Ghomeshi : une deuxième plaignante

La Presse Canadienne
2016-02-04 13:00:00

Peu de temps après leur arrivée, l'accusé aurait commencé à l'embrasser, puis l'aurait saisie à la gorge, poussée contre un mur et frappée au visage à plusieurs reprises, selon le témoin.
Mme DeCoutere, qui est capitaine dans l'Aviation royale canadienne, soutient qu'elle n'avait jamais consenti à être étranglée ou frappée, et que c'est M. Ghomeshi qui avait commencé à l'embrasser. Elle a raconté au tribunal qu'elle se souvient avoir suffoqué durant l'agression, et qu'elle avait été complètement surprise par la tournure des événements. C'était aussi la première fois qu'elle était giflée, a-t-elle dit.
Mme DeCoutere a aussi indiqué qu'elle n'avait pas d'intentions sexuelles en allant chez l'accusé et qu'après l'agression présumée, elle est demeurée chez M. Ghomeshi, assise près de lui sur le canapé à l'écouter jouer de la guitare.
L'été suivant, a-t-elle dit, ils se sont revus au festival de télévision de Banff, en Alberta, où ils s'étaient connus l'année précédente. Lors d'une séance de karaoké, M. Ghomeshi serait monté sur la scène et lui aurait enlevé le microphone des mains pour entonner la chanson de Britney Spears « Hit Me Baby One More Time » dont la traduction est « Frappe-moi encore une fois, mon bébé ».
« Il m'a arraché le micro des mains, comme un bizarre coup de force », a-t-elle témoigné jeudi.
Un peu plus tôt, lors d'un gala de remise de prix à Banff, M. Ghomeshi aurait posé ses mains sur sa gorge en lui rappelant ce qu'il lui avait fait précédemment, a raconté Mme DeCoutere, une actrice surtout connue pour son rôle dans la télésérie et les films « Trailer Park Boys », où elle jouait Lucy, une flamme de Ricky.
Jian Ghomeshi, âgé de 48 ans, qui a animé la populaire émission culturelle "Q", à l'antenne de la radio publique, a plaidé non coupable à quatre chefs d'agression sexuelle et un chef d'avoir tenté d'étouffer, de suffoquer ou d'étrangler une personne dans le but de vaincre sa résistance.
S'il est reconnu coupable d'agression sexuelle, il est passible d'une peine maximale de 18 mois de prison. L'accusation de tentative d'étouffement, par contre, pourrait lui valoir une peine de prison à perpétuité.
La photo en bikini
Plus tôt au procès, jeudi, le juge a rejeté la requête de certains médias qui voulaient obtenir la photo en bikini envoyée à l'accusé par le précédent témoin. Le juge a estimé que la cour avait le devoir de protéger la vie privée des plaignantes et de réduire le traumatisme qu'elles doivent subir.
Au deuxième jour du procès, mardi, la cour apprenait que la plaignante avait envoyé sa photo en bikini à M. Ghomeshi 18 mois après qu'il l'eut apparemment agressée à deux reprises. Le "Toronto Star", CTV, Global TV et Postmedia ont demandé jeudi au juge de pouvoir diffuser la photo, dans l'intérêt public, puisqu'elle pourrait constituer un élément-clé de la preuve. Les médias promettaient de brouiller le visage de la femme pour préserver son anonymat.
La Couronne et l'avocat de la plaignante se sont vigoureusement opposés à cette requête. Le procureur de la Couronne Michael Callaghan a notamment plaidé que la publication de la photo pourrait dissuader d'autres victimes de dénoncer leur présumé agresseur et de venir témoigner.
Le juge William Horkins s'est rangé à cet avis. « Je ne crois pas qu'il faille voir la photo pour saisir » sa portée dans l'affaire, a statué le juge. Par contre, « les plaignantes doivent savoir que les tribunaux prennent très au sérieux leur rôle de gardien » de leur vie privée, a-t-il tranché.
Plus tôt cette semaine, l'une des trois femmes qui ont accusé M. Ghomeshi a admis, en contre-interrogatoire, que plusieurs mois après les présumées agressions, elle avait envoyé des courriels à M. Ghomeshi dans lesquels elle tentait de reprendre contact avec lui. La plaignante a expliqué à l'avocate de la défense qu'elle avait envoyé ces courriels à l'animateur comme « appâts », afin qu'il communique avec elle et qu'elle puisse lui demander d'expliquer ses gestes violents.