Entrevues

Parent et stagiaire : comment faire?

Main image

Carolynne Burkholder-James

2014-12-15 15:00:00

Être jeunes parents et suivre ses études en droit ou le stage du Barreau en même temps, c’est difficile mais c’est possible. Trois stagiaires nous racontent leur quotidien bien chargé...
Nikki Kowalski est stagiaire au sein du cabinet D’Arcy & Deacon
Nikki Kowalski est stagiaire au sein du cabinet D’Arcy & Deacon
Tout a changé pour Nikki Kowalski lorsqu’elle a su qu’elle était enceinte. Elle était alors étudiante en deuxième année de droit à l’Université de l’Alberta et venait tout juste d’accepter de faire son stage au sein d’un cabinet d’avocats national à Edmonton. Moins d’un an plus tard alors que le bébé était sur le point de naître, elle et son conjoint ont déménagé à Winnipeg pour se rapprocher de leurs familles.

Leur fils est né en juin 2013, seulement quelques jours après qu’elle eut passé 12 entrevues pour décrocher un stage en droit. Mme Kowalski a fait sa dernière année d’études en droit à titre d’étudiante invitée de l’Université du Manitoba et est maintenant stagiaire au sein du cabinet D’Arcy & Deacon à Winnipeg.

La jeune femme n’est que l’une des nombreux étudiants et étudiantes en droit d’un peu partout au Canada qui doivent composer avec les exigences d’être nouveau parent et de faire son stage en droit en même temps.

« Je crois que le meilleur conseil à suivre est de prendre ça au jour le jour et de ne pas abandonner avant la fin de la première année », explique-t-elle.

Kristopher Henderson est devenu père en juillet 2013 au terme de sa deuxième année en droit à la Thompson Rivers University de Kamloops (Colombie-Britannique).

M. Henderson, qui est présentement stagiaire au cabinet Heather Sadler Jenkins à Prince George, en Colombie-Britannique, est du même avis : entamer sa carrière en droit et fonder une famille au même moment pose bien des défis. Toutefois, il reconnaît que le domaine juridique peut être tout particulièrement difficile pour les mères qui travaillent.

« Il est très compliqué de bien équilibrer le travail et la vie personnelle lorsqu’on est parent, que l’on soit homme ou femme. Par contre, plusieurs de mes collègues étudiantes en droit m’ont dit que même si elles étaient prêtes à avoir des enfants, elles se sentaient obligées de travailler quelques années avant de fonder une famille ».

Vaincre l’exode des femmes

Crystal Gillis est stagiaire en droit chez Gowling Lafleur Henderson, à Toronto.
Crystal Gillis est stagiaire en droit chez Gowling Lafleur Henderson, à Toronto.
Quand Crystal Gillis a su qu’elle était enceinte en 2011, elle était résolue de ne pas laisser sa grossesse l’empêcher de travailler dans un cabinet de Bay Street. La jeune femme qui a fait ses études à l’Université d’Ottawa, est maintenant stagiaire en droit chez Gowling Lafleur Henderson, à Toronto.

« On voit souvent en manchette des titres semblables : Exode en masse des femmes qui laissent les cabinets de Bay Street. J’étais alors déterminée à me battre contre ce phénomène et à faire en sorte qu'un plus grand nombre de femmes restent au sein des cabinets de Bay Street et y réussissent », explique celle qui a donné naissance à un fils au mois d’août 2012.

« Mais maintenant que je suis mère, je conseille plutôt aux femmes d’être réalistes. Il n’est pas facile d’être parent. C’est très enrichissant, mais ça rend certainement plus difficile le stage en droit », renchérit-elle. « Parfois, je me sens aux prises avec mon stage puisque je ne crois pas qu’il est adapté aux besoins de personnes qui ont des obligations en dehors des heures de travail ».

Il est communément reconnu que le stage en droit représente l’année la plus difficile pour tout avocat et que la première année après la naissance d’un bébé est celle qui est la plus difficile pour le nouveau parent; ainsi, il est peut-être insensé de combiner les deux.

« Je me sens souvent comme si quelque chose m’échappait », avoue Mme Kowalski. Si je travaille durant le week-end ou bien si je reste au bureau après les heures de travail, je me sens coupable de ne pas passer plus de temps avec mon fils; si je quitte le bureau à 17 h, je me sens jugée par mes collègues qui s’attendent à ce que je travaille plus fort ».

« Je me sens médiocre, à la fois comme employée et comme mère – ce qui est difficile lorsqu’on a l’habitude d’exceller dans tout ».

