L'Affaire Aubut

Aubut : aurait-on pu agir avant?

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Jean-francois Parent

2015-10-21 15:00:00

Les allégations de harcèlement sexuel visant Marcel Aubut datent de plusieurs années et proviennent de plusieurs femmes. Aurait-on pu agir avant?
Marcel Aubut
Marcel Aubut
Les médias ont fait grand cas du mutisme de l’entourage professionnel de Me Marcel Aubut quant aux allégations de harcèlement sexuel rapportée par plusieurs femmes et qui remonteraient à plusieurs années.

Mais aurait-on pu et dû agir plus tôt ?

Des proches de Me Aubut, dont le journaliste Réjean Tremblay et le promoteur de boxe Yvon Michel, ont affirmé dans certains médias avoir mis Marcel Aubut en garde contre ses comportements. Des comportements tels qu’ils auraient incité des employées du Comité olympique canadien, que Me Aubut présidait, à lancer une « Alerte Marcel » lors des Jeux olympiques de Vancouver, en 2010.

Un événement survenu en 2011 chez Heenan Blaikie, cabinet dissous l’an dernier où Marcel Aubut était associé, a par ailleurs conduit à la négociation d’une entente de règlement entre une adjointe de Me Aubut et le cabinet. Contre 10 000 dollars, l’adjointe devait renoncer notamment à toutes possibilités d’action en justice, de plainte, de recours, ou de dommages.

Louise Langevin
Louise Langevin
« Le harcèlement sexuel est une atteinte au droit à l’égalité. Un avocat doit plus que tout autre citoyen connaître ces règles », fait valoir la professeure Louise Langevin, de la Faculté de droit de Laval, qui soutient que Me Aubut est un avocat « qui ne respecte pas la loi, qui ne respecte pas lui-même le droit ».

Harcèlement au travail et responsabilité de l’employeur

Robert Boyd
Robert Boyd
Plusieurs dispositions, allant de la Charte des droits et libertés à la Loi sur les normes du travail en passant par le Code des professions, balisent la gestion du harcèlement sexuel dans les milieux de travail.

Ainsi, l’article 46 de la Charte dispose que « Toute personne qui travaille a droit, conformément à la loi, à des conditions de travail justes et raisonnables et qui respectent sa santé, sa sécurité et son intégrité physique », explique l’avocat spécialisé en droit du travail Robert Boyd, de Cain Lamarre Casgrain Wells.

Sans préjuger des actions qui auraient été prises ou non par les bureaux où Marcel Aubut était associé - dont Heenan Blaikie, et après sa dissolution, BCF- Me Boyd observe que l’employeur a l’obligation légale d’offrir à ses employés un environnement exempt de harcèlement.

Un cabinet d’avocats est à la fois « un partnership en nom collectif, et une société de gestion agissant à titre d’employeur pour le personnel administratif. C’est cette dernière entité qui doit agir dans les cas de harcèlement, et qui engage sa responsabilité si rien n’est fait », poursuit Me Boyd.

Un employeur a l’obligation de mettre un terme au harcèlement dès qu’il en est informé, et faire enquête sur les allégations. S’il appert qu’elles sont fondées, « les options sont variées, selon Me Boyd. Ça peut aller de la relocalisation des personnes au congédiement ».

Acte dérogatoire à la dignité de la profession

Amélia Salehabadi-Fouques
Amélia Salehabadi-Fouques
Le Code de déontologie des avocats comporte aussi une disposition visant le harcèlement sexuel. Selon l’article 4.02.01, « harceler sexuellement toute personne à l'occasion de l'exercice de sa profession » constitue un acte dérogatoire à la dignité de la profession et peut donc donner lieu à des sanctions disciplinaires.

Le récent dépôt d’une plainte contre Aubut au Syndic du Barreau par Me Amélia Salehabadi-Fouques a enclenché le processus disciplinaire du Barreau. Mais le Syndic aurait-il pu agir en vertu d’un pouvoir d’ « auto saisine », et être proactif s’il avait eu vent des allégations qui pesaient contre Me Aubut ?

