Des avocats montréalais au secours des anges gardiens de Snowden
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Delphine Jung
2017-05-15 15:15:00

Ils disent avoir été touchés par leurs gestes: tour à tour, ils ont hébergé Edward Snowden, l’ancien contractuel de la National Security Agency (NSA) qui a mis au jour les pratiques de surveillance de cette organisation.
Ahith Pushpakumara, Supun Kellapatha, Nadeeka Dilrukshi Nonis, Vanessa Mae Rodel et leurs trois jeunes enfants (deux de 5 ans et un de 1 an) avaient lancé une procédure pour une demande d’asile en cours depuis de nombreuses années. Jeudi dernier, elle leur a été refusée par les autorités hongkongaises.
« Notre confrère montréalais, Me Robert Tibbo, à la fois avocat d’Edward Snowden et des réfugiés, nous a demandé notre aide », raconte Me Séguin. « On a été touché par l’histoire de ces gens, on n’a pas hésité. On est allé les rencontrer et on s’est attaché à eux », ajoute Me Tourigny.
En effet, les avocats expliquent que leurs clients risquent d’être renvoyés dans leur pays d’origine, les Philippines et le Sri Lanka, ou d’être arrêtés à Hong-Kong et mis en détention. Les enfants seraient alors placés en famille d’accueil.
« Les décisions de Hong-Kong démontrent une atteinte grave à l’équité procédurale », explique Me Simkin. Les autorités hongkongaises estiment que leur gouvernement respectif les protègera s’ils rentrent chez eux et ne croient pas qu’ils seront en danger.
Pourtant, joint par Skype, Ajit Pushpakumara confirme : « si je retourne au Sri-Lanka, à peine arrivé à l’aéroport, je vais être arrêté et probablement tué ».
Leur nom a été porté sur la place publique lors de la sortie du film d’Oliver Stone sur Edward Snowden en septembre. D’après Me Tourigny, ils auraient depuis reçu de nombreuses menaces de mort.
Malgré les dangers et la situation difficile dans laquelle ces personnes se trouvent, aucune ne semble regretter d’avoir recueillie Edward Snowden. « Je ne regrette rien et je suis très fière », dit Vanessa Mae Rodel.
Une solution simple: le Canada

Me Tibbo a désormais moins de deux semaines pour faire appel de ces décisions. Pour Me Simkin, « la solution est simple, c’est le Canada ».
Les avocats redoublent d’efforts pour faire venir ces familles. « En janvier dernier, nous avons soumis une demande de parrainage de réfugiés auprès des autorités d’immigration canadiennes. Ottawa a reconnu l’urgence et le sérieux de la situation ».
Depuis le début, les avocats assurent avoir consacré des centaines d’heures à ce dossier, toujours en pro bono. « Je suis heureux de pouvoir aider des familles si généreuses alors qu’elles n’ont pas grand-chose », ajoute Me Séguin.
Human Right Watch soutient leur demande. Edward Snowden lui-même a publié un tweet faisant référence aux familles.
« Il faut agir le plus rapidement possible. Ce sont des gens vulnérables qui ont un urgent besoin de protection », dit Me Séguin.
Parrainage privé
Mais pourquoi le Canada ? L’avocat explique : « À Hong-Kong, à peine 0,36% des demandes ont été acceptées depuis 1992. Le pays a une hostilité historique envers les demandeurs d’asile. Le régime canadien est un des rares à permettre que ces demandes soient fournies sans qu’on délibère sur leur statut de réfugiés ».
Le bureau d’Immigration Canada a en tout cas reconnu l’urgence de la situation. Mais le temps presse. Les avocats ont fait une demande pour que les familles puissent être accueillies au Canada dans l’attente d’obtenir une réponse relative à leur demande d’asile ici.
« La survie de ces familles dépend plus que jamais d'Ottawa », estiment leurs avocats qui ont déjà réussi à récolter 100 000 $ pour les frais de procédures, notamment grâce à l’organisme Pour les réfugiés.