Panique à bord ! Je dois rédiger un communiqué

Je me rappelle encore du premier communiqué de presse que j'ai rédigé.

J'étais en première année de pratique en tant qu’avocate. C'était pour annoncer un règlement dans une affaire très médiatisée.

Je l'avais soumis à l'associé au dossier. J'avais analysé plusieurs communiqués sur le web et ils avaient tous en commun d'être simples et compréhensibles. Je l'avais donc rédigé de la sorte.

L'associé m'avait regardé et m'avait dit: "very good, very different". Et par la suite, il l'avait modifié...

Nous l'avons déjà abordé, la rédaction requise au sein du monde des communications et du marketing est bien différente de celle propre au langage juridique.

Une fois ceci dit, plusieurs avocats plaideront pourtant qu’ils sont de bons communicateurs, que c’est une déformation professionnelle, que communiquer fait partie de la description de tâche.

Ils communiquent un message précis, clair et structuré tous les jours à la cour. Ils rédigent des clauses pointues qui se veulent précises au point d’être au-delà de toute interprétation possible. Ils sont la bouche et les oreilles de leur client. Ils se doivent d’être d’irréprochables communicateurs pour transmettre les pensées et l’intention des parties.

Or, en communications, la rédaction se doit d'être plus claire, plus concise et plus colorée. Je le répète, tout cela, puisque l'on transige avec des médias qui filtrent l'information afin de la retransmettre, il nous faut être efficace. Et puis, si à la cour, toute demande au tribunal se doit de procéder par requête, le communiqué de presse est un des outils les plus utilisés pour communiquer avec les médias.

D’ailleurs, son utilisation est si répandue que lors des examens d'entrée à Radio-Canada, les compétences en rédaction des candidats sont évaluées selon leurs capacités à transposer l'essence d'un communiqué de presse en nouvelles. Un communiqué de presse =10 à 12 lignes de nouvelles.

L’essentiel doit y être contenu.

Qui/Quoi? Où? Quand? Comment?

Pourquoi? Le communiqué de presse doit comprendre toute l’information pertinente au dossier sur une page (pas plus).

Tout cela, dit simplement et de façon convaincante. L’information se doit d’être vulgarisée pour assurer une compréhension de tous.

Elle ne doit être ni trop précise ni alambiquée de termes savants et complexes.

Avez-vous déjà tenté de lire à voix haute les communiqués de presse rédigés parfois par les avocats? À l’image du texte d’une procédure judiciaire, on y articule plusieurs idées mais ces idées sont-elles celles qui seront reprises par les médias ?

Je sais que l’avocat se doit d’être précis et détaillé. Une cause se gagne parfois sur des détails de rédaction. Or, en communication, le fait d’obtenir de la couverture médiatique va dépendre davantage de l’angle développé et de son impact à un moment et un temps donné.

Vu leurs objectifs et leurs cibles bien différents, l’emploi du jargon légal ne représente pas la méthode la plus appropriée pour gérer des enjeux d’ordre médiatique.

Et pourtant, avocats comme relationnistes sont tous deux de bons communicateurs...


Mélanie Joly est avocate et associée directrice du bureau montréalais de l'agence de communication internationale Cohn&Wolfe.