Une question d’équilibre

Kristopher Henderson est devenu père au terme de sa deuxième année en droit à la Thompson Rivers University
Kristopher Henderson est devenu père au terme de sa deuxième année en droit à la Thompson Rivers University
Mme Gillis ajoute que la culture de son cabinet d’avocats lui permet de mieux faire l’équilibre entre le travail et la vie personnelle. « Le télétravail est parfaitement acceptable chez Gowlings. Il n’y a presque personne au bureau après 19 h tous les soirs, » affirme-t-elle. « Plusieurs personnes rentrent chez elles, soupent avec leur famille et continuent de travailler une fois que les enfants sont au lit. Les ressources qui permettent l’accès à distance sont fantastiques et j’y ai recours souvent ».

Elle travaille fort au bureau, mais lorsqu’elle est avec son fils, elle lui porte toute son attention. « En général, je ne vérifie pas mes courriels le soir ou le week-end à moins que je sache devoir aider dans un dossier quelconque », ajoute-t-elle.

M. Henderson trouve difficile de ne pas pouvoir passer du temps avec sa fille puisqu’il doit travailler 10 heures par jour presque tous les jours.

« Ce n’est vraiment pas évident », fait-il remarquer. « J’espère pouvoir la voir le matin et une heure ou deux le soir durant la semaine. Je suis chanceux d’avoir une conjointe qui en fait beaucoup ».

Soutien social

Carolynne Burkholder-James est stagiaire en droit au cabinet Heather Sadler Jenkins
Carolynne Burkholder-James est stagiaire en droit au cabinet Heather Sadler Jenkins
Un bon réseau d’aide rend la tâche d’assurer l’équilibre entre le rôle de parent et le rôle de stagiaire plus facile. La mère de Mme Kowalski garde son fils pendant qu’elle et son conjoint travaillent; la conjointe de M. Henderson reste à la maison avec leur fille; tandis que Mme Gillis et son conjoint ont décidé d’engager une gardienne qui s’occupe de leur fils.

« Une gardienne d’enfants qui n’habite pas à domicile est peut-être l'option la plus dispendieuse, mais c’est le bon choix pour nous cette année », souligne-t-elle. « Nous considérons que c’est un investissement dans nos carrières ».

Ses collègues sont d’un grand soutien. « Plusieurs des femmes avec qui je travaille ont été pour moi de magnifiques mentors », ajoute-t-elle. « Il faut pouvoir bénéficier d’un très bon et solide réseau d’aide sinon le stage sera certainement beaucoup plus difficile ».

Elle peut se tourner vers ses collègues pour du soutien. « C’est très agréable de pouvoir se confier aux gens du bureau », constate-t-elle. Mon directeur de stage me dit souvent que mon fils doit être en tête de mes priorités en ce moment. Je suis heureuse de son soutien et je peux toujours lui parler si je ne sais plus où donner de la tête ».

M. Henderson conseille aux nouveaux parents de demander de l’aide auprès des membres de la famille. « Ne soyez pas gênés de laisser savoir aux autres que vous ne pouvez pas toujours tout faire par vous-même », conseille-t-il. « Aucune médaille et aucun prix ne sont décernés pour avoir accompli quelque chose sans avoir demandé de l’aide à personne ».

« Ce n’est pas facile, mais on en vient certainement à bout », conclut Mme Gillis

Carolynne Burkholder-James est stagiaire en droit au cabinet Heather Sadler Jenkins à Prince George en Colombie-Britannique. Elle détient un baccalauréat en sciences politiques de l’Université de Northern Bristish Columbia (2005), une maîtrise en journalisme (2005) ainsi qu’un Juris Doctor de l’Université d’Ottawa obtenu en 2014.


''Article préalablement publié sur le site de l’Association du Barreau Canadien.''
6339
Publier un nouveau commentaire
Annuler
Remarque

Votre commentaire doit être approuvé par un modérateur avant d’être affiché.

NETiquette sur les commentaires

Les commentaires sont les bienvenus sur le site. Ils sont validés par la Rédaction avant d’être publiés et exclus s’ils présentent un caractère injurieux, raciste ou diffamatoire. Si malgré cette politique de modération, un commentaire publié sur le site vous dérange, prenez immédiatement contact par courriel (info@droit-inc.com) avec la Rédaction. Si votre demande apparait légitime, le commentaire sera retiré sur le champ. Vous pouvez également utiliser l’espace dédié aux commentaires pour publier, dans les mêmes conditions de validation, un droit de réponse.

Bien à vous,

La Rédaction de Droit-inc.com

PLUS

Articles similaires