeur, c’est important.
Pizza interdite
Tout le monde sait ce qu’est une pizza, non ? Ce n’était pas si clair pour une entreprise de restauration qui s’est installée dans la foire alimentaire du Complexe Desjardins pour y vendre, entre autres, des «focaccias couverts de différentes garnitures» (paragr. 19). Or, il y avait déjà là un comptoir franchisé Mikes dont le bail comprenait une clause d’exclusivité pour « la vente au détail de pizza ». Pour faire respecter cette clause, le franchisé Mikes a demandé une ordonnance de sauvegarde, qui a été accordée. En effet, le juge de la Cour supérieure écrit :
« (26) À la lumière des définitions fournies et à ce stade des procédures, le Tribunal conclut qu’une pizza est constituée d’une pâte à pain couverte de garnitures dont principalement une sauce tomate et du fromage. En ce qui a trait au focaccia, c’est tout simplement un pain.
(27) De l’avis du Tribunal, dans la mesure où le focaccia constitue une base de pain recevant des garnitures, il possède les attributs d’une pizza. (…) »
On en apprend tous les jours.
De la durabilité des poupées…
Dans un tout autre registre, un consommateur a demandé le remboursement du prix payé pour une poupée gonflable. Il invoquait en sa faveur la garantie de durabilité prévue à l'article 38 de la Loi sur la protection du consommateur. Le commerçant évoquait en défense que le décollement des mamelons relevait d’un usage abusif du bien. La Cour du Québec a plutôt conclu qu’en l’absence de preuve d’utilisation inappropriée, « (eu) égard au prix payé, le décollement des mamelons dans un si bref délai est inacceptable» (paragr. 15). La vente a donc été annulée.
C’est extra !
Plus récemment, il y a eu cet assuré qui s’est vu refuser le remboursement de frais de massothérapie prévu à son assurance collective. Vu la fréquence élevée des visites (4 ou 5 fois par semaine), l’assureur a mené une enquête qui lui a permis de douter de la valeur thérapeutique des massages reçus. La Cour du Québec en a assez facilement été convaincue…
Un croque-mort négligent
On se souviendra aussi d’une révocation de permis de directeur de funérailles confirmée par le Tribunal administratif du Québec et qui a fait l’objet d’un billet sous la plume de Me Lucie Allard. Une histoire qui, rien que d’y repenser, donne froid dans le dos.
Le meilleur pour la fin
Enfin, même si elle date de 2012, je m’en voudrais d’omettre de mentionner la plus classique des affaires insolites… Celle qui a valu d’être déclaré plaideur quérulent à celui qui réclamait notamment la propriété de toutes les planètes du système solaire « ainsi que sur l'espace entre chaque planète, à la grandeur de la galaxie» (paragr. 2). Rien que ça.