Vie privée : gros business en France… rien au Québec
Natacha Mignon
2009-08-14 13:15:00
Chaque mois des dizaines d’assignations s’amassent dans les rédactions de la presse ''people''.
En 2008, les dommages-intérêts versés par cette presse aux célébrités auraient atteint 2 millions d’euros (plus de 3 millions de dollars). Cela crée des abus. Presque tous les étés, la présentatrice vedette, Claire Chazal, se retrouve photographiée, sur une plage, seins nus. Cela lui rapporte jusqu’à 100 000 euros (environ 155 000 dollars) nets d’impôts.
Pour le rédacteur en chef de Voici, « cela fait partie de nos frais de fonctionnement. » C’est devenu un vrai business.
« Le jour de sorties des magazines en kiosques, les avocats les feuillettent pour voir combien ils vont pouvoir gagner. Souvent ce sont eux qui conseillent à leurs clients d’assigner, quand ils n’attaquent pas de leur propre chef, à la place du people », explique la rédactrice en chef de Closer.
Ce qui attise l’appétit des vedettes et de leurs conseils, ce sont les montants de dommages-intérêts alloués par les tribunaux français : rien que pour une photo, le prix moyen est de 5 à 10 000 euros (7 800 à 15 600 dollars), non imposables. Cela peut vite monter en fonction de la notoriété, de la surface d’exposition et de ce qui est montré (« une photo de star mangeant une glace ne vaut pas une sextape »).
Pour remporter le maximum, les stars choisissent d’ailleurs scrupuleusement leur Tribunal. Longtemps, la juridiction de Nanterre s’est montrée la plus généreuse.
Les Tribunaux en cause
La France ne dispose pourtant pas d’un arsenal législatif particulièrement aiguisé en matière de respect de droit à l’image. L’article 9 du Code civil français protège la vie privée des individus en des termes généraux. Rien de révolutionnaire par rapport aux articles 35 et 36 du Code civil québécois. Mais les tribunaux français, en accordant des dommages-intérêts parfois faramineux aux vedettes ont généré un « business des plaintes».
La situation au Québec
Au Québec, rien de tel. Les principes posés par la Cour Suprême, dans l’arrêt Aubry c. Éditions Vice-Versa inc. en matière de droit à l’image sont clairs.
« Le fait de capter la photo d’une personne n’est pas une faute, la diffuser sans son autorisation en est une » explique Me Dicaire.
Éric F. Lemieux, avocat, lui aussi spécialiste en droit du divertissement, y voit toutefois une exception à celle règle, lorsque « l’image présente un intérêt pour l’information du public ».
« De toute façon, les Tribunaux accordent peu de dommages et intérêts pour ces affaires. Il est admis que les personnalités doivent avoir la couenne plus dure, explique Me Dicaire. De surcroit, de telles affaires sont plus susceptibles de se régler amiablement avant publication. »
Pas de paparazzis au Québec
La spécificité du Québec semble toutefois ailleurs. Il n’y a pas de marché des plaintes pour la vie privée au Québec car les cas sont rares. La presse ''people'' est peu active. « Vous pouvez rencontrer des vedettes au club chez Parée, mais il n’y aura pas de paparazzis pour les photographier ! » ironise Me Lemieux.
« Au Québec, il y a une tradition de laisser les personnalités tranquilles », conclut Me Dicaire.
Pourvu que cela dure !
Me
il y a 15 ansAubry c. Vice-Versa est passablement hilarant.
Q. Est-ce que ça vous a emmené des tracas, cette photo-là?
R. Des tracas; le monde ont ri de moi, là.
Q. Le monde, c’est qui ça le monde?
R. Mes amis, le monde de l’école.
Q. Le monde de l’école?
R. Um-hum.
Q. Je n’ai pas d’autres questions, Votre Seigneurie.
Ou plutôt, si la CSC reprend la citation de ce témoignage, je crois qu'il faut en pleurer.
King
il y a 15 ansAu Québec, les personnalités cherchent à se faire photographier et elles sont plus accessibles. En France, elles essaient d'imiter les vedettes hollywoodiennes et les tribunaux français allouent les montants de dommages-intérêts à l'américaine.