Superhéroïne à temps plein !
Éric Martel
2019-09-18 15:00:00
Le moment que redoutait tant Me Valérie Savard, coroner au Ministère de la Sécurité publique du Québec à temps partiel, et avocate chez Fasken à temps plein, est survenu il y a un an.
Une nuit, on l’a appelée pour l’avertir du décès d’un bébé, à Québec. Elle a le mandat d’enquêter sur la tragédie.
Une mission difficile, pour la mère de trois filles de deux, quatre et sept ans.
« On a tous nos limites, et moi, c’est ce que je redoutais : le décès d’un bébé. C’était très difficile à prendre », confie-t-elle à Droit-inc, en pesant délicatement chacun de ses mots.
Son rôle est alors d’accompagner la famille et de déterminer les causes probables du décès. Mais dans ce cas-ci, aucune cause n’avait identifiée pour expliquer la mort de ce nouveau-né...
« Des fois, ce sont des morts subites, inexpliquées. Quand on en vient à une conclusion comme celle-là, c’est très difficile de la partager avec des parents, en attente de réponses », relate la mère de 36 ans.
Lors de ces périodes stressantes, garder son sang froid est un défi. Me Savard y parvient en allant courir, en jouant au soccer, et en organisant son agenda avec un doigté exceptionnel. Mais aussi en misant sur un entourage toujours prêt à l’épauler dans son emploi du temps.
Une équipe de rêve
Au Ministère de la Sécurité publique du Québec, c’est sur ses collègues coroners qu’elle compte.
« Pour certains cas, j’ai un ami coroner qui est pédiatre. Il voit des situations difficiles impliquant des enfants au quotidien. On s’aide à ventiler, à réfléchir sur notre travail », explique la native de Québec.
Chez Fasken, elle mise sur ses collègues avocats, qui l’aident à se garder à jour dans divers domaines de droit. Un défi, pour celle qui pratique le droit de la santé en tant que coroner, puis le litige commercial et le droit de la construction comme avocate.
« La qualité de vie, ça ne commence pas quand on quitte le travail à 17h. C’est d’avoir du plaisir, de bonnes relations professionnelles. C’est ce que je suis venue chercher chez Fasken », lance celle qui était auparavant avocate pour la Ville de Québec.
À la maison, c’est sur le support de son mari qu'elle peut tabler. Comme celui-ci est cadre dans une entreprise à Québec, le couple doit se doter d’un agenda bien établi afin de bien s’occuper de ses trois enfants.
À travers les rendez-vous médicaux et autres imprévus, les appels du Ministère de la sécurité publique, les mandats à la cour et ses implications au sein de la Chambre de commerce et du Barreau de Québec, Me Savard assure qu’elle se réserve du temps en amoureux...
Et pour dormir environ six heures par nuit.
« J’ai toujours pensé que plus on en fait, plus on est capable d’en faire. Il faut être efficace, mais tout se passe très bien. »
D’un commun accord
Même si tout se passe bien, Me Savard savait qu’en quittant son poste à la Ville de Québec pour rejoindre Fasken, en 2018, elle ne laisserait pas beaucoup d’espaces vierges dans son agenda.
Avant de décider de faire le saut du public au privé, la Barreau 2008 a tenu de longues discussions avec son mari.
Désormais, elle passe plusieurs heures au développement de sa clientèle, dans diverses activités sociales de sa ville, en plus de voyager à Montréal et au Saguenay pour plaider. Chose qu’elle n’avait pas besoin de faire dans le cadre de son emploi précédent.
Elle souligne tout de même que la supposition selon laquelle les avocats en contentieux travaillent moins que ceux du domaine privé est fausse.
« C’est un mythe. Les gens y travaillent excessivement fort, avec beaucoup de pression. Moi, c’est comme ça que je fonctionne pour garder ma motivation : avec beaucoup de pression. Mais j’avais besoin d’être challengée, parce que j’adore développer ma clientèle, chose que je ne pouvais pas faire dans un contentieux », raconte-elle.
La passion du droit
Par ailleurs, c’est ce même goût pour les émotions fortes qui a guidé Me Savard vers le droit.
Fille d’un urgentologue, elle souhaite aider les autres dès son jeune âge.
« Comme coroner à temps partiel, être médecin, c’est une vocation,. On n’est pas coroner pour combler les fins de mois, on l’est parce qu’on est passionné et qu’on veut pouvoir faire la différence, ne serait-ce qu’en sauvant une vie un jour », illustre-t-elle.
Mais sa curiosité pour le droit vient plus tard, à l’adolescence.
Elle travaille alors chez Adaptavie, un organisme qui aide les personnes composant avec des limitations fonctionnelles. Elle offre des cours aquatiques à des participants souffrant de déficiences physiques ou intellectuelles.
« Des gens avec peu de moyens, de voix pour défendre leur droit. C’est en travaillant avec eux que j’ai eu le désir d’utiliser la mienne pour contrer les injustices qui les touchent. »
Elle complète un baccalauréat en droit à l’Université Laval, puis une maîtrise en droit et politique de la santé, à l’Université de Sherbrooke.
Aujourd’hui, lorsqu’on lui demande ce que l’avenir lui réserve, elle n’écarte pas la possibilité de devenir coroner à temps plein.
Mais dans son timbre de voix, on sent que la super-maman caresse davantage une autre éventualité…
« C’est sûr que j’ai l’ambition de faire partie de l’équipe d’associés de Fasken. Mais pour l’instant, je suis bien dans l’équipe ici. Quand le temps sera venu, je déposerai une demande en ce sens. Je le ferai quand je serai prête. »