Litige immobilier, droit disciplinaire : quoi de neuf?
Camille Dufétel
2023-08-14 14:15:00
Il représente les principaux intervenants du domaine immobilier dans des litiges complexes à l’égard des transactions immobilières et ses clients en litige immobilier sont des professionnels qui proviennent de la Montérégie et du Grand Montréal.
Il a par ailleurs développé une spécialisation en droit disciplinaire en représentant des courtiers devant les comités de discipline. Il agit aussi comme formateur auprès des courtiers immobiliers. Droit-Inc s’est entretenu avec lui.
Dans un premier temps, pouvez-vous m’expliquer plus précisément ce dans quoi vous vous spécialisez?
J’ai développé ce qu’on appelle une micro niche, je ne fais que du litige immobilier et du droit disciplinaire pour les courtiers immobiliers.
Quand je dis « droit immobilier », ça se limite vraiment aux transactions immobilières, au courtage immobilier, à ce qui va toucher également le domaine des vices cachés, des désistements d’offres d’achat, et évidemment la question du droit disciplinaire.
C’est ce que vous faites depuis toujours?
Oui, ça a commencé par hasard. J’ai rencontré, vers 2002, un inspecteur en bâtiment qui faisait des conférences auprès de courtiers immobiliers et qui m’a proposé de se joindre à lui. J’ai commencé comme ça, à faire des formations, des conférences, et je ne me suis jamais arrêté.
Qu’est-ce qui vous plaît tant dans ce domaine?
C’est la transaction la plus importante dans la vie des gens, souvent leur plus grand investissement, d’acheter une maison. Ou de la vendre, ce qui va leur permettre d’être heureux et de passer à autre chose. Il y a un côté tangible vraiment intéressant.
Et les courtiers immobiliers, ce sont des gens passionnés. C’est vraiment un milieu stimulant. Ce que j’ai développé dans les dernières années, c’est le droit disciplinaire, quand des courtiers immobiliers sont poursuivis en responsabilité, quand il y a des plaintes. Depuis deux ans, j’en fais davantage.
J’aime dans ce domaine de droit la négociation, le fait de donner l’heure juste aux clients, se faire une idée sur la plainte qui a été déposée, et défendre le courtier ou négocier la meilleure entente.
Ce qui est formidable, c’est qu’il n’y a pas beaucoup de formulaires, de procédures, de paperasse. C’est vraiment du temps où on l’on parle au client, à l’avocat adverse, au comité de discipline, mais il n’y a pas beaucoup de temps de secrétariat.
Remarquez-vous des tendances particulières dans votre domaine de pratique? Si oui, plutôt en raison de la loi ou de la conjoncture économique?
La loi ! Je vais parler surtout de droit disciplinaire. L’OACIQ (l’organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec) a resserré les contrôles depuis quelques années, la Loi sur le courtage a été modifiée, ainsi que les règlements, à deux/trois reprises. On a une grosse intervention de l’OACIQ dans le travail des courtiers.
Récemment, le gros développement, on appelle ça la double représentation, c’est tout le contrôle des courtiers immobiliers sur le fait qu’ils ne peuvent pas représenter le vendeur et un acheteur. Dans le domaine du courtage immobilier, la loi change à une vitesse incroyable et même les dirigeants d’agence ont de la difficulté à suivre.
Ça implique quoi pour vous, dans votre travail d’avocat?
On a fait une analyse de dossiers et on a vu qu’en l’espace de deux ans, le nombre d’audiences ou de jugements rendus en droit disciplinaire avait doublé. C’est lié au fait que certains critères ont été resserrés et qu’il y a beaucoup plus de surveillance dans le domaine.
Ça vous donne donc beaucoup de travail?
Beaucoup se représentent seuls. Mais j’ai constaté une augmentation du nombre de dossiers chez nous.
C’est la raison pour laquelle vous faites beaucoup de droit disciplinaire?
Voilà, mais à l’inverse, je fais beaucoup de conférences pour faire du droit préventif, et faire en sorte que les courtiers n’aient pas de problème. Mes valeurs ne sont pas de dire que je vais profiter de la situation, mais plutôt que je vais accentuer la prévention.
Et plus globalement, en droit immobilier, que remarquez-vous?
Pour les ventes de propriétés : l’exclusion de la garantie. En 2020, année de la pandémie, une tendance s’est dégagée, celle de faire des ventes sans garantie légale, aux risques et périls de l’acheteur. Et étant donné la pandémie, les acheteurs renonçaient à faire inspecter les propriétés. À l’époque, j’ai fait des conférences auprès des agences immobilières pour sensibiliser les gens à ne pas faire ça.
Malheureusement, en 2022/2023, on a des quantités phénoménales de gens qui nous appellent pour dire qu’ils ont acheté une propriété, qu’ils n’ont aucune garantie, qu’ils ne l’ont pas fait inspecter, et ils nous demandent ce qu’ils peuvent faire. C’est difficile.
Car ils se rendent compte qu’il y a des problèmes dans le logement ?
Oui, et pour avoir un recours, ils doivent démontrer que le vendeur le savait et a voulu les tromper, ce qui n’est pas évident. C’est vraiment un gros phénomène économique et juridique. C’est triste.
J’imagine que vous n’avez pas de journée type, mais à quoi ressemble votre quotidien ?
Je partage mon temps entre la Montérégie, Montréal et Québec. J’ai plus des semaines types.
Par exemple à Québec, le lundi, je rencontre l’équipe, on fait du brainstorming, je fais du mentorat, on regarde les nouveaux dossiers, on répond. Le mardi et le jeudi, ce sont des journées de pleine productivité. Je fais des conférences ou des interrogatoires, à moins que j’aie des audiences sur trois jours. Je travaille des dossiers. Ce sont des journées d’analyse.
Le mercredi matin, je me ressource. Puis je fais beaucoup de facturation, d’administration, de suivi de dossiers, de travail sur l’entreprise. Le vendredi, je garde ça pour rencontrer des gens, faire du suivi de développement, de dossiers, j’essaie de faire tous mes retours d’appel pour que les gens puissent avoir l’esprit tranquille en fin de semaine.