La Presse

Pourquoi les avocats canadiens aiment bien l'Afrique

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Rene Lewandowski

2012-03-16 11:20:00

Pour suivre leurs clients en quête de ressources naturelles, de plus en plus d'avocats canadiens font des affaires en Afrique. Payant ou pas?
D'habitude, on y va pour le bord de mer, surtout en cette période de l'année, chaude et prisée des vacanciers. Au début du mois de février, ce n'est toutefois pas pour se faire dorer au soleil que 6000 visiteurs de plus de 100 pays se sont donné rendez-vous au Cap, en Afrique du Sud, mais bien pour s'enfermer au Convention Center où a eu lieu pendant trois jours la plus importante conférence mondiale sur le droit minier africain.

Parmi les visiteurs, des patrons de grandes sociétés étrangères, mais aussi des banquiers, des investisseurs, des ingénieurs, des courtiers, des environnementalistes et des avocats. Beaucoup d'avocats.

Guy Tremblay
Guy Tremblay
«Notre bureau en a envoyé quatre!» s'exclame l'ex-coassocié national d'Heenan Blaikie, Guy Tremblay. Depuis 2004, ce cabinet d'avocats fait des affaires en Afrique, mais il n'est pas le seul cabinet canadien à avoir flairé la bonne affaire. En 2003, Fasken Martineau a ouvert un bureau à Johannesburg et Norton Rose y est présent depuis l'an dernier, après avoir avalé le sud-africain Deneys Reitz. Ces deux firmes ont elles aussi délégué des représentants pour la conférence.

Suivre ses clients

«C'est simple, nous suivons nos clients», explique l'associée Poupak Bahamin. Cette avocate montréalaise est une spécialiste de l'Afrique. Elle est depuis cinq mois au bureau parisien de Norton Rose, où elle conseille des entreprises canadiennes, européennes et africaines, pour leurs activités en Afrique subsaharienne et francophone. Heenan Blaikie et Fasken Martineau ont également depuis peu des bureaux dans la Ville Lumière, là où transitent beaucoup d'affaires avec l'Afrique.

Me Poupak Bahamin
Me Poupak Bahamin
Me Bahamin indique que, grâce à ses marchés des capitaux, le Canada attire déjà beaucoup de compagnies minières et pétrolières étrangères, qui viennent se financer. Quant aux entreprises canadiennes, elles peuvent difficilement ignorer le continent africain, qui regorge de ressources naturelles non exploitées.

«Les occasions sont là», reconnaît Me Bahamin. Conséquences pour les avocats: beaucoup de travail sur le sol africain.

Transactions et litige

John Turner, associé chez Fasken Martineau, est reconnu comme une autorité en droit minier, pétrolier et gazier, ainsi qu'en matière de projets par le Guide to the World's Leading Energy&Natural Resource Lawyers. Plusieurs fois par an, il se rend en Afrique pour y conseiller des clients du cabinet. Il souligne que les mandats juridiques sont nombreux et variés car il y a beaucoup de transactions qui requièrent de l'expertise en fusions et acquisitions, en financement d'entreprise, mais aussi, étonnamment, en litige.

Me John Turner
Me John Turner
Récemment, Fasken a ainsi défendu avec succès la canadienne First Quantum dans une affaire ayant pris naissance au début de 2010 et qui comprenait diverses procédures de litige et d'arbitrage dans plusieurs territoires, notamment en République démocratique du Congo. Un règlement est intervenu et prévoit une contrepartie de 1,25 milliard US.

La carte Jean Chrétien

Chez Heenan, c'est avec l'arrivée de Jean Chrétien que l'on s'est intéressé au continent noir. Embauché par le cabinet en 2004 après son départ de la politique, l'ex-premier ministre a un vaste réseau de contacts en Afrique. À tel point que, en grande partie grâce à lui, Heenan obtient des mandats de plusieurs gouvernements africains, notamment dans des dossiers de gouvernance. L'an dernier, lors du sommet annuel des Nations unies, à New York, M. Chrétien et le patron Guy Tremblay ont pu s'entretenir avec le président du Sénégal pour discuter affaires. Et en ce moment, deux avocates sont au Mali pour aider ce pays dans la refonte de son code minier, ainsi que pour «revisiter» les ententes minières avec les sociétés privées, explique Guy Tremblay.

Payant tout cela? Me Tremblay souligne qu'il y a beaucoup de démarchage et que les frais grimpent rapidement. Mais en fin de compte, dit-il, «si ce n'était pas payant, on ne serait pas là!»
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