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Réflexions d’un diplômé confus

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Alexandre Vanasse

2010-06-16 08:30:00

Alexandre Gilbert-Vanasse vient d'obtenir son bac en droit à Laval. Avant de faire son barreau, il philosophe, pour notre plus grand plaisir, sur la valeur des diplômes.
À l’heure où se soulevait la coupe Stanley et se lançaient dans les airs les premiers ballons de foot en Afrique du Sud, quelque chose de moins médiatisé se tramait dans les murs du Peps de l’Université Laval.

Dans un décor assez réussi pour faire oublier (presque!) l’odeur du plastique usé de la vieille piste de course du gymnase principal, défilaient, accoutrés passablement sobrement, près de deux cent étudiants en droit et quelques trois cent étudiants de la faculté de sciences sociales.

Sur un air classique relevé de trompettes triomphantes, pénétraient dans la salle un cortège surprenant : présidé par une petite femme transportant une grosse massue dorée de 5 pieds, le cortège constitué d’une trentaine d’hommes et de femmes à l’âge, souvent, respectable et vêtus d’or, de pourpre et d’hermine (de la fausse, heureusement, pour s’éviter les foudres des environnementalistes), traversait la salle pour aller siéger, tels de nobles seigneurs, sur les trônes (ou chaises de plastique) disposés sur l’estrade.

Une étrange cérémonie débutait…

Dans le noir autour, des colonnes de lumière aux allures fantastiques changeaient graduellement de couleur pour passer du rouge, au jaune et au blanc.

Pour commencer, quelques discours protocolaires, qu’on aurait dits tirés d’une messe médiévale. Plus tard, on commençait à nommer des noms à un rythme de plus en plus effréné.

Si les premiers nommés prenaient le temps d’être longuement applaudis, avant de se faire remettre diplôme honoris causa (décerné à la très humble Jacqueline Morand-Deviller que je salue ici simplement) ou Médaille du Gouverneur Général et de se faire serrer la main par le recteur et plusieurs doyens, les étudiants qui suivirent défilaient toujours plus vite.

Si bien, en fait, que rapidement on ne nommait plus qu’un nom après l’autre, à un rythme de près 20 noms à la minute.

Les uns après les autres, en file indienne, comme on nous l’a répété depuis la maternelle, nous attendions sagement que notre tour vienne de monter sur scène, pour un ultime moment de gloire…

Si, vraiment, nous avons tous droit à 15 minutes de gloire avant de s’éteindre, la plupart d’entre nous doivent avoir l’impression qu’il leur reste 14 minutes et 57 secondes à recevoir…

Mais c’est peut-être pendant ces 3 secondes que je fus, comme d’autres je l’imagine, transcendé, tel Saint-François en extase, par une puissante réalisation existentialiste.

Immobile devant quelques centaines de mes pairs et applaudi avec peu de vigueur (j’étais le 167e… rien d’incompréhensible là-dedans) je réalisais, l’air vaguement mal-à-l’aise, que s’accomplissait à cet intense moment un cycle, une phase, une étape qui avait commencé il y avait de cela près de 17 ans (les gens normaux en auraient été à 16, mais quand même…).

Étrange moment que de revoir, en l’espace d’une seconde, les moments forts de mon apprentissage: maternelle, primaire, secondaire, cégep (moins de souvenir de cette étape-là…) et baccalauréat.

Tout cela, en quelques secondes était derrière moi, un diplôme sous le bras et la main moite de trois poignées de main rapides.

Pour le moins qu’on puisse dire, j’étais intensément obnubilé…

Comment exprimer le sentiment d’avoir investi 17 années de ma vie pour cela?

Force est d’admettre que mes collègues diplômés et moi faisons maintenant partie d’une infime portion de la population ayant traversé l’université.

Et je leur lève à tous mon chapeau bien haut pour avoir su traverser les nuits d’études et de caféine, ainsi que ces cours parfois si lourds.

S’ouvrent devant nous, maintenant, les « Portes du monde », et c’est peut-être là la chose la plus troublante.

« On fait quoi maintenant? » se demandent les étudiants, l’air un peu perdu, quand ils se retrouvent dans le parking, de l’autre bord de ces fameuses « Portes du monde »!

Naïf, peut-être, j’avais cru qu’obtenir un baccalauréat répondrait à toutes mes questions : j’aurais un métier. Je mettrais ma cravate le matin. Je ferais mon boulot en accumulant des congés de maladie et des fonds de retraite… et je paierais (beaucoup!) d’impôts.

