Akwesasne : qu’en est-il de l’expérience de justice réparatrice?
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Radio -Canada
2018-05-14 10:15:00
![Gilbert Terrance, l’administrateur de cette cour](https://gvm.nyc3.digitaloceanspaces.com/store/uploads/public/di/article/22519__Gilbert_Terrance.jpg)
Il n’est pas 18 h et la cour commence à se remplir. Autour d’une table grise, six chaises sont disposées. Pas question de siéger en hauteur ni de porter des robes de magistrat pour les membres de la cour.
L’avocat porte une veste marron, la juge un haut blanc à pois noirs, la procureure une veste rose vif. Timidement, une femme vient s’asseoir sur le bout de la chaise en face de la juge de paix, Shannon Hall, pour exposer sa cause.
Depuis le 2 octobre 2016, le système de justice d’Akwesasne fonctionne en dehors du cadre fédéral grâce à une combinaison du système actuel et du système traditionnel.
Historique
Dans les faits, cette cour a commencé dans les années 1960, mais elle appliquait des règlements, des mesures liées à la Loi sur les Indiens. « On l’a laissé tomber et (on a) obtenu l’autorité de la communauté pour en arriver au point où nous en sommes », explique Gilbert Terrance, l’administrateur de cette cour.
Si auparavant elle se tenait dans un bâtiment communautaire avec des réunions en cercle, la cour a pris place dans un bâtiment officiel et elle ressemble beaucoup plus à une cour de justice provinciale.
« Pour que l’on soit plus crédible », explique avec un petit sourire Gilbert Terrance. « Les gens regardent beaucoup les séries télévisées! ».
Les comparaisons s’arrêtent là : de la manière d’entendre une cause aux membres de la Cour, qui n’ont pas forcément d’études en droit, mais une bonne réputation et une bonne crédibilité, en passant par les décisions rendues et aux objets pour prêter serment, tout diffère.
Une bible est mise à disposition, mais la plume d’aigle est généralement choisie pour dire la vérité, toute la vérité. Et les termes « coupable » ou « non coupable » ne seront jamais prononcés de la soirée.
Sken:nen – paix, Kasatstensera – force et Kanikonri:io – bon esprit
Ce soir, une trentaine de personnes sont attendues. Plusieurs se présentent avec leurs enfants, attendent leur tour patiemment. Un homme s’approche. La juge Shannon Hall le salue, petit sourire, mais visage fermé.
Elle l’écoute puis lui demande s’il travaille, s’il va à l’école. À temps plein ou à temps partiel? Et lui dit qu’elle apprécie son « attention à corriger sa situation ». Il doit 7000 dollars en contraventions.
Venancette Cook demande à intervenir. La responsable du programme de déjudiciarisation suggère de prendre une partie de la somme et de l’échanger contre des services communautaires : « Ainsi pourra-t-on voir sa bonne volonté », précise-t-elle.
Shannon Hall regarde l’homme et lui demande : « Monsieur, combien d’heures êtes-vous motivé à faire? » Après discussion, il devra faire 600 heures en une année et payer une partie du montant de la somme due.
Le mot d’ordre de la cour est de rétablir l’équilibre dans la communauté. Pour cela, elle entend les causes en tenant compte des principes de paix, de force, de bon esprit, de respect et de justice.
Le père de famille plein de bonne volonté évitera ainsi de passer par la case prison, restera avec ses enfants et, idéalement, se reprendra en main.
« Êtes-vous content? », demande la juge avec un grand sourire. « Oh oui », répond l’homme qui se voit offrir une seconde chance.
Une nécessité
![L'avocat Franck Horn](https://gvm.nyc3.digitaloceanspaces.com/store/uploads/public/di/article/22519__Franck_Horn.jpg)
« Nous constatons que les gens reviennent (après la prison) et font la même chose, encore et encore. Avant que cela arrive au procureur de la Couronne, avant d’aller en prison, nous voulons arrêter le processus là! Nous voulons tendre l’oreille, donner une chance d’éviter la prison. »
Si les rapports Gladue (demandés par les juges pour établir une peine qui tient compte du passé de la personne autochtone) permettent de réduire les peines, la surreprésentation autochtone en milieu carcéral reste problématique.
La proportion d’adultes autochtones en détention au Canada est environ neuf fois plus élevée que leur représentation dans la population : ils constituent plus de 26 % des détenus dans les prisons fédérales.
« Tant que les Autochtones n’auront pas leurs propres cours, nous aurons beaucoup de problèmes, lance Franck Horn parce que les autres cours ne nous comprennent pas et par conséquent ne savent pas quoi faire. »
Franck Horn sait de quoi il parle. Avocat originaire de Kahnawake, il travaille autant à la cour d’Akwesasne qu’au tribunal de Cornwall. Souvent, raconte-t-il, ses clients lui confient qu’ils savent, avant même l’audience, qu’ils vont être déclarés coupables.
Même s’il existe des services adaptés dans certaines cours, la meilleure réponse, selon lui, est celle-ci : une cour faite par et pour les Autochtones, avec leurs propres membres qui les jugent et qui, au final, travaillent pour que la personne soit aidée.
Défis
Un tel système ne vient pas sans ses défis. « C’est dur parfois », soupire Shannon Hall. « Les gens sont habitués au processus de l’extérieur qui est plus punitif et qui concerne davantage les droits individuels, alors que nous favorisons plutôt une approche collective et réparatrice. »
À preuve, cet homme qui ne veut rien entendre de cette cour et préfère passer devant le tribunal de Valleyfield en espérant obtenir « la pitié du juge » ou sa peine rapidement, plutôt que de s’engager pour la communauté et pour sa réhabilitation.
Après en avoir discuté avec la juge de paix, il s’intéresse peu à peu au programme de déjudiciarisation. Il va y réfléchir et revenir.
Il y a aussi ceux qui ne se présentent pas et qui sont quelque part, côté canadien ou américain, dans la communauté et qui sont difficiles à retracer.
DSG
il y a 6 ansThis is not historically accurate. Traditionally aboriginal justice involved having detainees run the gauntlet between two rows of tribesmen smashing the accused with clubs. Guilt or innocence depended on whether or not the detainee survived. I saw it in Black Robe.
Anonyme
il y a 6 ansRacontez-nous une scénette de Daniel Boone aussi, pendant que vous y êtes!