Marijuana : des avocats au cœur de grosses transactions

Delphine Jung
2018-02-21 15:00:00

Ainsi, au cours de la dernière année, d’après un article publié dans The American Laywer, les compagnies de cannabis ont travaillé fort pour joindre leurs forces d’ici le 1er juillet, date qui devrait être celle à laquelle fumer du pot sera légal.
Certains grands cabinets ont donc conseillé leurs clients de l’industrie du cannabis dans une multitude d’opérations visant à conquérir des parts de ce marché qui s’annonce déjà juteux.

Borden Ladner Gervais et Stikeman Elliott ont quant à eux conseiller CanniMed en Saskatchewan.
Selon Reuters, cette alliance va créer le plus important producteur de marijuana au monde.
La compagnie Aurora a même mis la main sur Jillian Swainson, ancienne associée en droit des affaires au cabinet Brownlee d’Edmonton, ou elle a exercé pendant dix ans.

Aphria, un fournisseur ontarien de marijuana médicale s’est quant à lui tourné vers Stikeman Elliott pour gérer son achat de la société de transformation et d’extraction de cannabis Nuuvera le 29 janvier. Montant de l’opération : 670 millions de dollars.
En avril 2017, c’est le cabinet Norton Rose Fulbright qui a pris la tête de Nuuvera, dont le chef de l’exploitation et le conseiller juridique est l’ancien associé de Baker Botts, Josh Epstein.

C’est ainsi qu’en peu de temps, la consolidation des liens entre producteurs, distributeurs et les autres acteurs de l’industrie du cannabis, est devenue monnaie courante au Canada. Le pays est devenu un véritable foyer de transactions.
Des entreprises comme Nuuvera, qui travaille avec des partenaires en Allemagne, en Israël et en Italie, cherchent également à étendre leur présence au niveau international.
Au Québec

Le cabinet Langlois, qui a fondé un groupe de travail sur le cannabis composé de 12 avocats. Sans pouvoir divulguer le nom de ses clients, Me Mylany David, associée qui dirige ce groupe explique que « aucun d’entre eux n’est listés en bourse mais plusieurs y aspirent lorsque le cycle de production sera débuté ».
Le cabinet travaille avec des clients qui sont dans le projet de produire du cannabis médical, donc déjà autorisé. « Lorsque le cannabis sera aussi autorisé pour une consommation récréative, cela sera un nouveau marché pour eux. Il y a une incitation à se positionner dans le cannabis médical pour peut-être proposer un produit de qualité pour le récréatif », poursuit l’avocate.
Canopy Growth a mis la main sur le plus grand producteur de tomates roses en Amérique du Nord, Les Serres Bertrand, qui a converti ses installations de Mirabel en serres de production de cannabis biologique.
Beaucoup de questionnements

Me David évoque des marchés bancaires encore très frileux vis à vis de cette industrie, encore associée à quelque chose d’illégal.
« La légalisation est prévue dans six mois et il y a encore, malheureusement, des incertitudes quant à ce que cela implique », dit Donald Belovich, qui a représenté CanniMed dans ses pourparlers avec Aurora Cannabis.
Ces questionnements causent une certaine volatilité d’après Me Belovich, qui explique que si un jour la valeur d’une action augmente de 10%, le lendemain elle peut perdre autant.
« Tout le monde se demande s’il y a une bulle qui est en train d’être créée et si oui, combien de temps elle va durer. En 2000, on se posait la même question par rapport à une bulle technologique. On vit quelque chose de similaire. Il s’agit d’une situation où l’offre est insuffisante pour combler la demande, donc il y a un attrait parce que la promesse de rendement est énorme », ajoute Me David.
Mais une telle agitation n’est pas nécessairement mauvaise. « Cette incertitude alimente en partie la spéculation. Cela peut aussi créer beaucoup d’opportunités », ajoute Me Belovich.