Comment devient-on l'avocat de Marc Bergevin?

Le curriculum vitae de Me Sébastien Vézina est impressionnant.

L’associé de Lavery, âgé de 44 ans, a aidé le consortium des frères Molson à procéder à l’acquisition des Canadiens de Montréal. Il a représenté d’anciens joueurs de la LNH tels que Daniel Brière, Marc Bergevin et Luc Robitaille ainsi que des athlètes olympiques comme Jennifer Abel et Bruny Surin. Il a épaulé les entraineurs-chefs Jacques Martin et Guy Boucher dans leur nomination au sein du circuit Bettman.

Comment a-t-il réussi à percer un milieu si difficile?

« Il faut compter sur trois piliers: la générosité, la créativité et le courage », estime Me Vézina, un expert en matière de marchés publics, de fusions-acquisitions, de financement corporatif, de sport et divertissement et de ressources naturelles.

Trois valeurs que l’on retrouve naturellement chez les sportifs. Aussi étrange que cela puisse paraître, Sébastien Vézina explique que dans le domaine des négociations, la générosité est une des valeurs les plus importantes.

« Quand on travaille, il faut mettre son coeur sur la table. Lorsque tu es généreux avec les gens, ils le seront encore plus avec toi. »

Au bas de l’échelle

L’avocat a toujours eu un intérêt pour le sport ainsi que le monde des affaires. Lorsqu’il a réalisé que Me Marcel Aubut semblait avoir l’exclusivité des dossiers sportifs au Québec, il a compris que l’opportunité de travailler dans le domaine de ses rêves n’était pas si farfelue.

« Je me suis rapidement dit que s’il n’y avait qu’une seule personne dans le marché, il y avait certainement de la place pour une deuxième. Je savais qu’en me fixant des objectifs et qu’en demeurant dans un cadre précis, ma réussite était réaliste.»

Me Vézina avoue que sans son troisième pilier, il n’aurait pu s’ouvrir toutes les portes et mettre sa carrière dans le domaine sportif en marche.

« Sans une bonne dose de courage, je ne serais pas où j’en suis présentement. »

À l’âge de 25 ans, l’avocat en herbe a mis son complet et s’est dirigé au repêchage de la LNH. Il n’y connaissait presque personne.

Rapidement, il a réalisé qu’il était le seul avocat dans l’amphithéâtre cette journée-là.

« L’expérience m’a permis de voir comment procédaient les acteurs dans ce milieu-là. J’ai toujours cru qu’il fallait s’imprégner d’un environnement afin de mieux le comprendre. »

Peu après, celui qui a obtenu son Barreau en 1999 recevait un appel de Pat Brisson, l’un des agents de joueurs les plus importants de la LNH. Il savait à ce moment-là qu’il n’avait qu’à bien faire son travail pour éventuellement obtenir une visibilité favorable dans ce marché.

« Rentrer dans le milieu est extrêmement dur. Par contre, une fois que tu y es, tu connais rapidement tout le monde. »

L’avocat avoue qu’afficher des noms importants à sa feuille de chasse est un intéressant dans le domaine des sports et du divertissement. « Des fois les gens me disent, si tu es bon pour Marc Bergevin, tu es bon pour moi. »

Sans conflit d’intérêts

De fil en aiguille, Me Vézina s’est retrouvé à représenter une multitude de clients dans le milieu du sport. Aujourd’hui, il arrive même souvent qu’un de ses anciens clients se retrouve dans le parti adverse lors d’un processus de négociations.

Celui qui a fait son Common Law à la Western Ontario University explique qu’il s’est lié rapidement d'amitié avec les acteurs importants de la LNH, mais que cela ne l’empêche pas de bien faire son travail.

« Quand j’entre dans la partie plus importante des négociations, c’est là que je mets mon chapeau d’avocat. Ce n’est pas parce qu’un gars comme Steve Yzerman est en conflit avec un de mes clients qu’il se gênera quelques mois plus tard pour m’appeler et me demander conseil. »

Au contraire, les gens qui l’opposent à la table des négociations sont souvent heureux de retrouver un visage connu.

Me Vézina raconte d’ailleurs qu’après avoir représenté Geoff Molson dans l’acquisition du CH, il l’opposait dans la négociation du contrat de Marc Bergevin.

« Il était réjoui de savoir qu’il allait devoir faire affaire avec quelqu’un qu’il connaissait. C’est positif d’être familier avec les techniques de travail des gens avec qui on négocie. »

De nouveaux horizons

Sébastien Vézina figure sur l’édition prestigieuse du Legal Lexpert 2018 Directory identifiant les avocats chefs de file au Canada. Il avoue qu’à son âge, ce n’est plus le type d’honneur qui lui enflera la tête.

« Lorsque tu gagnes ce type d’honneur à 20 ans, tu crois être le meilleur de ton industrie. À 44 ans comme moi, tu ne fais qu’accepter le prix humblement. »

À ses yeux, ces honneurs ne sont qu’une référence intéressante pour les clients potentiels qui ne le connaissent pas et qui souhaitent connaître l’opinion des acteurs du milieu juridique à son sujet. Malgré l’obtention de ce statut, il croit que son ascension dans le droit ne fait que commencer.

« Je me perçois encore comme une recrue. Je n’ai pas fait le tour du jardin. Je veux avoir une valeur pour Montréal, la province de Québec, et le Canada à l’international. »

Pour ce faire, il entame présentement un partenariat avec une organisation oeuvrant dans le domaine des Esports, en plus d’être conseiller spécial du commissaire de la LHJMQ.

La seule chose qui l’effraie à ce point-ci de sa carrière: la lassitude.

« Je redoute toujours le moment où je n’aurai plus la flamme. D’être piégé dans mon personnage et de ne plus vouloir être là. Je ne m’imagine pas travailler dans ce domaine sans avoir la flamme, une passion pour ce que je fais au quotidien. »

S’il n’en tient qu’à sa détermination et à ses projets futurs, cette flamme semble bien loin de vouloir s'éteindre.