Faut-il boycotter les Jeux olympiques de Beijing ?

Amélia Salehabadi
2008-07-23 09:30:00
Notre avion, aux couleurs officielles de Team Canada et par un froid après-midi de février, atterrit à l’aéroport international de Beijing.
Deux ou trois autobus aux couleurs du Canada nous promenèrent d’une réception à l’autre pendant notre séjour de deux semaines au pays du milieu.
Et nous fûmes tous et immédiatement ravis par l’accueil très chaleureux que nous réservaient l’État et le peuple chinois.
Nous étions mêmes ébahis devant tant de manifestations d’amour. En effet, avec des tapis rouges un peu partout en ville et surtout tous ces jardiniers avec des bombonnes de peinture verte en train de teindre le gazon séché en vert éclatant, qui ne le serait pas ?
Et je ne sais plus qui mit fin à nos illusions chimériques, mais quelqu’un nous apprit que le CIO (comité international olympique) était en ville en même temps que notre délégation. Pour des Jeux olympiques qui se devaient de dérouler 7 ans plus tard… en 2008.
Il était évident alors que le CIO disposait d’une aura beaucoup plus importante qu’une délégation commerciale étatique, fut-elle dirigée par un chef d’ État du G7.
La question qui nous vient alors à l’esprit : pourquoi cette organisation a autant de pouvoir?
Le Mystère olympique
La Charte olympique décrit de façon assez bucolique la mission olympique :
"Philosophie de la vie, exaltant et combinant en un ensemble équilibré les qualités du corps, de la volonté et de l’esprit"
Contrairement aux idées largement répandues, le mouvement olympique n’est pas régi par une organisation publique internationale. C’est et cela demeure à la base un mouvement totalement privé.
En effet, ce sont des intérêts d’ordre privé qui ont créé et qui contrôlent à ce jour le mouvement olympique.
Mais comme le sport a toujours été également un outil politique aussi bien que financier ou social, une certaine ambiguïté s’est créée autour de ce mouvement.
Or à part l’UNESCO, avec du soft law ou de chastes vœux en matière de dopage, aucun organisme public international ne légifère au niveau des rencontres sportives internationales.
Donc les jeux olympiques par définition ne devraient qu’être qu’un événement d’ordre privé avec des conséquences politiques très limitées. Mais c’est loin d’être le cas.
Boycotter ou pas les jeux de Beijing?
Au nom des droits de la Personne, plusieurs organisations font pression pour le boycottage des jeux de 2008.
Or, sur le plan juridique, les Jeux olympiques sont strictement parlant un événement ou un spectacle purement privé et de nature commerciale. Donc si on veut boycotter la chine commercialement, il y aurait d’autres forums plus opportuns tels que par le truchement de l’organisation mondiale du commerce (OMC).
La chine a obtenu son entrée dans le club très select de l’organisation mondiale du commerce à la suite des discussions longues et acharnées entre les deux parties. Des conditions assez strictes, relativement aux droits des personnes étaient alors imposées à la Chine pour son adhésion. Ces questions font toujours l’objet d’un suivi rigoureux de l’OMC.
Boycotter les jeux ou la cérémonie des jeux ne viendrait qu’à pénaliser les athlètes en créant un climat pour le moins tendu.
Si on veut absolument instrumentaliser les Jeux olympiques, il faudra alors que leur nature juridique change. Par exemple en transférant totalement l’organisation et les pouvoirs décisionnels à un organisme public supra étatique et transparent.
Une organisation qui pourrait relever pourquoi pas des Nations Unies ?
Par Maître Amélia Salehabadi
Associée principale,
Salehabadi, Avocats