Nouvelles

Des pratiques troublantes de Pornhub révélées dans un jugement

Main image

Radio-Canada Et Cbc

2025-01-15 11:45:23

Le site Pornhub. Source : Radio-Canada / Shutterstock
Le site Pornhub. Source : Radio-Canada / Shutterstock
Le site, alors géré par une entreprise montréalaise, Mindgeek, suivait la rentabilité de mots-clics associés à de la pédopornographie.

Un jugement rendu aux États-Unis lève le voile sur l’utilisation de mots-clics associés à de la pédopornographie sur le site Pornhub, entre 2015 et 2019.

Le jugement de la cour fédérale américaine (district du nord de l’Alabama) a été rendu le 19 décembre dans le cadre d’un recours collectif intenté par une adolescente qui a été victime d’une agression sexuelle alors qu’elle avait 16 ans, et dont la vidéo du viol s’est retrouvée sur le site pornographique. Elle a été vue des milliers de fois avant d’être finalement retirée.

Avec la collaboration des autorités canadiennes, le juge Scott Coogler a pu éplucher des communications entre les dirigeants de Pornhub et de l'entreprise Mindgeek, qui gérait le site à l'époque.

Il conclut que Pornhub et Mindgeek ont fait la promotion et ont profité du trafic de contenu pédopornographique qui se trouvait sur le site, notamment avec la création de mots-clés et de catégories pour référencer ces contenus.

Le magistrat américain estime également que l’algorithme a été créé et utilisé pour aider les fournisseurs de pornographie juvénile à faire la promotion de ce matériel et pour aider les utilisateurs à le trouver.

« La cour de l’Alabama a obtenu la permission de parler à certains (anciens et actuels) administrateurs et ils ont confirmé qu’on cherchait à obtenir le terme, pas illégal, mais le plus suggestif possible pour attirer les amateurs de ce type de porno », a réagi la sénatrice indépendante Julie Miville-Dechêne sur le plateau d’Isabelle Richer, sur les ondes d’ICI RDI.

« Ce sont des révélations extrêmement troublantes », ajoute Julie Miville-Dechêne.

Des mots-clics suivis… et payants

« C’est la première fois qu’on sait de façon précise que non seulement on essayait d’attirer des gens qui s'intéressaient à la porno juvénile, mais qu'on calculait aussi l’argent que ça rapportait », a expliqué Mme Miville-Dechêne.

Les administrateurs savaient en effet quels montants leur rapportaient les mots-clics associés à la pédopornographie, selon le jugement rendu en Alabama.

Par exemple, en octobre 2019, « young » (jeune) a rapporté 132 000 $ US, « teenager » (adolescent ou adolescente), 117 000 $ US, et « teen » (ado), 54 000 $ US.

À noter que « young » et « teenager » étaient en deuxième et en troisième position des mots-clics les plus recherchés, et que la catégorie « teen » générait à elle seule près du tiers des revenus de la plateforme.

Julie Miville-Dechêne, sénatrice canadienne indépendante. Source : Radio-Canada / Jacques Corriveau
Julie Miville-Dechêne, sénatrice canadienne indépendante. Source : Radio-Canada / Jacques Corriveau

« Et c’est ce que les opposants ont toujours dit : qu’il y avait une monétisation de l’exploitation sexuelle des enfants, parce que ça attire un certain nombre de gens », mentionne Julie Miville-Dechêne.

« Lorsqu’on met des mots-clics qui suggèrent que (les personnes présentes dans le contenu) sont des mineurs, même si parfois ce n’est pas le cas, ça génère de l’attention. Il faut comprendre que la pornographie peut mener à la dépendance et, donc, dans ce processus, à un moment donné, plus les acteurs sont jeunes, plus ça suscite de l’intérêt », a expliqué Julie Miville-Dechêne.

La sénatrice et ancienne journaliste à Radio-Canada a fait de cette cause l’un de ses chevaux de bataille et militait pour un contrôle plus serré des utilisateurs de pornographie en ligne.

Le projet de loi privé S-210, que portait la sénatrice pour protéger les enfants de la pornographie en ligne, est mort au feuilleton avec la prorogation du Parlement découlant de la démission du premier ministre Justin Trudeau.

Il prévoyait des amendes allant jusqu’à 250 000 $ pour les sites qui ne mettaient pas en place des mesures afin de s’assurer que les utilisateurs étaient bien majeurs. La sénatrice Miville-Dechêne espère que le prochain gouvernement agira pour protéger les enfants du matériel pornographique facilement accessible en ligne.

Changement dans les pratiques en 2020

Le jugement précise que ces pratiques ont changé à partir de 2020, lorsque des modérateurs ont été engagés avec le mandat de retirer les vidéos problématiques qui contenaient de la pornographie juvénile.

Entre 2015 et 2020, plus de 10 000 vidéos du genre ont été vues et ont cumulé plus de 684 millions de visionnements.

L’exploitation du site a été vendue en 2023 par l’entreprise montréalaise Mindgeek à Ethical Capital Partners, la maison mère d'Aylo.

1440
Publier un nouveau commentaire
Annuler
Remarque

Votre commentaire doit être approuvé par un modérateur avant d’être affiché.

NETiquette sur les commentaires

Les commentaires sont les bienvenus sur le site. Ils sont validés par la Rédaction avant d’être publiés et exclus s’ils présentent un caractère injurieux, raciste ou diffamatoire. Si malgré cette politique de modération, un commentaire publié sur le site vous dérange, prenez immédiatement contact par courriel (info@droit-inc.com) avec la Rédaction. Si votre demande apparait légitime, le commentaire sera retiré sur le champ. Vous pouvez également utiliser l’espace dédié aux commentaires pour publier, dans les mêmes conditions de validation, un droit de réponse.

Bien à vous,

La Rédaction de Droit-inc.com

PLUS

Articles similaires