Êtes-vous prêts à vous investir?
Mario Charette
2013-11-15 13:15:00
Deux chercheurs de l’Université Duke, Peter Ubel and David Comerford, ont montré récemment que certaines personnes choisiront l’emploi ennuyeux et routinier s’ils croient qu’ils ne seront pas compensés pour l’effort supplémentaire que demande un emploi plus valorisant mais plus exigeant.
Par exemple, pour le même salaire, ces personnes préféreront être un surveillant durant un festival en plein air, une tâche peu stimulante, plutôt que la charge plus lourde mais plus intéressante d’en être un des organisateurs.
Ces résultats ne sont pas surprenants. En effet, plusieurs d’entre nous ont une idée bien établie de ce qu’est une charge de travail adéquate considérant leur niveau de rémunération. Si on leur demande d’en faire plus, ils refusent car, autrement, ils se sentiraient exploités. « On ne me paye pas pour faire ça», diront-il souvent.
D’autres parmi nous ont une attitude toute différente. Ce sont ceux qui ne comptent pas toujours leurs heures, qui sont souvent prêts à assumer de nouvelles tâches, qui cherchent à apprendre continuellement.
Ces personnes veulent leur salaire comme tout le monde mais elles sont également prêtes à investir un effort supplémentaire car elles désirent avancer. Cet extra consiste pour elles en un investissement dans leur avenir professionnel.
Bien des entreprises, surtout si elles sont syndiquées, obéissent à des règle strictes quant à la nature des tâches et la durée du travail. Il n’est pas alors possible de distinguer entre ces deux groupes.
Dans les entreprises où ces règles sont plus floues, c’est plus facile. Lorsque je travaillais dans la gestion de la vente au détail, j’aurais pu aisément classer les employés dans chacun de ces deux groupes. Ceux qui dosent leurs efforts pour les faire correspondre à ce qui leur semble juste pour leur salaire auraient formé le groupe le plus nombreux. Seuls les plus ambitieux font partie de l’autre groupe.
Comme c’est souvent le cas dans la vie, il y a des avantages et des inconvénients associés à chacun des groupes. Ceux qui dosent leurs efforts et leur énergie auront plus de difficultés à progresser dans leur carrière.
Comme ils paraissent moins intéressés ou impliqués, on ne pensera pas vraiment à les promouvoir. C’est souvent un drame pour les femmes qui aimeraient avancer et s’investir davantage mais qui doivent tout de même doser leur temps et leurs efforts car elles ont beaucoup de responsabilités familiales. En effet, doser ses efforts est nécessaire pour la conciliation entre le travail et la famille.
Si l’avancement dans la carrière est souvent la récompense de ceux qui s’investissent davantage, il faut se montrer prudent car on peut abuser facilement de votre bonne volonté.
Demeurer plus longtemps pour terminer une tâche urgente est au fond faire un cadeau de son temps à l’entreprise. Certains gestionnaires peuvent s’imaginer que vous leur ferez ce cadeau régulièrement alors que c’est une faveur que vous leur faites. L’histoire montre qu’il est facile pour l’être humain d’exploiter ses semblables.
Comment bien doser vos efforts ?
1. Vous devriez investir dans ce que vous croyez avoir de la valeur. Si c’est votre carrière qui compte pour vous, c’est donc là que vous devriez investir. Vous avez évidemment le droit le plus strict d’avoir des valeurs autres que le travail, quoi qu’on puisse en dire.
2. Faites le bilan de vos responsabilités et du temps que vous devriez allouer à chacune pour bien les rencontrer. Utilisez pour cela une grille d’emploi du temps pour une semaine typique. (Par ex. : http://lauravanderkam.com/books/168-hours/manage-your-time/)
3. Si c’est votre carrière que vous désirez mettre de l’avant, qu’êtes-vous prêt à faire pour qu’elle progresse? Jusqu’où êtes-vous prêt à vous investir? La grille mérite-t-elle alors d’être modifiée ?
4. N’oubliez pas que certaines limites ne peuvent jamais être franchies. Si vous vous rendez malade à trop vous investir, vous raterez vos objectifs tout comme si vous vous ne vous étiez pas suffisamment investi.
Mario Charette, est consultant en gestion de carrière depuis 18 ans. Il a eu l'occasion d'aider des centaines de jeunes et de moins jeunes à prendre des décisions adéquates et à gérer leur carrière. Il est connu pour sa grande connaissance du marché du travail et des formations. Sa chronique "De bon conseil" , au Journal Métro, porte sur les débouchés de formation et sur l'avenir des emplois. On peut communiquer avec lui sur Twitter à @marioco2 et sur LinkedIn