Budget 2017: un manque de vision et des dépenses insuffisantes
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Jean-Francois Parent
2017-03-30 07:00:00

« Rien sur les seuils d'accès à l'aide juridique, on ne s'attaque pas du tout aux délais en matière de justice civile et familiale, on ne propose pas de vision... »
La bâtonnière du Québec, Claudia P. Prémont, juge insuffisantes les mesures contenues dans le dernier budget Leitao, déposé le 28 mars.
Les besoins sont pourtant criants dans plusieurs domaines du droit, déplore Me Prémont. Selon elle, la Justice n'obtient que « 1,29 % des dépenses totales, c'est insuffisant ».
Des besoins criants
Si elle salue les investissements de 175 millions $ consentis avant les Fêtes, « on ne prévoit rien pour la réduction des délais ailleurs dans le système de justice ». Outre la famille et la justice civile, elle relève que les besoins sont criants en matière de justice administrative, surtout depuis la grève des juristes.
Pourtant, la justice administrative qui offre ses services aux citoyens dans des délais raisonnables, « c'est aussi une question d'accessibilité à la justice ». Sans compter que rien n'est prévu pour s'attaquer aux irritants comme les pertes de temps dans les palais de justice, affligés par des délais jusque dans le simple fait d'obtenir une date d'audience.
« Nous préconisons des États généraux sur la Justice, et on n'a rien là-dessus dans le budget. »
La bâtonnière est d'avis que l'on « n'a pas été entendu. Pourtant, il faut que le gouvernement réalise qu'on ne peut pas attendre qu'il y ait une autre crise pour agir », soutient-elle.
Concédant qu'on a agit rapidement dans la foulée de l'arrêt Jordan, elle déplore néanmoins qu'on semble s'en tenir à ne réagir qu'en mode de gestion de crise. « Il faut faire réaliser au gouvernement que l'action est importante, avant d'avoir une autre crise. »
Un peu de baume sur la plaie
Le Barreau note toutefois quelques bouffées d'air frais : les modifications à la Loi sur l’administration fiscale favorisant la déjudiciarisation, des investissements dans les télécommunications en Basse-Côte-Nord, ce qui permettra une accessibilité accrue aux services de justice là-bas, et la hausse des investissements visant l’application de la Loi sur l’indemnisation des victimes d’actes criminels (LIVAC). « Toutefois, notre position demeure de revoir la LIVAC », ajoute Me Prémont.
L'arrêt Jordan profite au crime des cols blancs
Par ailleurs, plusieurs dossiers de criminalité financière sont menacés d'être abandonnés, faute de ressource pour les traiter dans un délai raisonnable. Selon le Journal de Québec, « 69% des dossiers pénaux en cours pilotés par l'Autorité des marchés financiers étaient considérés à risque de tomber à l’eau ».
Le budget Leitao relaterait en outre que « l'arrêt des procédures dans les dossiers de poursuites pénales de Revenu Québec pourrait avoir un impact négatif sur les efforts du gouvernement pour lutter contre l'évasion fiscale et les crimes économiques et financiers», peut-on lire dans le Journal de Québec.