Il y a loin de la coupe aux lèvres. « Mon opinion professionnelle est que je ne pourrais pas agir », sur la seule foi d’informations parcellaires, répond Nicolas Bellemare, Syndic adjoint du Barreau. Me Bellemare explique que pour que le Syndic agisse, « il faut qu’il y ait chose jugée ».

Il cite l’article 149.1 du Code des professions qui balise les situations dans lesquelles le Syndic peut déposer une plainte auprès du Conseil de discipline de son propre chef. Pour l’essentiel, il doit y avoir condamnation d’un tribunal pour aller de l’avant.

Discrétion du Syndic

André Bois
André Bois
« C’est vrai, mais il y a des dispositions générales dans le code qui accordent une certaine discrétion » au Syndic, rétorque André Bois, associé chez Tremblay Bois Mignault à Québec et spécialiste du droit disciplinaire.

Si le Syndic ne peut appuyer ses décisions seulement sur des rapports administratifs ou sur la foi de témoignages, il peut lancer lui-même une enquête, estime Me Bois. Les articles 122 et 128 du Code des professions, selon lesquels le Syndic peut faire enquête sans égard à la source de l’information, le permettent.

D’autre part, une certaine latitude est permise quant à la définition, par un conseil de discipline, d’un acte dérogatoire à l’honneur, poursuit Me Bois, qui donne l’exemple de l’article 152 du Code.

Ainsi, « le conseil décide privativement à tout tribunal, en première instance, si l'intimé a commis une infraction (…). En l'absence d'une disposition du présent code, de la loi constituant l'ordre dont l'intimé est membre (…) le conseil décide de la même manière: si l'acte reproché à l'intimé est dérogatoire à l'honneur ou à la dignité de la profession ou à la discipline des membres de l'ordre (…) ».

Ayant déjà été membre du conseil de discipline du Barreau, Me André Bois rappelle que des cas disciplinaires où des actes, comme se soulager en public, ont déjà fait l’objet de réprimandes.

Obligation de dénoncer ?

De plus, la déontologie exige aussi des avocats qui sont témoins d’actes de harcèlement commis par leurs collègues avocats qu’ils agissent pour y mettre fin.

« Si le harcèlement sexuel est exercé par un avocat de votre société, vous avez 30 jours pour prendre les moyens raisonnables pour faire cesser ou pour empêcher la répétition de cet acte dérogatoire, sous peine de commettre vous-même un acte dérogatoire », écrit le Barreau à ce sujet dans le cadre d’une capsule déontologique.

« Personne n’en parlait, car il y avait trop à perdre. Un contrat, un emploi… », constate la professeure Louise Langevin. Est-ce qu’on a été trop complaisant ? « Toutes les personnes alentours de lui ont été complices », conclut l’avocate émérite.


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14 commentaires
  1. Ma foi
    Ma foi
    il y a 9 ans
    Attention au français...
    « Personne n’en parlait, car il y avait trop à perdre. Un contrat, un emploi… », constate la professeure Louise Langevin. Est-ce qu’on a été trop complaisant ? « Toutes les personnes alentours de lui ont été complices », conclut l’avocate émérite.

    J'espère que cette avocate émérite est mal citée et n'a pas dit " les personnes alentours"...

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 9 ans
      Insipide
      Quel commentaire ridicule. C'est tout ce que la lecture de ce texte vous inspire? Pourquoi?

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 9 ans
      ridicule vous même
      Si le premier commentaire est ridicule selon vous, vous êtes encore plus ridicule en y répondant...

    • Ma foi
      Ma foi
      il y a 9 ans
      Insipide vous-même
      Qui a dit que c'est tout ce que je retiens du texte ? Je vous soumets qu'il n'est pas ridicule de souligner à l'auteur du texte, tout comme à Droit-Inc, les bourdes de français. Visiblement, vous n'accordez pas d'attention à ces erreurs...Peut-être n'êtes vous juste pas capable de les déceler...