Pourtant force est d’admettre que rien n’est joué et que chaque décision que je fais maintenant a autant d’impact sur ce que je deviens qu’à ma première leçon de grammaire au primaire ou d’algèbre au secondaire…

Alors, en guise de réponse un peu facile à cette question troublante (la question était « mais à quoi je peux servir, avec un bacc en droit, dans ce monde de fou? » pour ceux qui n’ont pas suivi), je répondrai que peut-être n’a-t-on réellement jamais fini d’appendre et, baccalauréat, voir même doctorat, ou pas, on serait probablement très prétentieux de croire que vient un jour le temps de se reposer sur ses lauriers.

Prochaine étape, travail d’été et le (fameux!) Barreau… une saga troublante à suivre!

imge #4061
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14 commentaires
  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Beau texte
    Voilà un article très bien écrit, clair et agréable à lire !
    Mes félicitations !

  2. DLG
    Bravo
    Génial, beau texte. Bravo Alex et bon succès au Barreau!

  3. Mymi
    Wow
    Quelle belle description tu fais de cette journée! Je dois avouer m'être posé la même question à la fin pour me rendre compte que ce bout de papier avait une signification beaucoup plus grande pour mes proches que pour moi... En effet, rien n'a changé, ma vie suit son cours mais j'ai maintenant quelque chose d'une grande valeur dans ce monde, une reconnaissance sociale!

    Continue à nous écrire de si beaux articles qui nous font revivre de manière enchanté ces rythmes de passages.

  4. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Du talent !
    Ce jeune homme a su nous transporter dans son univers, on à l’impression d’être avec lui à la remise de son diplôme ; article ni pompeux ni prétentieux, un vrai pro ! Bravo !

  5. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Ecrivain, Avocat ou Journaliste?
    Alexandre Vanasse a vraiment un don pour l'écriture, il devrait faire des études de lettre plutôt que du droit; quoique je pense qu'il fera un brillant avocat et pouquoi pas un futur grand jounaliste.Bravo!

  6. L'inconnu du bataillon
    L'inconnu du bataillon
    il y a 14 ans
    Etude
    Etudiez comme si vous deviez vivre toujours; vivez comme si vous deviez mourir demain.

  7. Me
    Me
    Toujours la même maudite photo de webcam. Poche. Manque flagrant de professionalisme. Je ne te dis pas d'engager Heidi Hollinger comme moi... mais un appareil photo décent c'est pas si cher que ça.

  8. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Re : Me
    > Toujours la même maudite photo de webcam. Poche. Manque flagrant de professionalisme. Je ne te dis pas d'engager Heidi Hollinger comme moi... mais un appareil photo décent c'est pas si cher que ça.

    Pas du tout, moi j'adore cette photo,Alexandre Vanasse vit avec son temps, c'est furieusement moderne, une photo de web va très bien dans ce contexte, n'oublions pas que nous sommes sur internet et pas dans les studios de chez Harcourt.

  9. Me
    Me
    Vous avez un piètre sens de l'esthétique si vous trouvez qu'un portait en fisheye est à adorer. La webcam est très d'actualité, j'en conviens. Ça ne suffit pas donner des résultats acceptables. Si M. Vanasse vise le niveau de MySpace, grand bien lui fasse.

  10. Taylor Lautner
    Taylor Lautner
    il y a 14 ans
    Re : Re : Me
    Me

    Tu as peut être l'argent pour te faire photographier par des photographes de renom qui utilisent le matériel de plus haute qualité.

    Mais, tu n'as pas le style ni le sex appeal de te retrouver sur le couvert de GQ comme moi.

    > > Toujours la même maudite photo de webcam. Poche. Manque flagrant de professionalisme. Je ne te dis pas d'engager Heidi Hollinger comme moi... mais un appareil photo décent c'est pas si cher que ça.
    >
    > Pas du tout, moi j'adore cette photo,Alexandre Vanasse vit avec son temps, c'est furieusement moderne, une photo de web va très bien dans ce contexte, n'oublions pas que nous sommes sur internet et pas dans les studios de chez Harcourt.

  11. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Y'a pas photo !
    Il promet à un bel avenir ce petit diplômé!

  12. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Anonyme
    Me a raison. C'est une profession dans laquelle les détails comptent énormément.

  13. Anonyme
    Anonyme
    il y a 14 ans
    Re : Me
    Ce n'est pas un portrait "fish eye".

    J'espère vraiment, pour le bien de l'image de la profession, que vous n'êtes qu'un cyber-personnage.

    > Vous avez un piètre sens de l'esthétique si vous trouvez qu'un portait en fisheye est à adorer. La webcam est très d'actualité, j'en conviens. Ça ne suffit pas donner des résultats acceptables. Si M. Vanasse vise le niveau de MySpace, grand bien lui fasse.

  14. Me
    Me
    >>>> Ce n'est pas un portrait "fish eye".

    Oui, c'est un portrait fisheye. Il y a clairement un effet fisheye dû à la proximité par rapport à la webcam.

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