Le printemps du Tribunal des droits de la personne (Partie 1)
Annick Poulin
2013-07-11 11:15:00
Dans cette décision, un jeune joueur de soccer qui a prononcé des propos racistes faisant référence à l’origine arabe d’un juge de touche a été condamné à verser 1 000 $ à titre de dommages moraux et 1 000 $ à titre de dommages exemplaires.
En ce qui concerne les dommages moraux, le Tribunal a estimé que l’autorité du juge de touche avait été bafouée et sa dignité, atteinte à plusieurs reprises et de différentes façons par le joueur au cours du match en cause.
En ce qui concerne les dommages exemplaires, le Tribunal a estimé que le défendeur, en faisant gratuitement référence à l’origine ethnique de la victime tout en associant un langage grossier à ses insultes, visait de toute évidence à blesser celle-ci dans son identité arabe.
Commission des droits de la personne et droits de la jeunesse c. Arvaniti
Dans cette décision, la responsabilité d’une dame âgée et de sa fille a été retenue. La fille est copropriétaire d’un immeuble dont elle occupe le rez-de-chaussée avec ses parents, louant le logement du second étage. La mère était la mandataire de sa fille et veillait notamment à répondre aux appels et à faire visiter les lieux lorsque sa fille n’était pas disponible.
Un homme d’origine haïtienne a obtenu un rendez-vous pour une visite avec la fille une heure plus tard, soit à 19 h un samedi soir. Lorsqu’il s’est présenté à la porte avec son épouse, c’est la mère et son mari qui ont répondu, et cette dernière lui a laissé entendre que le logement était déjà loué.
La version de la défense s’articulait surtout autour du fait qu’il y avait eu un malentendu parce que la mère s’exprimait difficilement en anglais et pas du tout en français. Le Tribunal a retenu la version de la victime et a conclu que la mère, en voyant la victime et son épouse, un couple de race noire, leur a refusé la visite du logement de manière discriminatoire, et ce, à cause de leur race ou de leur couleur.
Bien qu’il n’ait pas été démontré que la fille a agi elle-même de façon discriminatoire, sa responsabilité a été retenue à titre de mandante.
La mère et la fille ont été condamnées solidairement à verser 3 000 $ à titre de dommages moraux. Seule la mère a été condamnée à des dommages exemplaires de 1 000 $. Selon le Tribunal, l'atteinte était illicite et intentionnelle. En excluant la victime comme elle l'a fait, sans même accepter qu'elle visite le logement, la mère a fait preuve de mauvaise foi. Elle a agi en connaissance des conséquences probables qui ont effectivement découlé de ses actes.
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. 9185-2152 Québec inc.
Dans cette affaire, un homme non voyant a déposé une plainte pour s’être vu refuser l’accès au bar Radio Lounge de Brossard. Or, le Tribunal a retenu que le jeune homme s’était fait offrir un accès au salon VIP et a rejeté le recours de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse. Le Tribunal a rappelé que :
«Il est bien établi en jurisprudence que les contraintes afférentes à l'accommodement ne sont pas à sens unique. Lorsque le fournisseur de service fait une proposition qui est raisonnable, il incombe au client d'en faciliter la mise en œuvre. Si l’absence de coopération du client est à l’origine de l’échec du processus d’accommodement, sa plainte peut être rejetée.» (paragr. 71 de la décision)
Dans mon prochain billet, je vous présenterai les décisions que le Tribunal des droits de la personne a rendues depuis le mois de mars 2013. À suivre…
Sur l’auteure
Me Annick Poulin est conseillère juridique à SOQUIJ depuis 2003. Elle contribue à L'Express dans les domaines du droit constitutionnel, des droits et libertés, de la propriété intellectuelle, de l'agriculture, du louage de choses ainsi que du droit disciplinaire et des professions.