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 9 ans
      2 commentaires pour dire la même chose?
      Ou peut être que le fonds l'emporte sur la forme?

      Vous avez raison, réconfortez vous dans votre croyance que votre "maîtrise' du français fait de vous un être supérieur.

      Je n'ai aucun doute que quand vous parlez, votre niveau de français est toujours à la hauteur des critères les plus rigoureux et que vous ne tournez jamais les coins ronds portée par une idée et l'énergie du moment.

      Je suis également convaincu que si vous n'avez rien d'autre que ça à ajouter, ce n'est pas tout ce que vous avez retenu du texte.

  2. Employée
    Employée
    il y a 9 ans
    Question
    Est-ce qu'une employée d'un cabinet d'avocats victime de harcèlement sexuel ou psychologique peut déposer une plainte au syndic en même temps qu'une plainte à son employeur?

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 9 ans
      La réponse
      Oui, le syndic a juridiction sur l'avocat, le bureau d'avocat a une responsabilité d'employeur et/ou d'associé. Dans un cas plus grave, on pourrait également formuler une plainte à la police.

    • Employée
      Employée
      il y a 9 ans
      merci
      Merci beaucoup pour la réponse. En sachant que l'on peut s'adresser au syndic il sera peut-être plus facile pour les victimes de formuler des plaintes.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 9 ans
      re merci
      Sauf que (peut-être le savez-vous déjà) une plainte au syndic ne vise pas à obtenir réparation, ou faire cesser un comportement, etc.

      Comme pour tout ordre professionnel, les démarches du syndic (et éventuellement, du comité de discipline) visent à déterminer s'il y a eu manquement au plan déontologique et à imposer des santions, s'il y a lieu.

      Pour une réparation, il faut s'adresser au tribunal compétent.

  3. Citoyenne
    Citoyenne
    il y a 9 ans
    et la question?
    Je trouvais la question de l'Employée très pertinente et avais hâte de voir si un avocat y répondrait. Il semble cependant que les avocats aiment davantage se concentrer sur les bourdes de français plutôt que sur les questions juridiques. J'imagine que c'est pour cela que les gens n'ont pas beaucoup confiance aux avocats. Si je veux que quelqu'un décèle les fautes dans mon contrat, je vais demander à un prof de français. ¨Ca doit coûter mois cher!

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 9 ans
      WOW!
      Bravo citoyenne ! C'est vrai qu'un contrat avec des fautes, ça fait très professionnel. Mais avec une cliente comme vous, il faut croire que ça ne dérange pas. Encore plus avec une cliente qui pense qu'elle devrait demander à un prof de français de déceler les fautes dans son contrat. J'espère ne jamais vous avoir pour cliente, vous ne devez pas comprendre ce que vous lisez...

    • Parajuriste
      Parajuriste
      il y a 9 ans
      Re-WOW!
      Qui plus est, et étant bien entendu que le fond est plus important que la forme, il faut également garder à l'esprit que les mots sont dans le domaine du droit le principal outil de travail. Il va de soi, il me semble, que les fautes de français n'ont pas leur place dans ce domaine. Personnellement, ça me défrise de voir des fautes dans un document rédigé par un avocat ou son adjointe. Mais bon... je suis peut-être trop formaliste?

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 9 ans
      mois cher ?
      "Ca doit coûter mois cher!" ?

      J'imagine que vous vouliez dire :

      "Ça doit coûter moins cher!".

      Cette correction étant gratuite, je présume qu'un prof. de français ne coûterait pas "mois" cher.

    • Citoyenne
      Citoyenne
      il y a 9 ans
      merci
      Merci pour la correction gratuite. Je me demande simplement quelle est la valeur ajoutée pour le client lorsque les avocats mettent l'emphase sur les fautes et non sur les questions juridiques. La plupart des commentaires sur ce site semblent relever de batailles sur la forme rare sont les commentaires pertinents sur les questions juridiques.

      Est-ce que les avocats sont formés pour débattre de la forme ou pour débattre sur les enjeux juridiques

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