Conseils d’un ex-juge à un jeune plaideur

Marie-Ève Buisson
2025-03-24 14:15:00

L’ancien juge de la Cour supérieure et avocat-conseil chez Deveau Dufour Mottet, Claude Champagne, donne ses conseils pour améliorer les plaidoiries des jeunes avocats en litige…
1. Être toujours bien préparé
Les juges n’apprécient pas les avocats qui ne connaissent pas leur dossier et qui ne savent pas de quoi ils parlent.
Le bon plaideur est celui qui maîtrise parfaitement bien son dossier du début à la fin. Avant d’arriver à la cour il a révisé les principales procédures, a rencontré ses témoins, a préparé avec eux les questions qui leur poserait et a tenté d’imaginer celles que la partie adverse poserait à ses propres témoins.
Ce bon plaideur a effectué une recherche exhaustive sur le droit applicable à sa cause et il a même commencé à rédiger sa plaidoirie finale.
2. Ne jamais sous-estimer la partie adverse
Vous avez l’impression que l’avocat qui vous fait face n’a pas une bonne réputation à la cour. On vous a dit qu’il préparait mal ses dossiers ou encore que la partie adverse se représentait elle-même.
Alors, redoublez de prudence : il n’est pas rare de voir ces « mauvais » avocats surprendre tout le monde en se révélant bien meilleurs qu’on ne l’imaginait. Et parfois, des justiciables sans avocat parviennent à mieux plaider leur cause que l’avocat adverse. Pourquoi? Parce qu’ils étaient bien préparés.
3. Ne pas hésiter à demander une suspension d’audience si une situation inattendue se présente
Le meilleur exemple d’une telle situation est lorsque le tribunal vous pose une question dont vous ne connaissez pas la réponse. Pris au dépourvu vous aurez tendance à répondre n’importe quoi. Ce n’est pas la meilleure solution.
Je vous suggère plutôt de demander une courte suspension d’audience. Cela vous permettra de consulter votre ordinateur portable, de vous rendre au CAIJ, de consulter une consoeur ou un confrère et de donner une réponse adéquate. Votre réputation ne fera qu’y gagner.
4. Se rappeler que l’avocat est aussi un officier de justice et un auxiliaire de la cour
L’avocat ne fait pas que représenter les intérêts de son client, il a aussi des devoirs envers le tribunal. Il doit respecter le décorum imposé par les règlements qui régissent entre autres la tenue vestimentaire des avocats et le bon ordre des audiences.
5. Dès le début du dossier, suggérez fortement à la partie adverse la tenue d’une conférence de règlement à l’amiable.
Les statistiques des tribunaux sont éloquentes au sujet de l’efficacité des conférences de règlements. Environ 80% des dossiers qui en font l’objet sont réglés hors cour au terme de l’exercice.
6. Restez respectueux et discipliné
Les juges n’aiment pas les avocats qui se donnent en spectacle. La salle d’audience n’est pas un théâtre. On préfère beaucoup les avocats qui sont disciplinés et respectueux.
7. Exprimez vos émotions avec retenue
Je pense qu’exprimer ses émotions est un atout. L’avocat doit toutefois démontrer ses émotions de façon modeste. Je me répète, on n’est pas au théâtre! Un avocat a le droit d’avoir des émotions parce qu’il croit à sa cause…
8. Acceptez le trac
Le bon plaideur, c’est celui qui a le trac. Aller au tribunal, c’est une expérience qui n’est pas toujours agréable. Le bon plaideur, c’est quelqu’un qui a une certaine anxiété parce que ce qu’il fait, c’est stressant.