Zizanie au Bureau des présidents des conseils de discipline
éric Martel
2019-07-09 15:00:00
Me Perreault considère que sa supérieure n’a pas le droit de lui retirer des dossiers, même si elle multiplie les retards pour rendre ses décisions, selon ce qui lui est reproché. Certains de ses dossiers traînent depuis plus d’un an.
Dans le cadre de cette saga judiciaire, Me Perreault fait appel à Mes Julius Grey et Isabelle Turgeon de Grey Casgrain, tandis que Me Corriveau est représentée par Mes Marc Simard et Pierre-Alexandre Boucher de Bélanger Sauvé.
Manque de célérité
En mars dernier, Me Corriveau retire cinq dossiers à Me Perreault en raison de sa lenteur à rendre des décisions, estime t-elle.
Déjà, la patronne lui avait enlevé quelques responsabilités au cours des mois précédents, afin de lui permettre de se consacrer à ces mandats, peut-on lire dans un document de cour déposé au palais de justice de Montréal.
Selon la présidente en chef, Me Perreault avait à compléter 12 dossiers en délibéré depuis 180 jours à la fin du mois de mars. Du lot, la moitié traînaient depuis un an. Or, la loi prévoit des délais de 60 à 90 jours à cet effet.
On apprend aussi dans les documents de cour consultés par Droit-inc que plusieurs membres d’ordres professionnels avaient partagé leurs préoccupations quant à ces délais à Me Corriveau. Le Bâtonnier de Montréal de l’époque, Me Michel P. Synnot, en faisait partie.
Quoi qu’il en soit, Me Perreault plaide que la présidente en chef ne détient pas le pouvoir de retirer des dossiers à sa subalterne.
« Le pouvoir de gestion de la défenderesse ne peut s'exercer que sur l’assignation initiale des dossiers, car aucune disposition ne lui donne le pouvoir de désassigner un président qui est toujours en fonction et en délibéré », estime- t-elle dans sa requête, en ajoutant qu’elle possède un droit « clair et limpide » de compléter ses délibérés.
Lui retirer ses dossiers en délibérés constituerait un « préjudice irréparable » selon elle.
« Il est de la plus haute importance pour notre système démocratique et la confiance du public dans l'exercice impartial et indépendant de la fonction de Me Perreault et de tous les autres présidents, que le tribunal que constitue le Conseil de discipline puisse agir en toute indépendance », exprime-t-elle.
Me Corriveau est en désaccord.
Le Code des professions lui offre le droit de prendre des mesures assurant la célérité du traitement des plaintes et du processus décisionnel, argue-t-elle. Dans cette foulée, elle peut retirer un dossier à un président d’un conseil de discipline.
« Un président d'un conseil de discipline n'a pas un droit acquis à demeurer saisi d'un dossier qui lui a été initialement assigné », plaide-t-elle.
Délais importants
Les conseils de discipline des ordres professionnels ont été l’objet d’une grande réforme en 2015. Celle-ci visait à réduire les délais chroniques propres au système de justice disciplinaire.
Auparavant, certains présidents prenaient des années à rendre leur décision. Il était alors impossible de leur retirer des dossiers.
Donc, la création du BPCD visait notamment à pallier à ces délais.
Me Corriveau est en poste depuis juillet 2015, alors que Me Perreault a été embauchée un mois plus tard.
Les deux présidentes ont préféré ne pas commenter l’affaire.